Mathieu vient tout juste de voir son premier enfant venir au monde. Il est dans un état second... C'est sûr que les longues heures à soutenir sa conjointe durant l'accouchement et le manque de sommeil contribuent à son état, mais c'est surtout le bonheur d'être un nouveau papa qui le rend si euphorique!

Il est heureux de vivre à une époque où s'impliquer dans les soins et l'éducation d'un enfant est de plus en plus valorisé chez les pères. Il a tout organisé avec son employeur et le Régime québécois d'assurance parentale: il prend les cinq semaines de congé de paternité auxquelles il a droit. Bien sûr, c'est sa conjointe qui a porté l'enfant, qui l'allaite et qui prend un congé d'un an. Cela lui donne une petite longueur d'avance dans son lien d'attachement avec l'enfant. Mais maintenant que ce dernier est né et que Mathieu peut le prendre dans ses bras, il ne veut pas perdre une minute du temps dont il dispose pour faire connaissance avec ce petit être, pour le voir grandir et évoluer. Après tout, un enfant, ça se fait à deux, et un père est aussi important qu'une mère!

Devenir parent est une expérience qui transforme la vie. Tout d'un coup, un petit être dépend totalement de nous. Tous les nouveaux parents, sans exception, ont besoin de temps pour s'adapter à ce nouveau rôle : il y a des soins à donner, des nuits écourtées ou interrompues, une vie de couple transformée. Autant une naissance est magique et peut nous combler de bonheur, autant les jours qui la suivent nous confrontent à de nouvelles responsabilités et à des journées (et des nuits) bien remplies!

À une époque pas si lointaine, les mères restaient à la maison pour s'occuper des enfants, et les pères assumaient surtout le rôle de pourvoyeur. Mais maintenant qu'on s'attend à ce qu'un père participe à l'éducation et aux soins à donner à un enfant, qu'on lui demande d'assister à l'accouchement, de soutenir sa conjointe dans l'allaitement et de développer sa relation d'attachement à son enfant, un congé paternel n'est pas un luxe, mais une nécessité. Pour ceux qui se disent que les attentes envers les pères modernes sont bien élevées, sachez que plusieurs pères arrivent à les atteindre et que de plus en plus d'études démontrent les nombreux effets positifs de cette implication paternelle sur le développement social, affectif et cognitif de l'enfant. L'implication du père est également positive pour la mère, le fonctionnement du couple et pour toute la famille.

Le rôle de père a bel et bien évolué et voir un papa se promener avec un porte-bébé, changer une couche ou donner un biberon n'est pas rare. C'est même valorisé! Mais les mentalités et les comportements sont parfois difficiles à changer dans certains milieux.

Par exemple, certains pères sont mal à l'aise de profiter de leur congé parental. Les employeurs n'ont pas le choix de les laisser prendre ce congé lorsqu'ils le demandent, c'est la loi. Mais, certains patrons peuvent parfois faire des commentaires sarcastiques afin de démontrer subtilement leur mécontentement par rapport au congé de paternité et influencer ainsi la décision du futur père.

Aussi, dans les médias, et dans les différents centres de santé et de services sociaux, les informations sur la parentalité s'adressent surtout aux mères. En fait, les mères sont bombardées de renseignements dès qu'elles sont enceintes : alimentation, développement du foetus, exercices prénatals, allaitement, alimentation solide du bébé, perte de poids après l'accouchement, sommeil de l'enfant, apprentissage de la propreté, stimulation cognitive et sensorielle de l'enfant, éducation et discipline, etc.

On demande aux pères d'être plus présents, mais les informe-t-on vraiment de leur rôle, de leur vie d'individu, de travailleur et de conjoint qui sera transformée à la suite de la naissance de leur premier enfant? À quel moment les professionnels (médecins, infirmières...) s'informent-ils de comment un père se sent par rapport à la grossesse de sa conjointe, par rapport à l'accouchement, aux premières semaines suivant la naissance?

Il y a sûrement des exceptions. Des infirmières attentives au stress que peut subir un père durant la grossesse de sa conjointe, au sentiment d'impuissance qu'il peut ressentir lors de l'accouchement, de l'allaitement. Mais il reste qu'implicitement, dans bien des contextes, parentalité est encore souvent synonyme de maternité, et les pères peuvent se sentir encore un peu exclus de tout le processus entourant la naissance d'un enfant.

Évolution constante

Le rôle de père a beaucoup évolué depuis les dernières décennies, et pour le mieux, mais les pères d'aujourd'hui peuvent à la fois sentir qu'ils doivent s'impliquer, tout en ayant à faire face à un système qui tourne encore beaucoup autour de la mère. Il y a un manque d'accessibilité à des informations et à des ressources qui concernent la paternité, spécifiquement.

Espérons donc que les choses continueront d'évoluer. Un papa qui est informé et qui se sent appuyé est un papa qui est encouragé à s'impliquer auprès de ses enfants et de sa vie familiale, et toute la famille en profite.