Combien coûte un enfant? Cette question en apparence anodine pose un casse-tête pour les économistes. Elle suscite même un débat qui a une influence directe sur le calcul des pensions alimentaires.

«Plus les parents ont un revenu élevé, plus ils vont dépenser pour leur enfant», explique Ross Finnie, un économiste de l'Université d'Ottawa qui s'est penché sur la question quand il enseignait à l'Université Laval. «Ce qu'on ne sait pas, c'est le lien entre les deux variables: est-ce que le coût d'un enfant double quand le revenu parental double?»

Une différence philosophique sépare ainsi les barèmes de pensions alimentaires québécois et canadien, observe M. Finnie. «Au Québec, on considère que les parents qui ont un revenu plus élevé ne vont pas nécessairement augmenter proportionnellement leurs dépenses pour leurs enfants. Au Canada, oui.» Les barèmes québécois prévoient que le coût d'un enfant passe de 7400$ à 10 400$ par année quand les revenus passent de 50 000$ à 100 000$, alors qu'au Canada, l'augmentation est plus proportionnelle, de 5400$ à 10 600$.

Les garderies à 7$ peuvent-elles expliquer la différence? «C'est envisageable», concède M. Finnie, qui a travaillé avec le ministère canadien de la Justice pour les barèmes et a déjà collaboré avec l'inventeur des barèmes américains quand il faisait ses études doctorales à l'Université du Wisconsin.

Qu'en est-il des deuxième et troisième enfants? «En général, on considère que chaque enfant supplémentaire augmente les coûts jusqu'à la racine carrée de son rang, dit M. Finnie. C'est ce que l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) préconise.» Par exemple, si un enfant coûte 10 000$ par année, en avoir un deuxième augmentera les coûts à 14 142$ et un troisième à 17 321$. Le modèle québécois suit grosso modo cette courbe.

Comment les barèmes sont-ils créés? «On fait des approximations, dit M. Finnie. Par exemple, on calcule la différence entre le loyer d'un appartement avec une et deux chambres à coucher. Ou alors, on utilise les enquêtes de Statistique Canada et on prend la différence des coûts de transport entre une famille qui n'a pas d'enfant, qui en a un ou plusieurs.»

Au Canada, seul le ministère de l'Agriculture du Manitoba fait de telles évaluations indépendamment des barèmes de pension alimentaire (aux États-Unis, c'est aussi le département de l'Agriculture (USDA) qui s'en occupe). Statistique Canada et le Conseil du bien-être social ont déjà fait de telles études, mais pas depuis le début du millénaire.