Une demi-douzaine de nouvelles parutions (en anglais) portant des titres revendicateurs comme Canning for a New Generation et We Sure Can! , des épiceries fines qui débordent de confitures, marinades, chutneys et autres ketchups produits en petites quantités par des jeunes confituriers créatifs... La conserve n'est plus l'apanage des ménagères économes. C'est la chose à faire pour mettre l'été et le «local» en pots.

Le retour en force des conserves est sans doute lié à un grand nombre de tendances culinaires qu'on observe depuis un moment, à commencer par le «locavorisme». En dépit des serres qui se multiplient, le «cannage» est presque l'unique moyen de manger, au plus creux de l'hiver, des fruits et légumes cultivés chez nous. Pensez au délicat parfum des fraises de cet été, qui ont bénéficié d'un ensoleillement quasi record. Rappelez-vous les pêches de l'Ontario, juteuses comme jamais. Et la douceur exceptionnelle des piments et poivrons ne vaut-elle pas d'être mise en pot?

L'aspect économique des conserves n'est pas à négliger. On ne paie jamais moins cher ses produits qu'au moment où «leur» saison bat son plein. Tandis que vous lisez ces lignes, les étals débordent de choux-fleurs, poivrons, betteraves, carottes et, bien entendu, tomates bien mûres. La multiplication des petits marchés de quartier, qui nous amènent le meilleur de la campagne en ville, a peut-être également agi comme catalyseur de nos fantasmes de garde-manger bien garnis.

Bernardin et Mason, ces grands alliés de la conservation, doivent également une fière chandelle au mouvement DIY (do it yourself) qui gagne du terrain partout, s'alliant en outre à un certain penchant pour la nostalgie et la redécouverte de recettes traditionnelles.

Du reste, les planches de charcuteries artisanales et les assiettes de fromage québécois, qu'elles soient servies au restaurant ou à la maison, ont inévitablement donné aux chefs l'envie de mitonner des accompagnements maison qui leur font honneur. Et on ne parle pas que des traditionnels cornichons. Pensez à l'éclat coloré de petites carottes marinées à la fleur d'aneth ou au contrepoint croquant de bouquets de choux-fleurs servis avec des rillettes ou un pâté de campagne.

Camilla Wynne, qui a fait des stages aux Chèvres et chez WD-50 (à New York), puis travaillé chez Laloux et Rhubarbe, a (temporairement) quitté la pâtisserie pour se lancer dans la fabrication de conserves gourmandes. Également musicienne, la jeune trentenaire a vendu les premiers pots de Preservation Society à Puces Pop, grande foire artisanale qui se déroule plusieurs fois par an. Lorsque quelques médias l'ont contactée pour parler de ses produits, Camilla a perçu cet intérêt comme un signe d'encouragement.

Aujourd'hui, à ses populaires marmelades et céleris marinés s'ajoutent un sirop de raisins bleus (pour les sodas maison... ou les crêpes!), des haricots au wasabi, des oeufs dans le vinaigre noir et tout un assortiment de conserves alléchantes.

«J'essaie de faire des mariages originaux qu'on ne trouvera pas ailleurs. Lorsque je réalise une recette plus classique, je m'assure de la perfectionner jusqu'à obtenir une version exceptionnelle, sinon ça ne vaut pas le coup.»

Polyvalente comme l'est sa génération de jeunes gens dans le vent - elle pâtisse, elle joue les persussions, elle écrit... -, la jolie rousselée a une vision complètement décloisonnée de la cuisine. «J'aime autant les desserts maison tout simples, comme les cupcakes et les biscuits, que la haute gastronomie. J'adore travailler sur les émotions et les souvenirs d'enfance lorsque je crée mes recettes.»

Avec des noms évocateurs comme Chandail d'automne (pommes, poires, orange, épices et bière à la citrouille), Rhume Rx (citron, miel, gingembre, bourbon, Cayenne), pêche melba, céleri césar, les petits pots de Preservation Society vont en effet puiser dans notre mémoire gustative.

Les fameux oeufs dans le vinaigre de Camilla sont servis au Dieu du ciel et au Cheval blanc, ses tartes sont inscrites au menu dessert du Notre-Dame-des-quilles et ses conserves trônent dans plusieurs commerces, dont Rhubarbe, le Dépanneur le pick-up et Fait ici (voir preservationsociety.ca pour la liste complète).

Un peu à la manière de Dinette nationale, avec son Cercle des Croqueurs de Choses sucrées, l'entrepreneure en herbe offre désormais des abonnements (2, 6 ou 12 mois). Le premier mercredi du mois, les abonnés passent chercher leurs conserves (une sucrée, une salée) à La Qv, rue Beaubien.

Ceux et celles qui seraient intéressés à bénéficier du savoir-faire de Camilla peuvent assister à ses ateliers, qu'elle donne en moyenne une fois par mois. En octobre, elle célébrera la fin des récoltes en offrant deux cours dans la même semaine. Celui du lundi 11 sera consacré aux légumes, tandis que l'atelier du jeudi 14 portera sur les fruits. Pour l'instant, les cours se donnent majoritairement dans la langue de Shakespeare, bien que la pâtissière-confiturière soit tout à fait apte à répondre aux questions dans la langue de Molière.

Photo: Édouard Plante-Fréchette, La Presse

Camilla Wynne

Piments poblanos

Donne 3 pots de 500 ml

INGRÉDIENTS

1,5 kg de piments poblanos

3 gousses d'ail, écrasées

3 feuilles de laurier

1/2 tasse d'eau

1 3/4 tasse de vinaigre de cidre

1 c. à soupe de miel

1 c. à soupe de gros sel

PRÉPARATION

Faire cuire les piments sur le BBQ ou sous le gril jusqu'à ce que la peau noircisse, mais que le légume tienne encore sa forme. Les enfermer dans un sac en papier brun ou dans un bol couvert de pellicule plastique. Lorsque les piments ont refroidi suffisamment, les peler, les déchirer en deux et les épépiner. Mieux vaut porter des gants. Les piments poblanos sont normalement plutôt doux, mais l'occasionnel piquant pourrait vous brûler les doigts.

Stériliser les pots en suivant les directives du manufacturier.

Dans les pots chauds, déposer les moitiés de piments jusqu'à 2 cm du rebord. Placer une feuille de laurier et une gousse d'ail sur le dessus de chaque pot.

Pour faire la saumure, amener l'eau, le vinaigre de cidre, le sel et le miel à ébullition dans une petite casserole. Verser le liquide chaud sur les piments, toujours jusqu'à 2 cm du bord. Retirer les bulles en tapant légèrement le contenant sur le comptoir, nettoyer les rebords et placer le couvercle.

Faire bouillir les pots pendant 10 minutes.

Les piments se conserveront pendant un an dans un endroit frais et sec. Attendre un moins un mois avant d'ouvrir les pots.





Photo: Édouard Plante-Fréchette, La Presse

Piments poblanos

Chou-fleur au vinaigre de malt

Pour 7 pots de 500 ml

Ingrédients

1,25 kg de bouquets de chou-fleur

350 g d'oignons perlés, pelés*

5 t. de vinaigre de malt

2 t. d'eau

1 t. de cassonade

1 t. de miel de sarrasin

7 c. à soupe de gros sel

Dans chaque pot: 1/4 c. à thé de chlorure de calcium, 1 gousse d'ail, 2 clous de girofle, 3 baies de toute-épice (piment de Jamaïque), 1/2 c. à thé de grains de poivre, 1/2 c. à thé de piment en flocons, 1/2 c. à thé de graines de moutarde.

PRÉPARATION

Stériliser les pots en suivant les directives du fabricant.

Répartir les épices dans les pots chauds, puis y empiler les bouquets de chou-fleur et les petits oignons, jusqu'à 2 cm du rebord.

Dans une casserole moyenne, verser le vinaigre, l'eau, le sucre, le miel et le sel. Amener à ébullition en surveillant bien pour que le liquide ne déborde pas. Verser la saumure chaude sur les légumes, toujours jusqu'à 2 cm du bord. Retirer les bulles en tapant légèrement le contenant sur le comptoir, nettoyer les rebords et placer le couvercle.

Faire bouillir les pots pendant 10 minutes.

Laisser les conserves au repos pendant au moins trois semaines avant de les ouvrir. Elles se garderont toute une année, dans un endroit frais et sec.

*Pour faciliter l'épluchage des oignons, couper les deux bouts, déposer dans un bol et couvrir d'eau bouillante. Laisser reposer pendant 15 minutes. Égoutter et rincer à l'eau froide, puis les faire glisser hors de leur peau.

Conseils

Camilla Wynne partage quelques conseils qui vous permettront de donner un peu de tonus à vos marinades.

- L'ajout de chrolure de calcium dans certaines marinades aidera à conserver le croquant de vos cornichons, choux-fleurs, haricots et autres.

- Il ne faut pas hésiter à varier les vinaigres des marinades: malt, cidre, vinaigre noir chinois, etc. Assurez-vous simplement que le niveau d'acidité soit supérieur à 5%.

- Plusieurs épices et herbes fraîches moins utilisées en conservation peuvent créer des parfums inusités.

- On doit laisser les marinades «mûrir» au garde-manger pendant au moins un mois avant de les manger.Mais trois mois, c'est encore mieux!

Il faut respecter quelques consignes sanitaires pour faire des conserves sûres. Voici quelques blogues qui dispensent des trucs pour éviter le botulisme et autres contaminations, par exemple:

- conserves.blogspot.ca

- savoirfaireconserver.blogspot.ca

- foodinjars.com

- anarchyinajar.com

Photo: Édouard Plante-Fréchette, La Presse

Chou-fleur au vinaigre de malt.