Des fourmis amazoniennes à l'ananas, une salade de betteraves au lait caillé : la cuisine brésilienne va beaucoup plus loin que les haricots, le riz et le manioc, assure le guide Michelin, qui fait au Brésil sa première incursion en Amérique latine.

Situés à Rio de Janeiro et Sao Paulo, 145 restaurants ont été choisis pour figurer dans ce nouveau guide édité en portugais et en anglais. Parmi eux, 16 ont été distingués d'une étoile (dont six à Rio).

Le seul établissement gratifié de deux étoiles est le célèbre D.O.M. du chef Alex Atala, à Sao Paulo, qui s'est fait connaître par son usage d'ingrédients en provenance d'Amazonie, comme ces fourmis dont chaque bouchée laisse un surprenant arrière-goût d'agrumes.

Un menu qui se mérite, avec des tarifs variant de 242 à 825 réais (80 à 270 dollars au taux actuel).

«Comme dans toute bonne gastronomie, la base est le produit et dans ce pays vous avez des produits fabuleux, des poissons d'eau douce fantastiques, vous avez des légumes fantastiques, il y a aussi une qualité de viande qui est extraordinaire, des épices et assaisonnements qui sont aussi extraordinaires», s'enthousiasme l'américain Michael Ellis, directeur international des guides Michelin.

Mais le résultat n'a pas toujours été à la hauteur.

«J'ai été ici dans les années 80 et la cuisine brésilienne, c'était les haricots, la farine de manioc et la viande très très cuite», raconte-t-il.

«Cela a beaucoup évolué», dit-il, avant d'ajouter : «le meilleur de la cuisine brésilienne est devant nous».

«Il y a toute une génération de jeunes chefs qui sont en train de voyager, de découvrir de nouvelles techniques, de nouveaux ingrédients, de nouveaux assaisonnements», de quoi «créer une vraie signature pour la cuisine brésilienne».

«Un paysage gastronomique»

Pour l'instant, aucun restaurant brésilien ne parvient au précieux sésame des trois étoiles.

Le critère pour parvenir à cette catégorie? «L'émotion», répond Michael Ellis. «Un trois étoiles doit vous marquer, c'est quelque chose qui doit rester avec vous, dans votre tête à vie, de préférence».

«Les saveurs, c'est quelque chose d'organique qui se passe dans la bouche et très difficile à reproduire, et chaque chef, chaque 3 étoiles qui est un artiste fait ça d'une façon personnelle et différente des autres», poursuit-il.

Nés en France il y a plus d'un siècle avec comme idée de départ de stimuler les voyages en voiture, les guides Michelin conseillent désormais restaurants et hôtels dans 24 pays.

S'ils ont choisi le Brésil comme première escale dans cette région du monde, c'est parce que «c'est le pays le plus important d'Amérique latine, avec une population de classe moyenne qui croît très rapidement», explique Claire Dorland-Clauzel, membre du comité exécutif du groupe, en charge notamment des relations extérieures.

C'est aussi un pays que Michelin connaît bien: le groupe y a installé des usines de pneumatiques dès 1927 et compte des milliers d'employés.

«Il y a aussi des critères gastronomiques: il faut qu'il y ait un paysage gastronomique, une qualité de cuisine et une diversité de cuisine qui permet de faire une sélection pour le guide», ajoute-t-elle.

Au moment de décerner ses étoiles, le guide applique les mêmes règles pour tous les pays, comme celle de rester anonyme et de payer son repas: ainsi, une étoile à Sao Paulo a la même valeur qu'à Paris ou Tokyo.

Il a fallu un peu plus d'un an et plus de 500 repas pour élaborer le guide brésilien.

Les responsables de Michelin ne soufflent pas un mot sur les autres pays de la région qu'ils pourraient inclure à l'avenir dans leur collection. Mais les candidats ne manquent pas.

«On a énormément de pays dans le monde qui nous demandent un guide Michelin... des pays, des gouvernements, des maires viennent nous voir et nous demander, des offices de tourisme», raconte Claire Dorland-Clauzel: «c'est aussi le signal que la cuisine est devenue une arme économique et synonyme pour un pays d'attractivité touristique et aussi économique».