Le Mile End est bien chanceux. Il y a déjà le Lawrence, qui nous gâte avec sa cuisine allumée. Il y a Sardine, le minuscule nouveau si inventif. Il y a les glaces exquises de Kem Koba, la Drogheria pour ceux qui veulent s'acheter de la bonne sauce tomate artisanale. Et je ne parle même pas des bagels St-Viateur ni du Caffè In Gamba.

Et comme si ce n'était pas suffisant, voilà maintenant qu'ouvre l'Hôtel Herman, un écrin boisé où une platine joue les plus cool 33 tours de notre adolescence, pendant que l'on savoure petits plats créativement rustiques et vins décalés. Un petit verre de blanc serbe avec ça?

Ce sont toujours les mêmes qui ont tout...

Ouvert il y a plusieurs semaines par des anciens de La Salle à manger et du Réservoir, dont le chef et copropriétaire Marc-Alexandre Mercier, l'Hôtel Herman n'est pas un hôtel.

Peut-être qu'un jour il le deviendra un peu, nous a-t-on dit. Et cela serait une bien bonne idée. Montréal a tout à fait besoin d'un hôtel un peu différent, un peu comme le Drake ou le Gladstone à Toronto...

Mais en attendant, le Herman, installé sur le boulevard Saint-Laurent là où était jadis la Montée, est un restaurant. Une table où se retrouvent les hipsters et les gourmands. On s'y assoit au bar ou à l'une des tables des côtés. L'atmosphère est conviviale. C'est le temps de porter de faux tatouages ou de montrer ses vrais.

Le menu ne compte pas d'entrées ou de plats principaux. Tous les plats partagent la même envergure. On choisit deux ou trois assiettes par personne.

Nous avons commencé par une création de crabe de roche, présentée froide, une salade somme toute, où la chair douce du crustacé, servie sur une mayonnaise aux herbes, se marie parfaitement à l'amertume et à la fraîcheur des radis et aux notes vertes et poivrées de quelques branches de cresson.

Toujours dans le froid, le sashimi de flétan se présente avec des lamelles de concombre et de belles feuilles de livèche. Peut-être aurait-on pu ajouter une toute petite note d'acidité pour faire un contrepoint à la riche onctuosité du poisson cru. Un peu de sel aussi. Mais le plat avance sur une bonne voie.

En deuxième service, on nous a préparé, à notre demande, un plat végétarien à base de chou-fleur, une composition impromptue de légume grillé avec beaucoup de beurre noisette. Un délice. Le genre de plat qui nous donne envie de lécher le fond de l'assiette.

A suivi une assiette de saucisse, avec oignons grillés et purée d'oignons, accompagnée de rabioles rôties glacées. Un plat juste assez automnal sans être lourd, plus intéressant que celui de pleurotes érigés, où les escargots n'impressionnaient pas par leur fraîcheur. On les préfère venus plus récemment du jardin, nourris aux poires ou au thym...

Pour le dessert, il faut essayer la terrine de chocolat Manjari à l'argousier, ce petit fruit orangé bien parfumé et bien acidulé, accompagnée d'un peu de crème fraîche à la cannelle et de tire-éponge, composition là encore très bien équilibrée. La crème prise au lait de chèvre, elle, est un peu trop prise, justement, et son crumble trop costaud. On oublie ainsi la douceur des fraises d'automne et de la menthe qui servent de prétexte à cette idée, excellente, comme bien d'autres chez ce sympathique nouveau venu.

Hôtel Herman

5171 boulevard Saint-Laurent

Montréal

514 278-7000

hotelherman.com

Prix : Prix de chaque plat de taille moyenne : entre 9 $ et 23 $

Carte de vins : La carte cherche à être remplie de coups de coeur inédits. Cépages rares, origines inhabituelles. Un peu de mourvèdre ici, des vins serbes par là. Ravissement au rendez-vous. Prix raisonnables. Joli choix au verre. On se laisse suggérer toutes sortes de choses par les serveurs.

Atmosphère: Il y a un bon niveau de bruit. C'est voulu. On peut s'assoir au bar, comme si on était dans un long cinq à sept. Ou alors on choisit les tables, plus formelles. Mais peu importe, voilà un lieu vivant, un point de rencontre pour bobos barbus riants et gourmands, une escapade joyeuse pour jeunes parents.

Service: Quelques lenteurs, parfois. Mais cordial et efficace, surtout quand vient le temps de répondre aux questions, et surtout sur la cuisine et le vin. Bravo à l'équipe pilotée par coproprios, Dominic Goyet et Ariane Lacombe, qui complète le trio derrière le restaurant, avec le chef.

Plus: Une cuisine créative soignée accompagnée de vins originaux. Bon rapport qualité-prix.

Moins : Bruyant. Et carte peut-être un tout petit peu courte, en plats légumiers notamment.

On y retourne : Tout de suite !