Chaque parent le sait : combiner famille et travail est un exercice périlleux. Cet été, Pause aborde la question de la maternité avec des jeunes mamans entrepreneures et créatrices. Certaines ont décroché pendant leur congé. D'autres ont combiné bébé et boulot. Toutes ont décidé d'écourter leur congé. Mélissa Nepton, Eve Gravel, Catherine Métivier, Vicky Boudreau, Julia Vallelunga et Majorie Labrèque-Lepage: voici les récits et portraits de jeunes mamans inspirantes.

«AVEZ-VOUS PRIS UN CONGÉ DE MATERNITÉ?»

L'envie de parler avec de jeunes mamans entrepreneures est née lors d'une présentation de collection de Mélissa Nepton.

La designer, qui a créé son entreprise il y a six ans, recevait début juin journalistes et stylistes pour montrer, de façon informelle, ses prochains « looks ». Ce qui a retenu notre attention toutefois, c'était son fils, passé, sans s'effaroucher, de bras en bras : Christophe, alors âgé de 6 mois.

Nous avons tout de suite eu envie de savoir comment Mélissa Nepton combinait travail et maternité. Ainsi est née l'idée d'une série de portraits. En guise d'introduction, nous avons invité ces mamans à discuter ensemble autour d'un café. Extraits d'une discussion à bâtons rompus sur un sujet inépuisable : le travail et les enfants.

«AVEZ-VOUS PRIS UN CONGÉ DE MATERNITÉ, VOUS?»

Mélissa Nepton pose la question. Autour de la table, au café Brooklyn, un après-midi de juillet, trois designers : Eve Gravel, maman de Gaspard, 1 an ; Catherine Métivier, maman de Jeanne, 2 mois, et Mélissa Nepton, ainsi que Vicky Boudreau, cofondatrice de l'agence de communications Bicom, maman de Téa, 1 an.

« Moi, j'ai pris un congé "plein d'étapes" : après un an, je suis à quatre jours par semaine, et je ne veux pas faire cinq jours par semaine », répond Eve Gravel, qui a lancé sa marque de vêtements il y a déjà 13 ans.

À la tête d'une entreprise de communications qui compte 25 employés et qui continue son expansion, Vicky Boudreau répond : « Des fois, j'essaie de faire quatre jours par semaine, mais je trouve ça difficile. J'essaie de finir plus tôt, mais ce n'est pas toujours possible. »

Sa petite Jeanne endormie dans ses bras, Catherine Métivier, qui a fondé Atelier b. avec Anne-Marie Laflamme il y a cinq ans, s'est quant à elle offert... un mois de congé de maternité complet à la naissance de sa fille. Aujourd'hui, elle est de retour au travail, mais à son rythme, et à temps très, très partiel.

CONJUGUER ENTREPRISE ET BÉBÉ

Autour de la table, les expériences diffèrent. En cette saison de « shooting photo » pour les designers, Mélissa Nepton se sent un peu débordée. Son fils a un suivi médical fréquent, et il souffre d'une otite au moment de l'entrevue. « Je trouve ça tough, un bébé pas en santé... Je me sens coupable de ne pas être avec mon bébé qui a besoin de moi. » Autour de la table, Catherine a toujours une Jeanne très calme dans ses bras. Chez Atelier b., dit-elle, les choses sont sous contrôle, même en cette période de pointe. 

ADIEU, CONQUÊTE DU MONDE?

Entrepreneures, nos interlocutrices ont des personnalités bien différentes, mais un point commun : elles sont des battantes. Pourtant, Mélissa Nepton croit que son entreprise, qui fait actuellement une petite percée aux États-Unis et produira un manteau pour la chaîne américaine Anthropologie, ne connaîtra peut-être pas le développement qu'elle avait imaginé.

Eve Gravel partage cet avis, et sans regret. « Ma vie de job, elle est passée au second plan. J'ai lancé mon entreprise à 22 ans et j'en ai 35. À un moment, j'ai eu l'impression que je n'avais fait que bosser. Je suis lion ascendant balance, et je crois que je deviens plus balance, plus chill, moins égoïste. J'ai arrêté de centrer ma vie sur moi. La vie, c'est pas juste la job. »

À table, les avis divergent. Vicky Boudreau se sent toujours aussi passionnée par son travail, mais elle croit que sa maternité lui a apporté un recul. « Je suis rendue tellement cool. Je suis plus patiente. Les situations prennent une autre perspective maintenant. » Elle souligne aussi, comme les autres mamans autour de la table, l'engagement fort des pères auprès de leurs enfants : eux aussi ralentissent la cadence.

TRAVAILLER AVEC SON BÉBÉ

Avec des congés de maternité raccourcis ou à temps partiel, les filles ont-elles amené leur bébé dans leurs activités liées à leur entreprise? Vicky Boudreau répond sans hésiter. «Zéro. Je ne suis pas capable de travailler si ma fille est là.»

Olivia, la fille aînée de Mélissa Nepton, a accompagné sa mère dans ses déplacements professionnels pendant les sept premiers mois de sa vie. «Avec Olivia, on allait partout. C'était facile», se souvient-elle.

Elle a aussi amené sa fille à Toronto pour son défilé. «Ma fille était tellement fière!»

Eve Gravel, une habituée des défilés de mode, explique de son côté que son fils, lui, est très «gars». La moto et la batterie des hommes de sa famille l'intéressent plus que les vêtements créés par sa maman.

LES CONGÉS DES PARENTS AU QUÉBEC

Au Québec, les mères ont droit à un maximum de 50 semaines de congé, et les couples, 55 semaines (ou, dans le cas du régime particulier, à 40 semaines pour les mères et 43 semaines pour le couple).

Une majorité de parents québécois utilise la totalité de ce congé, mais pas tous. On constate toutefois que les mères travailleuses autonomes prennent, en moyenne, un congé de maternité plus court.

Voici les durées moyennes au Québec, en 2012 et 2013, des congés parentaux pour les salariés et travailleurs autonomes.

RÉGIME DE BASE (50 SEMAINES POUR LES FEMMES, 43 POUR LE COUPLE) : 

 - mère salariée (ou travailleuse mixte) :  

47,9 semaines

 - père 

6,35 semaines

 - mère travailleuse autonome : 

39,89 semaines

 - père : 

12,8 semaines

RÉGIME PARTICULIER : 

 - mère salariée (ou travailleuse mixte) : 

35,11 semaines

 - père : 

6,49 semaines

 - mère travailleuse autonome : 

28,29 semaines

 - père : 

11,69 semaines

(chiffres compilés par le Conseil de gestion de l'assurance parentale)