Il y a de ces aliments, comme la coriandre, qui provoquent l'amour ou la haine, sans position mitoyenne. Et si ce n'était pas une simple question de goût ? Certains chercheurs affirment que nos gènes sont responsables de notre amour ou de notre aversion pour certains aliments.

Certains aliments provoquent des réactions diamétralement opposées. Faites le test avec la coriandre. Vous allez trouver des gens qui adorent cette plante aromatique, et d'autres qui la détestent profondément. Le pamplemousse, la réglisse noire, la noix de coco ont le même genre d'effet. Est-ce là une simple question de goût? Peut-être pas, affirment plusieurs chercheurs.

Jusqu'à tout récemment, la vue et l'ouïe étaient des sens beaucoup plus explorés par les chercheurs que le goût et l'odorat. Mais depuis le début des années 2000, de plus en plus de scientifiques s'attardent à la perception des aliments. Et leurs découvertes sont parfois surprenantes.

C'est le cas d'une étude menée par le neurophysiologiste Patrick MacLeod, qui affirme que notre prédilection ou notre aversion pour certains aliments pourraient être associées à nos gènes. Par exemple, certains humains seraient dotés d'une génétique qui leur permettrait d'aimer l'amertume alors que ceux qui sont dépourvus du gène TAS2R38 la détesteraient.

Andy Brasseur, ambassadrice de l'Institut du goût en Amérique du Nord, remarque bel et bien des différences lorsque les enfants goûtent pour la première fois du chocolat noir sans sucre.

Les personnes qui n'aiment pas le chocolat noir ont de bonnes chances de détester d'autres aliments amers comme le pamplemousse, les endives, la roquette, les artichauts et les olives. Dans le cas du café, certaines personnes arrivent à en boire pourvu qu'elles y ajoutent une bonne dose de sucre, affirme Mme Brasseur.

Coriandre et génétique 

Plus récemment, des chercheurs ont fait le même genre de découverte concernant la coriandre, qui suscite des réactions polarisées. Ceux qui aiment cette herbe ne se contentent jamais d'une ou deux feuilles. Ils en ajoutent toujours un bouquet à leurs recettes. Au contraire, les détracteurs de la Coriandrum sativum comparent souvent son goût à celui du savon ou... d'un torchon de cuisine sale !

Julia Child, la célèbre cuisinière, détestait la coriandre. Elle n'était pas seule. Sur le site IHateCilantro.com («je déteste la coriandre») et la page Facebook du même nom, des internautes racontent par centaines leurs histoires peu appétissantes concernant cette plante.

De plus en plus, les scientifiques tendent à confirmer que l'aversion pour la coriandre serait aussi une question de génétique. C'est le cas d'une étude amusante menée par le neuroscientifique Charles Wysocki auprès de 100 paires de jumeaux. Dans 80% des cas, les vrais jumeaux (monozygotes) avaient la même réaction devant la coriandre. Les jumeaux dizygotes, eux, étaient du même avis dans seulement 50% des cas.

Mme Brasseur, qui anime des ateliers tant pour les enfants que pour les chefs de cuisine, estime que tout le monde a le droit de ne pas aimer certains aliments. Comme quoi tous les goûts sont dans la nature... et ne se discutent pas.

Génétique et géographie

Plus on est initié jeune aux aliments, moins on est difficile, croit Andy Brasseur, de l'Institut du goût en Amérique du Nord.

«C'était très difficile de faire manger de la coriandre à mon père. Il disait que ça avait un goût de punaise. L'horreur! Il arrivait de la Lorraine, où on ne trouvait pas du tout de coriandre à l'époque. Au contraire, ma mère m'en a fait manger très jeune et j'ai toujours aimé ça», raconte-t-elle.

La théorie d'Andy Brasseur pourrait expliquer que le nombre de personnes qui n'aiment pas la coriandre varie d'une région géographique à l'autre. En Amérique latine, où cette herbe parfume les salsas, les enchiladas, les ceviches, presque tout le monde l'aime!

POURCENTAGE DES GENS QUI N'AIMENT PAS LA CORIANDRE 

Asie de l'Est: 21% 

Europe: 17% 

Amérique du Nord: 17% 

Afrique: 14%

Asie du Sud: 7%

Amérique latine: 4%

Moyen-Orient: 3%

Sources: Flavour Journal et Nature