D'abord, quelle belle idée: un restaurant de qualité dans le magnifique pavillon du lac aux Castors. Avec vue sur le parc, ses sculptures, l'étang qu'on appelle lac, les collines de verdure et cette impression d'être transporté à l'époque où Montréal trouvait qu'il méritait de se gâter, côté architecture.

Le nouvel établissement de restauration, qui partage maintenant les lieux entre cafétéria moderne et restaurant plus formel, a ouvert en novembre dernier. Mais l'aménagement n'est toujours pas terminé. Au centre, il reste encore des panneaux pour bloquer un escalier, murs de fortune que l'on tente de dissimuler sous des rideaux et des photos des commerces et lieux montréalais lauréats de concours de design, dont Le Pavillon fait partie. Retapé pour 7 millions, il est effectivement à nouveau magnifique. Mais ces panneaux...

«On nous a dit que ça serait temporaire, mais voilà six mois qu'on attend», a expliqué le serveur.

Ce projet de restaurant privé au lac aux Castors n'a jamais été marqué par la rapidité. Mais il a finalement ouvert, en novembre, fruit d'un partenariat entre la Ville de Montréal et une équipe de restaurateurs dont, principalement, le propriétaire d'Ouzéri, aussi copropriétaire de la brasserie Holder.

Aujourd'hui, au lieu de l'omniprésent hot-dog industriel et autres produits en boîte et en paquet, on y sert donc aussi de la cuisine travaillée. Steak, salades, poissons...

Sur papier, l'idée est excellente. On pense à Tavern on the Green à Central Park, au pavillon du parc Montsouris.

En réalité, le résultat est mitigé, à l'image de ce contreplaqué au milieu des lieux. On a voulu bien faire, mais on n'est pas encore rendu au but.

Et plus je mangeais mon repas, assise à la terrasse surplombant la petite place devant le lac, plus je me disais qu'il est impossible de dire à qui la faute dans cette situation étrange combinant lieux magnifiques, rénovations interminables et cuisine décevante.

La seule chose qui est claire, toutefois, c'est que ce sont les Montréalais qui écopent, car le résultat de ce nouveau partenariat n'est pas là. Oui, c'est joli. Oui, c'est agréable. Mais ce n'est pas en servant, en entrée, des côtelettes d'agneau australien sur un «crumble» de pommes de terre lourd de beurre, en plein mois de juin, qu'on va convaincre quiconque que le résultat de cette interminable transformation en valait la peine. Et ce n'est pas en ajoutant non plus à l'assiette un chutney aux figues, dont on a peu de raisons de croire qu'il a été fait sur place et non acheté en pot, et quelques pousses de roquette, qu'on en change l'impression finale.

En fait, du début à la fin du repas, on a l'impression que le chef essaie de créer mais passe presque systématiquement à côté de la plaque. Vinaigrettes trop sucrées, combinaisons étranges - salade à l'avocat, avec raisins et pastèque et pamplemousse - lieux communs - une César dont les croûtons semblaient sortis directement d'une boîte, présentée comme «différente» parce que préparée avec des feuilles de coeur de romaine déposées telles quelles dans l'assiette... Bref, rien dans ce repas ne nous a épatés, sinon la très grande gentillesse du serveur, qui nous a comblés d'attention et a affiché tout le professionnalisme nécessaire pour récupérer la situation quand il a réalisé qu'un plat avait été oublié...

Pour le reste, il y avait de bonnes choses, notamment une généreuse assiette de morue charbonnière fondante à souhait et un burger de saumon confectionné avec un pavé de saumon cuit à point.

Mais le trio de sorbets - framboise, citron et mangue - n'avait ni les parfums ni les textures nécessaires pour être qualifié de spécial et le même problème affligeait l'omniprésent moelleux au chocolat.

Si un tel repas pour quatre ne coûtait pas près de 200$, incluant un peu de vin, on ne repartirait peut-être pas de là aussi déçus.

Si un jour on fait des audiences publiques sur l'amélioration du menu du restaurant du pavillon du lac aux Castors, je serai aux premiers rangs pour faire des suggestions. Car il y a sûrement moyen pour les intervenants en cuisine de mieux répondre aux besoins des utilisateurs de ces équipements.

Le Pavillon

2000, chemin Remembrance, Montréal

514-849 2002


Prix : table d'hôte avec steak en plat principal pour 36 $ ou avec un plat de poisson pour 29 $. Total pour quatre, avec un peu de vin, taxes et service : environ 200 $.

Carte : plutôt simple, incluant quelques vins au verre. On n'y fera pas de découverte spéciale de petites bouteilles en importation privée mais il y a de quoi se débrouiller avec autre chose que des lieux communs chiliens ou australiens.

Faune : des touristes et familles de passage qui reviennent d'une balade dans le parc...

Décor : splendide pavillon historique rénové comme il se doit, en conservant son cachet moderne de la fin des années 50. Mention spéciale pour le plafond en lattes de bois et pour le choix du mobilier actuel, très dans le ton.

(+): le décor, le décor et encore le décor.

(-): la cuisine, qui n'est pas à la hauteur des lieux.