Le débat sur le bon âge pour boire de l'alcool a été relancé aux États-Unis avec la remise en question par des présidents d'universités de la limite des 21 ans, qui, par réaction, inciterait les plus jeunes à s'adonner à l'ivresse radicale et clandestine du «binge-drinking».

«L'âge de 21 ans ne marche pas. Une culture dangereuse et clandestine du binge-drinking s'est développée.(...). Ces adultes de moins de 21 ans sont censés être capables de voter, de signer des contrats, de servir dans un jury, de s'enrôler dans l'armée, mais on leur dit qu'ils ne sont pas assez mûrs pour boire une bière», regrette la lettre ouverte d'une centaine de présidents d'universités aux élus du Congrès.

Le «binge-drinking» consiste à boire rapidement pour s'enivrer, au moins cinq consommations d'affilée pour les garçons et quatre pour les filles.

De prestigieuses universités comme Duke, Darmouth, Johns Hopkins ou Whittier ont signé la déclaration qui appelle à «un débat public et dépassionné sur les effets de la limite d'âge de 21 ans».

«On trouve que la situation actuelle n'est pas satisfaisante, qu'il faut faire autrement. Ce que je demande, c'est un vrai débat sur la question, y compris un éventuel abaissement de l'âge», a déclaré sur la radio publique NPR un signataire de la pétition, Jerry Greiner, président d'Arcadia University, près de Philadelphie (nord-est).

«La limite des 21 ans pousse les jeunes à boire plus vite. Comme il est difficile d'obtenir de l'alcool, quand ils en ont, non seulement ils boivent beaucoup, mais vite. Ils boivent pour être saouls avec des jeux où il faut par exemple ingurgiter le plus de bières en 20 minutes», confirme un élève de lycée de la région de Washington, Achille Da Silva, 17 ans.

La pétition universitaire a été lancée par un ancien président d'université du Vermont, John McCardell, sous le nom d'initiative «Amethyst», signifiant en grec «préserve de l'ivresse»: «nous sommes contre toute intoxication mais nous sommes pour un comportement adulte responsable vis-à-vis de l'alcool», a indiqué cet universitaire.

«Les données statistiques montrent qu'une vaste majorité de jeunes ont déjà bu de l'alcool avant d'arriver à l'université», note-t-il.

Selon les chiffres des Centres de contrôle et prévention des maladies (CDC), en 2007, 45% des lycéens déclaraient avoir bu au cours du mois précédent et 26% s'être adonnés au «binge-drinking».

En 2005, les achats d'alcool par ceux à qui il est interdit d'en boire ont représenté 15% des ventes d'alcool dans le pays soit 19,8 milliards de dollars, selon l'Underage Drinking Enforcement Training Center (UDETC), une agence gouvernementale.

L'initiative des universitaires a suscité une levée de boucliers parmi les partisans de l'abstinence chez les jeunes, notamment le virulent groupe «Mothers Against Drunk Driving» (MADD, mères contre l'alcool au volant). «Quelque 25 000 vies ont été sauvées par l'âge minimum légal pour boire à 21 ans. C'est pourquoi il est si choquant de voir plus de 100 présidents d'universités signer une déclaration qui fourvoie le public», écrit l'association dans un communiqué.

Une récente étude de la fondation Robert Wood Johnson affirme que la limite des 21 ans a permis de réduire de 11% le nombre d'accidents de la route liés à l'ivresse.

Cette limite des 21 ans est en vigueur dans tous les États américains depuis qu'une loi de 1984 a supprimé des subventions pour les autoroutes à tout État qui ne l'appliquerait pas.

Dans les années 70, l'âge légal pour boire avait été abaissé entre 18 et 20 ans dans de nombreux États parce qu'il était devenu intenable de refuser une bière aux jeunes anciens combattants du Vietnam de retour du front.