Chez les enfants, l'obésité représente un risque majeur pour le foie: elle peut entraîner une stéatose, une maladie dans laquelle cet organe vital est trop graisseux, et finir par contraindre à une transplantation, selon une série d'études récentes.

Cette maladie serait largement répandue puisque, selon la Fondation américaine du foie (American Liver Foundation), entre deux et 5% des enfants américains âgés de plus de cinq ans, et la quasi-totalité de ceux qui sont obèses ou en surpoids en souffriraient.

Physiologiquement, une inflammation gagne le foie, alors qu'il se charge de graisse, entraînant une cicatrice qui, au fil des années, peut conduire à une cirrhose non alcoolique, voire une défaillance de l'organe ou un cancer. Or la surchage en graisse peut être prévenue, dès lors que la cirrhose n'est pas développée.

Selon les spécialistes, la stéatose est plus répandue chez les enfants présentant de la graisse abdominale et certains signes d'appel, notamment un diabète, du cholestérol ou autres problèmes cardiaques. Toutefois, elle a pu être observée aussi chez quelques enfants de poids normal.

La génétique, le régime et l'exercice physique jouent un rôle. Aux États-Unis, la maladie est plus fréquente chez les latino-américains, rare chez les afro-américains et plus fréquente chez les garçons que chez les filles.

L'augmentation du nombre de stéatoses chez les adultes placera cette pathologie au rang de premier pourvoyeur de transplantation hépatique d'ici 2020, avec une grande quantité de personnes de 30-40 ans ayant la maladie depuis l'enfance. Or, comme le rappelle le Dr Philip Rosenthal, de l'hôpital pédiatrique de l'Université de Californie, les organes manquent.

Un de ses patients, Irving Shaffino, 15 ans et d'origine mexicaine, habitant au Texas, a eu la chance d'être transplanté il y a un an. Il était arrivé à un stade terminal de cirrhose, et pesait 81,7 kilos pour 1,64 m. L'adolescent était trop gros depuis l'âge de six ans, à cause d'une alimentation trop grasse, nourriture mexicaine, pizzas et hamburgers, selon sa mère, Guadalupe Shaffino. À huit ans, son estomac était distendu et au début de son adolescence, des problèmes respiratoires le rendaient dépendant d'une tente à oxygène à domicile.

Pour les spécialistes, de nombreux enfants diagnostiqués avec une stéatose ont des bilans de santé plus lourds et, au mieux, un sur quatre seulement perd suffisamment de poids pour en guérir, maigrir étant le seul traitement efficace.

Les ravages causés par cette maladie sont connus depuis peu. Une poignée de cas seulement ont été rapportés dans les journaux médicaux des années 1980, et dans le passé, on ne compte plus les patients adultes accusés de mentir quand ils affirmaient ne pas boire... Seuls trois cas de transplantations hépatiques chez des enfants atteints de stéatose ont été enregistrés de 1990 à 2002, dont deux pratiquées l'an dernier.

«C'est vraiment ces deux ou trois dernières années que le problème s'est banalisé», a déclaré le Dr Ann Scheimann, gastro-entérologue pédiatrique, au centre pour enfants John's Hopkins. «C'est inquiétant».

En témoigne l'explosion de publications sorties ces derniers mois sur cette question et, étonnament, en partie dans des pays où le taux d'obésité n'est pas le plus élevé, notamment la Chine, l'Inde et l'Iran, que le mode de vie américain commence à gagner. Toutefois le gros des études vient d'Australie, d'Angleterre et de Grèce, d'Irlande, d'Israël, d'Italie et du Japon.

Tout comme la maladie cardio-vasculaire, la maladie hépatique est silencieuse: les enfants peuvent se sentir en forme pendant de nombreuses années. Les premiers symptômes, notamment la fatigue et la perte d'appétit, sont vagues, souvent masqués par des problèmes plus flagrants allant du diabète à l'hypertension artérielle.

Pour les experts, le meilleur moyen de combattre ce problème est de s'en occuper le plus tôt possible, quand la maladie est encore réversible. Ils recommandent qu'une équipe médicale comprenant des endocrinologues, des hépatologues et des diététiciennes travaillent avec l'ensemble de la famille.

Perdre du poids reste le meilleur remède, selon une étude menée à Rome. Ainsi Curtis Siegfried, 12 ans, mesurant 1,65 m pour 81,3 kilos et montrant un foie détruit à 40% par la stéatose: après avoir d'abord perdu plus de neuf kilos, puis eu une poussée de croissance de dix centimètres, en ne prenant que 3,6 kilos, ces deux dernières années, sa biopsie du foie faite à l'automne dernier a montré une importante amélioration.