Mas, c'est un défilé. Venez tôt ou assurez-vous de réserver. Et encore, il n'est pas garanti qu'on vous trouvera une place à l'heure convenue, tant le restaurant est populaire. Vous demanderez pourquoi? Vous en connaissez beaucoup de restos où la cuisine est hors norme, d'une grande qualité tant technique que dans le souffle du chef, et où la facture monte à moins de 100$ tout compris?

Dans un local sobre et étriqué, tout sur le long, avec une petite mezzanine et des tables collées sur celles des voisins, ce Mas n'a rien d'un mas: il est contemporain, urbain, montréalais, et sa cuisine n'a de provençal que certains ingrédients. Mais le décor modeste est net et tranchant comme un Laguiole. On s'est contenté de l'essentiel, un petit encadrement, un éclairage précis, un frigo où entreposer le foie gras.

 

Nous sommes surpris d'apprendre que c'est ici la nouvelle entreprise de Michael Ross, qui nous avait habitué, à la Brunoise, à une cuisine franche, forte de ses accents urbanisés de terroir français, servie en plein coeur du Plateau. Le voici aux antipodes (en tout cas de la ville) avec ce petit troquet chic, impeccablement tenu et qui propose une carte bien faite et malicieuse, couvrant avec aisance le répertoire ouvert aux tendances actuelles. Les portions sont raisonnables (on mange moins et on se sent mieux), et les présentations sont quasiment académiques tant la précision est grande. Rien ne dépasse, les garnitures sont étudiées avec sobriété et élégance.

Annoncé comme une salade de betteraves au fromage de chèvre, ce plat nous donne quelques frissons: des quartiers d'oranges tranchés à vif, des pistaches rôties, du persil, du chèvre frais très bon, crémeux et présenté à la cuillère, deux variétés de betteraves, les jaunes et les Chioggia, un peu crues. Tout est simple, parfaitement acidulé. Puis une crème de maïs doucereuse avec une chiffonnade de laitue et des noisettes grillées, garnie d'un trait d'huile de noisettes.

En plat, nous attaquons de la morue charbonnière servie avec des fèves fraîches garnies de feuilles de choux de Bruxelles et de pois verts, c'est tout le printemps dans ce ragoût de légumes. Du reste, les Méditerranéens font souvent ce genre de sautés qu'ils associent à des herbes fraîches comme la menthe chez les Napolitains et les Siciliens, ou l'origan frais en Grèce. Un jus de veau concentré sert de contrepoint à ce poisson très frais et pimpant. Le ris de veau est parfait, juste assez croûté, tendre et parfaitement assaisonné.

Les desserts nous inspirent: une panna cotta vanillée exquise et délicate avec du gingembre confit et quelques zestes d'orange, servie avec des fruits frais. Ou encore un pavé chocolaté, coulant de richesse.

Bref, il y a réellement une touche prodigieuse à ce petit resto: voilà une cuisine servie sans remords, sans grimages et surtout, sans accrocs. En un mot, parfaite!

 

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Mas

3779, rue Wellington

Verdun

514-544-3779

On y retourne? Certainement! C'est tout de même l'une des meilleures affaires en ville en ce moment.

Prix: Avec quelques verres de vin, les taxes et le service, on s'en tire à moins de 90$. La formule comprend l'entrée, le plat et le dessert pour moins de 30$ par personne. Et les vins sont facturés plus que raisonnablement.

Faune: Il y a de tout et c'est ce qui est intéressant: couples surtout, d'un âge certain, accrochés à leur portable même un soir de semaine, follement urbains. > Décor: Doux et plaisant, avec cette humeur de sacristie qui caractérise les petits restos de ce temps-là. C'est réussi dans le mode apaisant (si ce n'était du bruit des voix, d'Aretha Franklin en fond sonore, des sonneries incessantes).

Service: Preste et souriant, légèrement dépassé et affairé.

Vin: Quelques bons choix au verre, des propositions honnêtes et bien choisies. La carte est courte, au plus une cinquantaine de crus, presque tous français ou californiens et facturés à petits prix.

+ L'impression générale que Ross a atteint une réelle maturité de chef proprio, sans se la jouer. Sa cuisine est brillante et il peut offrir ce genre à moins de 30$ pour trois services, on croit rêver!

- Peut-être un problème de gestion, mais 45 minutes d'attente avant d'avoir une table déjà réservée, c'est un peu dur à prendre!