C'est la rentrée scolaire et Charlotte, neuf ans, vient d'amorcer sa quatrième année. Sa première semaine d'école à peine terminée, elle annonce à ses parents qu'elle n'aime pas sa professeure et qu'elle ne sait pas comment elle pourra la tolérer jusqu'en juin. Cette déclaration surprend ses parents, qui ne savent pas comment réagir à cette soudaine antipathie de leur fille envers un prof.

Le soir, lorsque Charlotte est couchée, ils discutent ensemble de la meilleure attitude qu'ils devraient adopter. Ils réalisent que leur première envie à tous les deux a d'abord été de faire la morale à Charlotte, en lui disant qu'elle doit respecter sa professeure et qu'elle finira bien par apprendre à mieux la connaître et à l'apprécier. Puis, en approfondissant leur réflexion, tous les deux se sont souvenus de leurs «pires» profs du primaire et du secondaire. Ils réalisent ainsi qu'il est fort possible que dans le parcours scolaire de chaque individu, du préscolaire jusqu'à l'université, il y ait quelques mauvais pédagogues, des profs blasés qui ont hâte de prendre leur retraite, ou encore des profs avec qui l'on a simplement un conflit de personnalités. Ils sont donc soulagés d'avoir inhibé leur premier instinct de faire la morale à leur fille, mais se demandent toujours comment réagir à son attitude.

Un élève qui se rend jusqu'à la fin du secondaire aura eu à s'adapter à des dizaines de professeurs différents. Sur le lot, il est normal que l'élève n'ait pas aimé quelques-uns d'entre eux. Heureusement, il est tout aussi probable que dans son parcours scolaire, un élève ait eu des profs qui l'ont marqué positivement : prof inspiré et inspirant, prof de «vie», prof intéressant et sympathique, prof excellent pédagogue, prof humain...

En fait, l'école est une microsociété où l'on n'apprend pas seulement différentes matières, mais où l'on apprend également la vie : comment se faire des amis, comment organiser son temps, comment réagir aux succès et aux échecs, comment faire sa place dans un groupe...

En ce sens, si votre enfant a un nouveau prof qu'il n'aime pas, il faut voir cette situation comme un apprentissage de la vie. En effet, apprendre à étudier, à travailler ou à collaborer avec quelqu'un que nous n'aimons pas, et s'adapter à cette situation, c'est un apprentissage qui peut servir toute la vie. Pensez-y... même à l'extérieur de l'école, vous avez sûrement dû travailler avec un patron dont vous n'aimiez pas les manières, jouer au hockey avec un entraîneur dont vous n'aimiez pas la personnalité, côtoyer un membre de la belle-famille qui ne véhiculait pas les mêmes valeurs que vous...

Il faut éviter d'obliger l'enfant à aimer son nouveau prof ou, au contraire, de courir droit chez le directeur pour le supplier de changer l'enfant de classe. Dans le premier cas, on lui envoie le message qu'il n'est pas normal de ne pas aimer les méthodes ou les manières de quelqu'un d'autre, alors qu'il s'agit d'une émotion que tout le monde vit de temps en temps. Dans le deuxième cas, on surprotège l'enfant en tentant à tout prix de lui faire éviter cette situation désagréable. Cette surprotection l'empêche de développer des mécanismes d'adaptation. Il pourrait en venir à constamment éviter ou fuir les situations où il doit collaborer avec quelqu'un qui ne lui plaît pas. Cela peut signifier d'éventuels abandons de cours au cégep, de fréquents changements d'emplois, des ruptures à cause de la belle-famille...

En tant que parent, lorsque notre enfant est confronté à ce genre de situation, notre rôle est de l'aider à s'adapter et le guider dans la recherche de solutions. Donc, la meilleure attitude à adopter est d'abord d'écouter son enfant et de valider ses émotions.

On peut lui dire qu'il est normal de ne pas aimer quelques-uns de nos profs. On peut même lui parler de nos propres réactions lorsque cela nous est arrivé dans notre passé d'élève. Ensuite, il est important de l'aider à comprendre sa responsabilité dans la situation : qu'il n'aime ou qu'il n'aime pas son prof, notre enfant est responsable de son comportement en classe et de fournir les efforts nécessaires à son apprentissage et à sa réussite scolaire. Par contre, il n'est pas responsable de l'incompétence, de l'humeur ou de la personnalité de son enseignant. Pour ces détails qu'il ne contrôle pas, il doit lâcher prise et simplement se soulager en confiant ses points de vue et ses émotions à ses parents et ses amis.

Seulement dans les cas assez rares où le fonctionnement de l'élève est affecté (anxiété, refus scolaire, échec) sera-t-il nécessaire de demander une rencontre avec le professeur ou la direction pour exposer le problème et leur demander de collaborer à une recherche de solutions. Cette intervention ne doit être utilisée qu'en dernier recours, car il est préférable de tenter d'abord de responsabiliser son enfant et de lui apprendre à s'adapter à ce genre de situation qu'il rencontrera à l'occasion, tout au long de sa vie.

Bonne rentrée scolaire à tous!