Nous venions à peine d'arriver chez Koko, avec ses lampes aux abat-jour de plumes, ses fauteuils Starck et ses lustres géants, quand mes deux jeunes accompagnatrices ont laissé tomber leur première impression. Sans équivoque.

«C'est tellement chill!

- Chill

Oui chill comme dans cool et relax en même temps, ont-elles expliqué. «Comme c'est beau et t'as envie de t'écraser pour relaxer.»

 

Avec ses canapés généreusement rembourrés, sa panoplie de fauteuils tendance et ses lampes spectaculaires choisies dans l'esprit néo-baroque qui garnit depuis quelques années les décors de chaises post-Louis XV et de chandeliers en plexiglas, Koko fait partie des restaurants qui misent sur leur style.

On n'y va pas en espérant découvrir le prochain cuisinier du siècle. On y va pour s'amuser dans un lieu théâtral. Et, se dit-on, tant mieux si en plus la cuisine est bonne.

Or, effectivement, lorsque les plats commencent à défiler, ils s'avèrent plutôt bien.

Oui, on pourrait corriger une texture ici, alléger une mousse là. Mais de façon générale, les plats sont savoureux et justes et répondent aux attentes.

Prenez par exemple l'entrée de dumplings simplement construite autour de cinq raviolis farcis de crevettes et de porc. Rien de spectaculaire en soi. Sauf que la sauce soja est juste assez vinaigrée et bien parfumée au gingembre.

Les calmars croustillants sont aussi, sans trop d'originalité, très bien préparés. En tempura plus que frits, ils s'abandonnent tendrement sous la dent et profitent agréablement de la mayonnaise mélangée à la piquante acidité d'une petite confiture pimentée déposée dans l'assiette. Sous les fruits de mer se cachent aussi des mini-aubergines tranchées confites dans le soja et l'huile de sésame. Même la plus jeune des convives, habituellement récalcitrante devant ce légume, a adoré.

L'entrée la moins intéressante que nous avons essayée était celle dont j'attendais le plus: une salade de papaye verte qui avait perdu la fraîcheur de sa texture craquante habituelle, garnie de crevettes molles et froides dépourvues de saveur - pourtant, sur le menu, on les annonçait façon «satay» - et accompagnée d'arachides au goût ranci.

En plat principal, nous avons essayé le magret de canard laqué, que l'on fait bien cuire - juste assez saignant - déposé sur un lit de champignons enoki et de juliennes de céleri qui viennent apporter un peu de légèreté et trancher avec la sauce à base de soja, très concentrée et sucrée.

Les filles ont adoré ce plat, mais personnellement, c'est la morue noire au miso qui m'a le plus ravie. Cuit à point, ce poisson est en effet présenté tout simplement sur un jus au miso et accompagné d'edamame. Le plat se compose aussi de morceaux de racines de bardane - dont la texture fait un peu penser aux châtaignes d'eau - braisées au dashi, un bouillon japonais.

Les nouilles shanghai étaient quant à elles dodues comme des udon et coulaient dans une sauce à base de tamari, ponctuée simplement mais correctement d'oignons verts et de morceaux de poulet et de crevettes.

Au dessert, nous avons choisi les deux options chocolatées qui l'étaient presque trop.

Un «délice au chocolat» composé de deux mousses-gâteau à forte concentration de jaunes d'oeufs et de chocolat, qui aurait gagné à voir un de ses deux étages allégés par une mousse plus fine.

Et malheureusement, la glace à la tangerine n'avait pas l'acidité nécessaire pour couper la densité du dessert qu'elle accompagnait.

Nutella

Le «kulfi malte» et ses bananes caramélisées nous a été décrit comme une crème au chocolat faite à partir de lait condensé et le dessert était effectivement très dense, ce qui a plu à certaines autour de la table, qui avaient l'impression de plonger la cuillère directement dans un pot de Nutella, sans les noisettes. Les bananes en à-côté étaient cependant très peu caramélisées et auraient probablement gagné à être un peu plus cuites et moins résistantes sous la fourchette et la dent.

Mais qu'importe? Pendant que je me posais des questions sur la maturité des fruits tropicaux, la petite de l'autre côté de la table finissait le pot avec sa cuillère en admirant les invitants coussins de la table à côté. Très chill eux aussi.

KOKO

8, rue Sherbrooke Ouest Montréal 514-657-5656

> Prix : Entrées entre 8 et 18 $, plats entre 24 et 28$, desserts 9$.

> Carte de vins : rien de très original, beaucoup de valeurs sûres, style Côtes-du-Rhône Guigal ou Pinot Gris Pfaffenheim.

> Genre : restaurant à la décoration spectaculaire, qui devient très «lounge» plus la semaine avance. Le soir où nous y sommes allés, on y tenait, dans un salon, une soirée de «wine dating». La cuisine est d'inspiration asiatique. La terrasse, l'été, est fort élégante.

> Faune : la jeunesse chic du secteur Saint-Laurent-Sherbrooke, les clients de l'hôtel-boutique Opus.

> On y retourne? Oui, mais en début de semaine pour éviter les foules et avec des gens qui aiment bien les décors qui en jettent plein la vue et la cuisine asiatique dans ce qu'elle a de plus accessible.