C'est l'histoire de Mathieu. Un petit garçon de 7 ans impatient, curieux, attachant, comme il en existe tant. Mais un petit garçon, aussi, comme il n'en existe nul autre. Un petit garçon comme on en rencontre peu, en fait.

Pourquoi? Parce qu'il ne voit pas. Il n'a pas d'yeux sur le visage, mais attention, il en a de très forts au bout du nez, des oreilles, des mains et des orteils. Du coup, cela fait de lui un sacré détective!

Vous l'aurez compris, le petit bonhomme, né de l'imaginaire de l'auteur Gilles Tibo, et mis en images par le réalisateur Nicola Lemay, est aveugle. Et pendant toute la semaine de relâche, les enfants de moins de 12 ans sont invités gratuitement à venir découvrir son univers dans Les yeux noirs, court métrage d'animation en 3D réalisé par l'ONF.

Et il s'agit ici d'une première. Car contrairement aux films 3D habituels (la tendance de l'heure), le court métrage a été construit ici à partir de dessins. De dessins faits main. «Comme au temps des vieux Bugs Bunny», explique le réalisateur Nicola Lemay (Noël Noël), qui ne cache pas sa passion pour les bédés. «Et c'est là qu'est la nouveauté. À notre connaissance, c'est la première fois qu'on fait un film 3D avec du dessin animéde cette façon», dit-il. Le résultat n'a d'ailleurs rien à voir avec les images de synthèse auxquelles on est désormais habitués. Oubliez les images parfaites réalisées à l'ordinateur. Pensez plutôt «artisanal», ligne blanche sur fond noir: «Deux caméras dans notre logiciel nous permettent de mettre le dessin dans l'espace. À comparer à tous les films 3D, c'est sûr que nous, oui, ce qu'on fait, c'est beaucoup plus artisanal.»

Et les enfants, nourris au 3D, accrocheront-ils? «Nous, ce qu'on veut, c'est que les gens voient le film, et qu'ils oublient la technologie derrière. Le film est une immersion dans le monde de Mathieu», répond le producteur Marc Bertrand.

Et quel monde! Le petit Mathieu décide en effet un matin de percer le mystère de son cadeau de fête: il interroge ses parents, fouille les armoires, cherche à déceler les moindres indices possibles. Et il a du flair, le gamin. Les odeurs, les bruits, les textures, rien ne lui échappe. En voiture, il réfléchit tout haut: «Nous quittons la ville, le vent sent les fleurs, nous roulons sur du gravier, ça sent le foin, ouache, ça sent les vaches!»

«J'ai trouvé ce film extrêmement intéressant, parce qu'il permet de faire connaître la déficience visuelle», dit Patricia-Annick Van De Kerckhove, directrice de l'école Jacques-Ouellette de Longueuil, rare école spécialisée en déficience visuelle au Québec.

«Moi, j'ai trouvé l'idée merveilleuse, enchaîne l'auteur Gilles Tibo, qui a aussi participé à l'écriture du scénario. Faire un film très, très, très visuel sur l'histoire d'un enfant qui, lui, ne voit rien! C'est tout un défi! Sur le plan créatif, c'est très intéressant.»

Les yeux noirs sera présenté en boucle, entre 10h et 16h, du 28 février au 6 mars, à la CinéRobothèque de l'ONF. En prime, des activités seront offertes aux enfants, pour les aider, eux aussi, à «voir sans leurs yeux». Au menu: un parcours à obstacles avec une canne blanche, des activités sensorielles, une machine à écrire en braille, ainsi qu'un film en vidéodescription pour non-voyants.

Prévoir 50 minutes pour l'activité.

Réservations non requises.

Gratuit pour les enfants de moins de 12 ans.