Une Québécoise «pure laine» fait sa marque dans le milieu scolaire britannique. Danielle Dion-Jones insuffle l'amour du français à ses élèves avec tant de succès qu'elle est finaliste pour le prix du meilleur enseignant de langue seconde au pays. La clé de sa réussite : les jeux de rôles dans la classe. La Presse l'a rencontrée à Twickenham, une banlieue cossue et coquette de Londres.

«Bonjour madame!» Des fillettes en robe jaune et des garçons en chemisettes s'assoient devant Danielle Dion-Jones et récitent une comptine. «Assieds-toi, comme il faut!» chantent-elles en agitant l'index.

Mais les enfants de deuxième année à l'école Saint James gigotent d'impatience. Qui jouera la petite chenille aujourd'hui? C'est finalement la petite Lili Askham qui coiffe le bonnet rouge du personnage. Elle fait semblant d'interrompre la classe et nomme en français les fruits qu'elle aimerait manger. Des dessins de fraises, de poires et de pommes lui sont donnés.

«Très bien! lance l'institutrice. Que devrait-il se passer à la prochaine leçon?» Les élèves agitent la main à s'en déboîter l'épaule.

«Nous pourrions faire une discothèque dans la classe», dit un garçon aux yeux bridés. Sa proposition remporte le vote à main levée.

Après le cours, Danielle Dion-Jones s'interroge sur la musique qu'elle devrait apporter à cette «disco». «J'ai de la musique d'accordéon. Je pense que ça les amuserait», dit la blonde, les yeux brillants.

Récompense

L'air de rien, la grande femme de 49 ans mène une petite révolution à l'école Saint James depuis 2007.

La Québécoise enseigne le français grâce à une approche théâtrale. En d'autres mots, les élèves jouent des rôles, apprennent la langue en « faisant semblant ». Ils mettent en scène leur contexte d'apprentissage.

Sa méthode fait fureur. Danielle Dion-Jones est même finaliste pour le prix du meilleur enseignant de langue seconde au Royaume-Uni. Seulement trois autres candidats ont été retenus. Le lauréat sera annoncé au Parlement en novembre.

«L'enthousiasme des élèves de Danielle pour le français est vraiment remarquable. Leur accent est aussi très charmant», explique Denise Cripps, juge et directrice du commanditaire du prix, le fournisseur scolaire Scholastic.

En effet, les écoliers semblent adorer leurs leçons avec «Madame Dion-Jones». «C'est vraiment amusant et ça nous permet de nous concentrer», dit Lili Askham, qui jouait la chenille.

«Je puise dans l'imaginaire des enfants pour qu'ils s'amusent à apprendre, explique Danielle. Je vais chercher leurs tripes. On développe l'histoire et des personnages, comme la petite chenille, au fur et à mesure. Ça devient leur création. Ils en sont fiers.»

Caillou et La guerre des tuques

Elle popularise une technique d'enseignement développée par une Anglaise dans les années 60 : Dorothy Heathcote. Un de ses disciples, Gary Boulton, a pris Danielle sous son aile en 1985. Elle était alors étudiante à la maîtrise à l'Université de Durham, dans le Nord de l'Angleterre.

La native de Sillery serait probablement revenue au Québec pour enseigner si elle n'était pas tombée dans l'oeil d'un étudiant au doctorat à la même université. Confirmant l'adage «Qui prend mari prend pays», Danielle vit toujours en Angleterre avec Graeme et leurs trois filles adolescentes.

Cependant, son lien avec le Québec reste fort. Les écoliers de Saint James sont familiers avec le fleurdelisé.

Cette année, elle compte présenter le personnage de Caillou aux enfants de la maternelle et les livres de jeunesse québécois de Gilles Tibo et Dominique Demers aux plus grands. Le classique La guerre des tuques fait aussi partie des surprises qu'elle réserve à ses élèves.

«C'est simplement une question de partager ma culture. J'en suis fière», affirme Danielle Dion-Jones.