Comme un prélude au printemps, les salades d'hiver nous changent des plats longuement mijotés et un peu plus lourds. C'est l'occasion de mettre en valeur des ingrédients parfois délaissés, quitte à travailler un peu plus fort pour y arriver.

Craquants légumes

«Je suis en train de faire une salade César, est-ce que vous pouvez me rappeler dans cinq minutes?» Il suffisait d'appeler le chef du restaurant montréalais Gus, David Ferguson, pour le constater: même en plein coeur des grands froids de l'hiver, la fraîcheur des salades a ses adeptes.

S'il fait sa classique et populaire salade César toute l'année, le chef du restaurant de la rue Beaubien a également adapté son menu hivernal en proposant une salade de champignons.

Tièdes ou chaudes, les salades d'hiver concoctées par les chefs mettent irrémédiablement des ingrédients d'ici en vedette. En attendant que les potagers foisonnent de légumes frais, plusieurs se tournent vers ce qui a été engrangé avant l'hiver, les légumes racines bien en haut de la liste.

Au restaurant Provisions 1268, le chef Hakim Rahal travaille toujours avec des produits le plus local possible. À l'ardoise, lors de notre passage, figuraient notamment le panais, le céleri-rave, le topinambour, le salsifis. Quand nous lui avons demandé de nous concocter une salade d'hiver, il a spontanément pensé aux betteraves.

«La carotte marche aussi super bien pour les salades. On peut la rôtir, la servir tiède ou froide.»

«Le panais, les pommes de terres aussi. Ce n'est pas vu comme des produits nobles, mais on aime ça les utiliser et les élever un peu. En plus, si on commence avec un bon produit, ça va être encore meilleur», poursuit Hakim Rahal, avant de se lancer dans l'éloge de son fournisseur de pommes de terre, qui en propose de nombreuses variétés.

S'il affectionne lui aussi la betterave et la carotte en salade d'hiver, le chef du restaurant Oregon, nouvellement installé à Laval, n'hésite pas à travailler la verdure.

«J'aime beaucoup la laitue romaine grillée, ça casse le trop craquant de la romaine et le petit côté grillé est réconfortant l'hiver», affirme Jean-François Perron.

Il continue de travailler les salades froides, même dans les mois d'hiver. Coupée en quartiers, badigeonnée d'huile de tournesol et arrosée de jus de citron, puis grillée, la laitue romaine se voit ainsi transformée.

Au restaurant Gus, la salade César reste toujours au menu parce que le chef Ferguson estime que son secret réside surtout dans la vinaigrette. La plupart de ses salades vertes sont en revanche servies seulement pendant la belle saison. «On peut avoir de la verdure à longueur d'année et on trouve d'assez bonnes laitues l'hiver, mais on n'y retrouve pas autant de profondeur que pendant l'été», estime-t-il.

Aux fermes Lufa, on tente de faire revivre toutes les subtilités de l'été dans une nouvelle serre installée à Anjou. «On a 43 nouvelles variétés de verdure, dit Simon Garneau, responsable des communications de l'entreprise. On a du chou kale et deux sortes de cresson qui ne sont pas offerts en temps normal l'hiver.»

Au milieu des patates douces et des betteraves, la verdure risque de se retrouver plus souvent dans les paniers des abonnés.

«La laitue romaine est populaire l'hiver, le kale aussi. Les gens l'attendaient depuis longtemps.»

En attendant de s'approvisionner à l'année de verdures bien fraîches, le chef du restaurant Provisions 1268 voit un beau défi à faire des salades l'hiver. «L'été, c'est plus facile, tu vas au marché et il y a tellement de stock que tu ne sais plus quoi choisir. L'hiver, c'est plus difficile, mais il y a des façons de travailler les ingrédients. Il faut penser un peu plus à notre affaire...»

Photo Hugo-Sébastien Aubert, La Presse

Aux fermes Lufa, on tente de faire revivre toutes les subtilités de l'été notamment dans une nouvelle serre installée à Anjou.