Lorsque nous lui avons rendu visite dans sa chocolaterie de Boucherville, Christophe Morel s'escrimait avec un rouleau de réglisse noire, une des recettes qu'il doit maîtriser lorsqu'il passera le concours du Meilleur ouvrier de France (MOF), fin mai, à Clermont-Ferrand.

Le chocolatier «s'entraîne» officiellement pour ces Jeux olympiques de la chocolaterie-confiserie depuis plus de deux ans, mais on peut dire que toute sa carrière jusqu'à maintenant l'a préparé pour cette grande épreuve d'endurance qui a lieu tous les quatre ans. Il a enfin décidé de se lancer. «Il y a un moment où il faut y aller, tout simplement!» lance le père de deux adolescents, qui peut heureusement compter sur sa femme pour le soutenir et gérer toutes les affaires de l'entreprise.

Cette année, les quatre finalistes au MOF dans sa catégorie (plus de 120 corps de métier sont représentés au concours du Meilleur ouvrier de France, de la pâtisserie à la maçonnerie) doivent préparer 17 produits. Il y a notamment des ganaches, des pralinés, des tablettes fourrées, des tartinades, une spécialité suisse qui, autrefois, s'appelait «tête de nègre», de même que certains éléments de confiserie comme le gélifié, la dragée et le fameux rouleau de réglisse qui, depuis le début, donne du fil à retordre à M. Morel.

Cette semaine, son «coach» français, le chocolatier et MOF Jean-François Castagné, était à Boucherville avec lui pour peaufiner les recettes, travailler sur la présentation visuelle de certains éléments, bref, pour s'assurer que la perfection est au rendez-vous.

Dans le contexte du concours, simplicité et classicisme sont de mise. «C'est là que le chocolatier se démarque parce que tout doit être parfait. Il n'y a rien pour gommer ou pour se rattraper.» Le Québécois d'adoption aurait bien aimé intégrer notre produit national, l'érable, dans une de ses recettes. «Mais le goût de l'érable peut surprendre ceux qui ne le connaissent pas et n'y sont pas habitués. J'évite donc de prendre des risques. Il ne faut pas s'amuser à faire des ganaches au poivre non plus. Ce n'est pas la place pour innover.»

Pour sa sculpture en chocolat, une des épreuves les plus imposantes du concours, Christophe Morel utilisera la technique apprise de son maître il y a déjà 12 ans. «Plutôt que de sculpter dans un bloc de chocolat, je pars d'une pâte de chocolat malaxé à laquelle je peux déjà donner la forme souhaitée. Ensuite, je sculpte.» Étonnamment, le chocolatier-sculpteur reçoit régulièrement des commandes pour ces grosses pièces. Un immense lion en chocolat trône dans la salle à manger du Birk's Café. Guy Laliberté a également fait appel à ses services pour «chocolater» ses légendaires fiestas.

La semaine prochaine, Christophe Morel s'envole pour la Belgique, où il travaillera pendant un mois dans le laboratoire de son ami Marc Ducobu. Puis cap sur la France pour le concours, du 19 au 22 mai. À son retour, pour notre plus grand bonheur, Christophe Morel compte commercialiser certains des produits qu'il a créés pour le MOF.