Les démarches de l'association Slow Food, fondée il y a 25 ans en Italie pour défendre une alimentation «bonne, propre et juste», prennent de l'ampleur «avec la complicité de la crise» économique,  affirme son fondateur, Carlo Petrini.

«La société civile est d'autant plus sensible à nos thématiques que nous faisons face, actuellement, à trois crises simultanées: financière, environnementale et énergétique», explique à l'AFP M. Petrini, en marge de la deuxième biennale européenne du goût, Euro Gusto, organisée à Tours par le mouvement international jusqu'à dimanche.

«Nous consommons beaucoup plus d'énergie que nous n'en produisons, et cela est particulièrement significatif pour la nourriture: on ne peut pas produire en consommant deux fois plus d'énergie, la terre n'est pas une ressource infinie», dit-il.

«L'avidité humaine a détruit la fertilité du sol, l'eau, la biodiversité. Et dans le même temps, la vie de beaucoup de petits producteurs», explique le jovial Italien, chaleureusement accueilli sur les différents kiosques présentant des «sentinelles», produits rares que Slow Food s'emploie à sauver comme le chou de Lorient ou le safran de Taliouine (Maroc).

Pendant le week-end, le grand public est invité à goûter saveurs exotiques ou de qualité, discuter avec leurs producteurs et assister à différentes démonstrations de chefs et d'artisans, comme aux dégustations de vignerons, au Parc des expositions de Tours.

«Nous devons renforcer les vrais protagonistes de l'agriculture durable, à savoir les petits et les moyens paysans», insiste Carlo Petrini.

Parfois cette démarche en faveur de productions locales ou d'anciennes variétés remises au goût du jour est perçue par les décideurs politiques ou économiques comme «poétique, utopiste, voire ringarde, ce n'est pas vrai!», s'insurge M. Petrini, affirmant que «ce n'est pas une histoire de nostalgie».

Ce critique gastronomique et sociologue de formation est persuadé qu'il n'y a «qu'au niveau local que tu redeviens un acteur, que tu retrouves la fierté d'être un protagoniste, et pas un citoyen passif».

Il évoque même une action «glocale», c'est-à-dire locale mais en réseau avec d'autres initiatives via les nouvelles technologies, imaginant ainsi «les multinationales de demain».

Slow Food travaille avec de nombreuses autres associations: «Tous ceux qui veulent le changement sont nos frères», dit-il évoquant la «fraternité», troisième principe, «mais le plus pauvre», de la Révolution française. «Sans elle, pourtant, il n'y a ni liberté ni égalité», glisse le militant d'un sourire.

Carlo Petrini a fondé Slow Food en 1986 dans la région de Turin, en réaction à l'ouverture en Italie des premiers restaurants-minute. Aujourd'hui, le mouvement compte quelque 100 000 membres dans plus de 160 pays.