Chef-propriétaire du resto Portus Calle

Pour la chef Helena Loureiro, la famille passe avant tout. Ses enfants ont aujourd'hui 21 et 20 ans. Ils étudient et travaillent avec elle au restaurant. «Je veux qu'ils comprennent pourquoi j'ai été si souvent absente. Je veux qu'ils voient avec qui je passe mes journées, ce que je fais.»

D'origine portugaise, Helena Loureiro est arrivée au Québec en 1988. Elle a suivi une formation à l'ITHQ et a travaillé comme cuisinière dans une garderie. «Comme la cuisine de CPE ne présentait pas assez de défis, je travaillais aussi le soir dans les restaurants portugais. Avec de jeunes enfants, ça a été très difficile. J'ouvrais la garderie à 7h et je finissais tard le soir. Entre ça, je me dépêchais pour préparer leur souper, je discutais avec eux et je repartais travailler. C'était normal pour eux, ils restaient avec papa.»

Longtemps, elle s'est sentie coupable de ne pas avoir assez de temps avec ses enfants. «Je n'ai pas eu plus d'enfants parce que je manquais de temps. Quand ton enfant est à la garderie de 7h à 17h, ça devient l'enfant de l'éducatrice.»

Selon elle, l'agitation est la principale difficulté des familles d'aujourd'hui. «Tout le monde est pressé. Les parents se sentent coupables et ne devraient pas: on travaille pour nos enfants, leur futur. Je pense que, si les parents ont peu de temps avec les enfants, c'est du temps de qualité. Malheureusement, certains compensent en achetant les enfants avec du matériel. C'est catastrophique.» Elle parle du Portugal. «Là-bas, les enfants partent tard de la maison. Les parents sont davantage là pour les enfants, les enfants pour les parents. Je ne dis pas que c'est la bonne façon, c'est différent.»

Chez elle, le dimanche en famille est sacré. «Mon restaurant est fermé, alors je fais le brunch le matin, tout le monde mange à la maison, même des employés. On cuisine ensemble. C'est un moment privilégié.» Petits, ses enfants ont passé tous leurs étés au Portugal. «C'était important pour moi de transmettre les valeurs, coutumes et traditions de mon pays. Mon fils, quand il avait 4 ans, a dit: nous sommes «Québécois d'aubergine portugaise». Ça résume comme je me sens.»

Avoir une famille était-il plus facile avant? «J'ai eu une enfance plus difficile que mes enfants. J'ai encore moins vu mes parents que mes enfants nous ont vu aller. Mes parents avaient une ferme, ils travaillaient aussi à l'extérieur dans les champs. Je pense qu'on apprend plus à se débrouiller quand on a moins de gens autour pour nous dire quoi faire. On apprend la vraie vie.»

Son souhait pour la famille québécoise? «Que les familles cuisinent ensemble, qu'ils laissent les enfants mettre la main à la pâte, regarder les carottes et les patates cuire. C'est comme ça qu'ils apprécient la valeur des choses.»