Inscription au patrimoine immatériel de l'Humanité, nomination d'un restaurant parmi les 50 meilleures de la planète: la cuisine mexicaine est en train de gagner ses lettres de noblesse, loin de l'image grasse et peu sophistiquée des nachos et autres burritos.
Son principal atout: une grande variété de produits frais que l'on trouve encore facilement sur les marchés du centre et du sud du pays, mais aussi une créativité nouvelle incarnée par une nouvelle génération de chefs.

Depuis l'époque préhispanique, la cuisine mexicaine convoque une grande richesse d'ingrédients, plusieurs variétés de maïs, de haricots et de piments «chile», mais aussi des variétés locales de tomates, d'avocats et de cacao.

Aujourd'hui, les chefs se plaisent en outre à détourner les recettes traditionnelles.
«Nous sommes à la recherche de nouvelles expériences», explique Enrique Olvera, fondateur du Pujol, premier restaurant de cuisine mexicaine à figurer depuis avril dans la liste S.Pellegrino des 50 meilleures tables du monde, établie par 800 experts pour la revue britannique Restaurant Magazine.

Cinq mois auparavant, en novembre, la gastronomie traditionnelle mexicaine était entrée au patrimoine immatériel de l'Humanité de l'Unesco aux côtés du «repas gastronomique des Français» et de la diète méditerranéenne.

Olvera s'exprime en assemblant à l'aide d'une pince à épiler un hors-d'oeuvre à base de sauce de haricots, peau de tomate rôtie, courgettes, fromage, huile de pipicha (proche de la coriandre) et de minuscules insectes grillés appelés «Jumiles».

Ce chef de 35 ans a inspiré toute une génération depuis l'ouverture il y a onze ans de son restaurant minimaliste situé dans le quartier chic de Polanco de Mexico.
Pour changer l'image de la cuisine locale, un festival de cuisine aura même lieu pour la première fois fin mai à Morelia, dans l'État de Michoacan (ouest).
Un autre restaurant situé à Polanco figure sur la liste S.Pellegrino, le Biko, mais il est spécialisé en cuisine basque.

Car pendant longtemps, les restaurants hauts de gamme et les écoles de cuisine au Mexique privilégiaient la cuisine européenne, notamment française.
Aujourd'hui, les cours de cuisine mexicaine ont la cote.

«Les gens réalisent petit à petit qu'ils ont des ingrédients qui ont de la valeur», estime Yuri de Gotari, fondateur d'une petite école de gastronomie mexicaine en 2007 à Mexico, en présentant à ses élèves un «molcajete», un mortier en pierre.

Sur les étalages des marchés, d'épineuses feuilles de cactus, de jaunes fleurs de courgettes, des hibiscus rouges et noirs, des fruits tropicaux comme la savoureuse sapotille côtoient d'autres mets appréciés comme les sauterelles.

Estanislao Carenzo, un chef argentin participant au tour culinaire «Eat Mexico» sur les marchés et dans les gargotes, est impressionné par la variété des ingrédients et des assiettes. Selon lui, il se passe avec le Mexique la même chose qu'avec les pays d'Asie du Sud-est, la cuisine locale est délicieuse «mais ce qu'ils exportent est de mauvaise qualité».