Les tests de dépistage prénatals font partie de la routine de la grossesse pour quantité de femmes et de couples. Parfois, c'est pour se rassurer. Parfois, les risques de transmettre une maladie génétique grave sont bien réels.

Que sont les tests prénatals?

Il s'agit d'examens visant à déterminer si l'enfant à naître est atteint d'une maladie chromosomique ou génétique. Les plus communs cherchent à déterminer la probabilité qu'il soit atteint de trisomie 21, 18 ou 13 à l'aide d'une échographie, de tests sanguins ou d'une combinaison des deux. L'obstétricien et gynécologue François Audibert signale que le test le plus poussé en la matière isole l'ADN du foetus dans le sang de la mère et permet d'évaluer le risque de trisomie. Il n'est offert que par les cliniques privées, sauf exception.

Sont-ils obligatoires?

« Rien n'est obligatoire », précise le Dr Audibert. « Tout le monde autour de moi a fait ces tests, indique Virginie Gagnon. Je pense qu'on ne les remet pas en question parce que les médecins nous font d'emblée passer la clarté nucale et la prise de sang pour la trisomie. Je n'ai pas l'impression que c'est optionnel. » Hazar Haidar, une doctorante en bioéthique qui s'est intéressée aux tests prénatals, a constaté que, « parfois, les professionnels ne prennent pas le temps d'expliquer le test et les femmes ne posent des questions que lorsque le résultat de la prise de sang est positif ».

Test génétique, questions d'éthique

Passer un test prénatal permet, le plus souvent, de rassurer les parents quant à la santé de l'enfant à venir. Il peut toutefois aussi susciter de l'anxiété.

Il croit que les futurs parents devraient réfléchir aux choix qui se présenteront à eux si un test est positif avant de le passer. « Peut-être que ça donne l'illusion qu'on peut tout prédire et tout éviter, ce qui ne sera jamais vrai », ajoute-t-il. Le médecin craint une « dérive eugénique » qui ferait que, vu l'existence de ces tests, on en vienne à considérer comme anormal qu'un enfant puisse naître avec une maladie génétique.

« Il y a des choses qu'on acceptait avant comme la fatalité et, aujourd'hui, on pense qu'on doit prévoir la santé d'un enfant à naître comme la météo, poursuit le Dr Audibert. C'est un problème de société. Ce n'est pas la médecine, l'obstétrique ou la génétique qui l'ont créé : les outils sont là et la demande est là. »

En s'entretenant avec de futurs parents, Hazar Haidar a constaté que le principal frein aux tests prénatals n'était pas un questionnement éthique, mais plutôt un raisonnement économique. «La plupart ont mentionné le coût comme barrière pour faire le test», dit-elle, parlant du test de l'ADN foetal, qui coûtait environ 800$ au moment de son enquête. En clinique privée, selon le test ou la combinaison de tests sélectionnés, les prix vont d'environ 300$ à 600$ en moyenne de nos jours. Le dépistage de la trisomie 21 est toutefois couvert par le régime public, selon les conditions du Programme québécois de dépistage prénatal de la trisomie 21. La doctorante en bioéthique affirme que la réflexion éthique ne surgissait qu'au moment où elle-même soulevait la réflexion avec ses interviewés.

* Prénoms fictifs. Certaines femmes ont requis l'anonymat par crainte d'être jugées ou parce que la grossesse n'avait pas été dévoilée à l'entourage.

Elles ont fait des tests

« Mon copain a la neurofibromatose, une maladie génétique dont on ne peut pas connaître à l'avance les répercussions. Ça peut ne pas être grave - des taches café au lait, quelques nodules - ou très grave : nodules partout, problèmes osseux très douloureux, troubles d'apprentissage... Dans la vie, tellement de choses peuvent arriver, alors si je peux éviter à mon enfant des douleurs chroniques, des opérations et le fait d'être défiguré et stigmatisé [je vais le faire] », dit Sophie Roussin, qui a eu six grossesses, dont quatre avortements à la suite de tests génétiques positifs. Virginie Gagnon, elle, a fait trois fausses couches avant sa grossesse actuelle, qui se déroule bien. « J'ai fait des tests au privé pour me rassurer, dit-elle. Ç'a été tellement compliqué qu'on voulait s'assurer que le bébé était en bonne santé. »

Elles ne veulent pas de tests

« J'accepte cet enfant comme un cadeau. On va l'accepter, on va l'accueillir et l'aimer, dit Myriam*, qui trouve que les tests, dont les résultats ne sont pas sûrs à 100 %, entretiennent l'anxiété de la maman. On y va avec un état d'esprit serein. Et j'ai déjà fait une fausse couche auparavant. Je me dis que si jamais le foetus n'est pas viable, mon corps va le rejeter... » Myriam croit que son choix de ne pas faire de test sera jugé par certaines personnes, mais ne veut pas critiquer ceux qui les font. « Je les comprends très bien », dit-elle. Sonia, elle, a fait une prise de sang et a décidé de ne plus faire d'autres tests. « Ce n'était pas important de savoir si l'enfant était trisomique, parce qu'on le voulait de toute façon », explique-t-elle.