Jambon au brie, croquettes de bolets, raviolis de viande séchée: une infinité de saveurs accueille le visiteur dans les bars de Saint-Sébastien, haut-lieu de la gastronomie basque, un atout touristique qui se double d'une arme anti-crise.

Les gourmets n'ont que l'embarras du choix dans cette cité balnéaire du nord de l'Espagne, la ville au monde à la plus forte densité de chefs étoilés, qui accueille depuis l'an dernier le premier centre universitaire gastronomique: le Basque Culinary Center.

«Ce centre se veut un lieu de référence dans la connaissance approfondie de la gastronomie, avec une vision internationale», explique son directeur, Joxe Mari Aizega.

L'académie culinaire compte sur l'appui de grands chefs comme les Espagnols Ferran Adria et Juan Mari Arzak, ou le Français Michel Bras.

En quatre ans, les élèves y sont formés à la cuisine, du potage de base aux mets les plus sophistiqués. Ils apprennent aussi à diriger un restaurant, partageant leur temps entre leur apprentissage et des stages dans le monde entier.

«Jour après jour, on nous enseigne tous les secrets, les petits trucs qui nous aident à cuisiner de mieux en mieux», raconte Esteban Yebes, un étudiant colombien.

«Par exemple, dans le cas des haricots, "faire peur aux haricots", comme dit le professeur, c'est verser dessus un peu d'eau froide quand ils bouillent».

Vêtus de leurs uniformes blancs, l'incontournable toque de cuisinier sur le crâne, les étudiants s'affairent autour des grandes tables où est disposée toute la panoplie des ustensiles de cuisine.

Mais ils ne sont pas seulement formés derrière les fourneaux: éprouvettes en main, ils s'initient à la recherche et à l'innovation culinaire, aussi bien qu'à la création d'entreprise, conscients que cette formation peut les aider à trouver du travail.

«J'ai étudié l'administration et la direction d'entreprises, mais je ne trouvais pas de travail. J'ai toujours aimé la cuisine, c'est pourquoi j'ai décidé de venir ici», explique Lolo Roman, un étudiant de 29 ans venu de l'archipel des Canaries, occupé à cuisiner un plat de haricots.

«Nous ne sommes pas inquiets sur les perspectives d'emploi. Certains qui sont là depuis un an ont déjà reçu des propositions», assure Joxe Mari Aizega. Pour lui, «la gastronomie est un atout touristique de plus en plus important». «En ce sens», ajoute-t-il, «nous entendons contribuer à l'attrait économique» du Pays basque.

Selon une enquête menée en 2011 par le gouvernement basque, sept touristes sur dix qui visitent la région le font parce qu'ils sont alléchés par l'offre gastronomique.

C'est vrai tout particulièrement à Saint-Sébastien, où les célèbres bars à canapés, ou «pintxos», attirent les étrangers et aident à compenser la baisse de fréquentation des touristes espagnols liée à la crise économique.

Durant les huit premiers mois de 2012, le Pays basque a accueilli plus de 1,5 million de touristes, la deuxième meilleure année de son histoire. Dans le même temps, le nombre de touristes espagnols a baissé de 3,9% et celui des étrangers a augmenté de 5%.

«Les Espagnols sont bien sûr un peu moins nombreux, mais cela est compensé par les étrangers, beaucoup de Français, mais aussi des Asiatiques, des Américains, des Britanniques», remarque Amaiur Martinez, co-propriétaire du bar Ganbara, dans la vieille ville de Saint-Sébastien.

Sur le comptoir s'empilent champignons, fruits de mer et «pintxos» qui font les délices des clients, parmi lesquels des Japonais et des Américains.

Chacun, selon son pays d'origine, a ses préférences, raconte Amaiur: «Les Asiatiques sont plus attirés par le poisson, les Français par les champignons».

Ces bars et restaurants complètent l'offre gastronomique haut de gamme, distinguée par des étoiles au guide Michelin, qui récompensent les chefs comme Martin Berasategui, Pedro Subijana ou Andoni Luis Aduriz.

«L'hôtellerie et la gastronomie vont continuer à occuper leur propre espace, à innover», demeurant un pilier de l'économie basque, se réjouit Joxe Mari Aizega.