Les professionnels du foie gras montent au créneau pour défendre la liberté de consommer ce mets cher aux Français à la veille de l'entrée en vigueur, le 1er juillet, d'une loi interdisant sa vente en Californie, au nom du bien-être de l'animal.

«La position de la Californie enfreint la loi de l'Organisation mondiale du commerce (OMC)», affirme Marie-Pierre Pé, déléguée générale du Comité interprofessionnel du foie gras (CIFOG) en France, qui mène la fronde.

Les professionnels du secteur, en France mais aussi en Hongrie et en Bulgarie, veulent saisir leurs gouvernements pour obtenir une démarche de la Commission européenne auprès de l'OMC», assure-t-elle.

Une position avant tout de principe, car l'exportation française vers les États-Unis est quasiment nulle «depuis quatre ou cinq ans» selon le CIFOG.

«Nos entreprises à l'international vont plus vers les pays émergents qui sont plus porteurs en consommation», souligne d'ailleurs Philippe Baron, président national des producteurs.

La multiplication des contraintes vétérinaires et sanitaires américaines ainsi que la surtaxation imposée au foie gras, comme au fromage roquefort au début du siècle en représailles contre le refus européen du boeuf aux hormones américain, «ont découragé les entreprises françaises», selon lui.

«Mais même si l'incidence économique est infime la décision de la Californie cause vraiment un préjudice d'image», regrette Mme Pé.

Le gouverneur invité à déguster

La loi qui entre en vigueur en Californie a été votée en 2004 à l'initiative d'associations et de politiciens comparant le gavage à une torture. Elle laissait sept ans aux producteurs pour trouver une alternative au gavage.

«On ne peut pas laisser dire et faire sans se révolter car nous respectons la physiologie de l'animal», rétorque Marie-Pierre Pé. Selon elle, les opposants au gavage «font de l'anthropomorphisme: ils oublient que l'oesophage des oies et canards est élastique à la différence de celui des humains».

Martin Malvy président socialiste de la région Midi-Pyrénées (sud-ouest), principale région productrice en France avec l'Aquitaine (sud-ouest) et l'Alsace (nord-est), qui relaye le mouvement de protestation, estime aussi que «des associations militent contre le gavage, souvent en ignorant totalement la manière dont on procède».

«C'est inquiétant que des responsables politiques prennent des décisions de ce type en méconnaissance de la réalité, des techniques utilisées aujourd'hui», juge Martin Malvy, qui a invité des agences de voyages et le gouverneur californiens à venir découvrir le foie gras dans sa région.

Les producteurs se réjouissent aussi de la mobilisation en Californie de «300 restaurateurs qui se sont constitués en association pour défendre le foie gras».

La Californie, État le plus peuplé des États-Unis, comptait jusqu'ici un seul producteur, l'éleveur de canards Guillermo Gonzalez, contraint de mettre la clé sous la porte.

La loi californienne illustre aussi un fossé culturel et gastronomique qui agace côté français.

«Quand on élève des veaux aux hormones, quand on cultive des OGM sans savoir les conséquences que cela aura, on ne vient pas des donner des leçons sur le gavage», s'indigne Martin Malvy.