En 2005, le directeur des jardins de Métis, Alexander Reford, propose à Pierre-Olivier Ferry de cuisiner un grand repas fin offert à des dignitaires de passage.

En soi, rien d'exceptionnel à cela. Sauf que Ferry a alors tout juste 23 ans. Et qu'il est en stage aux jardins de Métis, dans le cadre de ses études en gestion du tourisme et de l'hôtellerie de l'UQAM! Pourquoi diable M. Reford, arrière-petit-fils d'Elsie Reford, fondatrice des beaux jardins, a-t-il l'idée de confier une telle mission à un tout jeune stagiaire? Et pourquoi, l'année suivante, M. Reford convainc-t-il le jeune chef de revenir à Métis pour prendre en charge tous les services de restauration des jardins? Oh, a-t-on dit que Ferry est effectivement revenu à Métis, mais à deux conditions: «Qu'on rouvre la salle à manger de la Villa Estevan et qu'on produise sur place tout ce qu'on offre dans les deux cafés des jardins, alors que c'était un concessionnaire qui s'en chargeait jusque-là», explique Ferry. Ses deux conditions ont été acceptées!

C'est que le jeune chef, originaire de Lachenaie, dans Lanaudière, a de qui tenir. S'il en sait peu sur son arrière-arrière-grand-père, il sait que son arrière-grand-père, Raymond Ferry, a étudié et travaillé avec nul autre qu'Auguste Escoffier, à Paris. Oui, l'Auguste Escoffier qui, au XIXe siècle, a révolutionné la grande cuisine française, inventé aussi bien la pêche Melba que le concept de «brigade de cuisine», écrit de nombreux ouvrages et mis au point les crêpes Suzette. De retour à Montréal, Raymond Ferry a travaillé notamment dans les grands restaurants des hôtels chic appartenant au Canadien Pacifique. Le grand-père de Pierre-Olivier, lui aussi baptisé Raymond, a pour sa part travaillé pour les plus grandes tables du Québec, dont celle du très sélect Mount-Royal Club.

Pierre-Olivier Ferry, lui, a étudié d'abord à l'ITHQ en technique de gestion alimentaire et restauration avant d'entrer à l'UQAM dans le programme en gestion du tourisme et de l'hôtellerie. Quand les Jardins l'engagent en 2006, il ne fait ni une ni deux: il s'installe dans la région, prêt à tout faire pour rendre inoubliable l'expérience culinaire de la salle à manger et des deux cafés de Métis. Âgé aujourd'hui de 28 ans, il dirige une équipe de 21 employés, dont une aide-jardinière, pour cueillir tout ce qu'il y a à cueillir! En plus des plantes comestibles qui poussent sur place, il utilise une foule de très bons produits régionaux pour dresser ses menus pour les dîners, le brunch offert le dimanche ou les apéros en fin de journée les mercredis, jeudis et vendredis. Il peut passer 10 minutes à vous décrire la subtilité d'une huile de canola première pression produite à Rimouski à partir de grains québécois par l'entreprise Les Jolies Demoiselles.

C'est que la qualité importe aux Ferry depuis maintenant cinq générations: «J'ai un vieux livre d'Escoffier annoté de la main de mon arrière-grand-père, explique le jeune chef. Quand il me l'a remis, mon grand-père y avait ajouté une note à mon intention: toujours être ponctuel, faire attention aux produits, avoir la passion du métier.» Ses ancêtres peuvent dormir en paix, Pierre-Olivier Ferry suit ces recommandations à la lettre.