Retrouver la civilisation seul après s'être fait larguer les yeux bandés dans le nord du Québec sans carte, sans GPS et sans nourriture, courir 33 marathons en 7 semaines et naviguer des milliers de kilomètres sur l'océan. Voilà les défis que Frédéric Dion a relevés au cours des 10 dernières années. Le 16 janvier dernier, l'aventurier a cette fois décidé de rester en plein lac Mistassini, à plus de 100 km au nord de Chibougamau, dans le Nord-du-Québec, pour mener une expérience de survie pendant quatre jours en compagnie de sa chienne Nanook.

Q : Pourquoi avez-vous décidé de survivre quatre jours par temps glacial, sans équipement?

R : L'Opération ours polaire fait partie intégrante de mes exercices d'entraînement en vue d'une grande traversée avec ma chienne Nanook sur plusieurs semaines. Cette courte aventure nous a aussi permis de tester notre «partenariat». Ce n'est pas ma première expérience de survie, mais de survie hivernale sans équipement, oui. Je n'avais donc que les vêtements que j'avais sur le dos, mon chien et sa nourriture. Pas d'eau ni de feu, de couteau ou de matelas au sol.

Q : Comment avez-vous réussi à résister aux basses températures?

R : La nuit, il faisait entre -15 et -24 degrés. Les premières heures étaient donc cruciales, car je devais me fabriquer un quinzhee, une sorte d'igloo où la température peut osciller entre 0 et -5 degrés. Construire un quinzhee avec ses mains est très physique! Mais avant l'aventure, je m'étais assuré d'être capable de bâtir mon abri. Me retrouver sans nourriture a fait beaucoup baisser ma capacité à combattre le froid. Je pensais que, dans mon igloo à -2 degrés avec mes vêtements, j'allais bien dormir. Ça n'a pas du tout été le cas. J'ai dormi par tranches de 15 ou 30 minutes.

Q : Est-ce que Nanook a été une bonne couverture? 

R : Disons que c'est plus facile de coller ma blonde que mon chien! Ç'a été une compagne importante. On a surtout joué ensemble. Je m'étais fait une allée sur le lac pour pouvoir faire des allers-retours en marchant ou en courant pour me réchauffer et pouvoir dormir un peu par la suite. Alors elle venait avec moi, mais, la plupart du temps, elle ronflait contre moi!

Q : Nanook avait ses croquettes, mais vous n'aviez aucune nourriture. Est-ce que les repas de votre chienne sont devenus tentants?

R : L'objectif de l'expérience était aussi de voir l'influence sur le corps du manque de nourriture et de tester l'hydratation à partir de la neige.

Je ne voulais pas manger plus que d'habitude avant l'aventure. Et en ce qui concerne les croquettes de Nanook, ce que je peux vous dire, c'est que si quelque chose ne semble pas appétissant avant l'expérience, il ne le sera pas nécessairement après. De plus, ma blonde m'avait dit qu'elle ne m'embrasserait plus si je les goûtais et je ne voulais surtout pas gâcher l'expérience de survie. Au total, j'ai perdu 7 lb en 75 heures.

Q : Quel a été le rôle de votre chienne dans cette aventure?

R : Elle m'accompagne dans la préparation d'une plus longue expédition. Au cours de ces quatre jours, elle m'a surtout permis d'avoir de la compagnie. Le doute s'installe, on ne sait pas si on va passer au travers. La présence du chien aide, on n'a jamais autant joué ensemble. Pour Nanook, ç'a été une belle expérience. Elle a été quatre jours seule avec son maître! Disons qu'on a beaucoup jasé ensemble. Enfin, surtout moi! Pour moi, c'est l'endurance psychologique qui a été la révélation de l'aventure, et j'ai pu vraiment tester les techniques pour me motiver à survivre en milieu extrême.

Q : Quel sera votre prochain défi?

R : En 2002, j'ai traversé le Québec en solitaire de Kuujjuaq à Baie-Comeau en 100 jours. En janvier 2015, je veux le refaire en sens inverse, en ski avec Nanook. On s'entraîne sur de longues distances en ce moment en ski. Elle est habituée, c'est un chien qui vit à l'extérieur, un mélange de labrador, de chien de traîneau et de mastiff italien.