Karl Lagerfeld aime l'orgue et l'a montré mardi en proposant pour l'hiver prochain une collection inspirée des tuyaux d'orgue, tandis que Christian Lacroix a plus que jamais marié la dentelle noire et le jais pour un sombre vestiaire né de l'évocation du monde des insectes.

Sous la verrière du Grand Palais à Paris où se tenait le défilé de Karl Lagerfeld pour Chanel, au deuxième jour de présentation des collections haute couture parisiennes, plusieurs centaines d'invités s'éventaient fébrilement avec leur carton d'invitation pour lutter contre la chaleur accablante.

Ils ont néanmoins applaudi les mannequins qui apparaissaient et disparaissaient entre de grands cylindres gris installés sur la scène, symboles d'un orgue géant.

Des alignements de minces «tuyaux» de tissu soulignent comme des smocks la taille des robes ou structurent des manches en leur donnant un aspect rigide et du volume.

«L'inspiration, c'est le buffet d'orgue de la salle Gaveau», a précisé Karl Lagerfeld à la presse. L'orgue de la célèbre salle parisienne de concerts classiques a été récemment restauré. «Tout d'un coup, j'ai trouvé très joli les buffets d'orgue et j'ai eu l'idée du décor, la collection est venue de là», dit-il.

La technique employée dans la collection n'a rien à voir avec les smocks, souligne le couturier: «c'est fait tuyau par tuyau, légèrement rembourré, piqué, brodé. C'est un travail absolument fou».

Le célèbre tailleur Chanel se fait discret, la collection en comprend peu, et avec des vestes rallongées. Karl Lagerfeld propose en revanche des «robes qui ressemblent à des tailleurs et qui n'en sont pas».

L'essentiel de la collection se décline dans des nuances de gris, de noir et de blanc. Une robe longue rose, fermée dans le dos par un long alignement de boutons et au drapé retenu par une fleur se fait d'autant plus remarquer.

Même les broderies or ou argent jouent les demi-teintes. D'autant qu'elles sont réalisées avec «des bouts d'aluminium, des choses très étranges», explique Karl Lagerfeld.

Certains mannequins portent comme des cadres de tableau autour du visage, attirant encore davantage le regard vers le haut de la silhouette.

Le défilé a été applaudi notamment par l'ancien mannequin Claudia Schiffer, la comédienne Patricia Arquette, les chanteuses Ayo et Dany, ou l'ancienne Première dame Bernadette Chirac.

Christian Lacroix a livré une collection plutôt sombre qui fait la part belle aux arabesques de dentelle noire et aux broderies de jais sur de courts fourreaux, des manteaux ou robes à volumineuses manches lampions. La silhouette est souvent courte, près du corps.

La couleur est douce, en dégradé de corail sur un long fourreau de mousseline chair, une jupe drapée et bouillonnée saumon, en fourreau caramel.

Mais, comme toujours chez le couturier, est elle aussi vive, d'autant plus vive qu'il y a beaucoup de noir. Elle éclate sur une courte robe trapèze bouton d'or, en oeillets géants fuchsia sur une robe en satin, en vagues de mousseline coquelicot sur une robe longue feuilletée et bouillonnée.

La collection vient un peu «du monde de l'insecte», explique Christian Lacroix. Mais, souligne-t-il, «je ne me suis pas amusé à faire un Microcosmos», en référence au film sur la vie des insectes. Ce ne sont «pas non plus des costumes de fin d'école maternelle», du genre «ma fille s'habille en libellule». La collection joue plutôt avec les idées de carapaces, de «choses un peu comme des élytres, très transparentes».

«C'est sombre, c'est sûr, l'hiver je suis toujours sombre», conclut le couturier.