L'été 2017 a été... mouillé. Avec des variations selon les régions, bien sûr, l'est de la province a été plus épargné, mais de la pluie, il y en a eu. Ainsi que des températures fraîches. Admettons que ça ne restera pas en mémoire comme un de nos plus beaux étés...

Mais qu'est-ce que ça veut dire pour les vignerons? Est-ce qu'un été pluvieux est nécessairement synonyme de moins bonne qualité? On parle souvent de l'effet millésime sur les vins. Qu'est-ce que c'est? Et un millésime idéal, ça ressemble à quoi?

Ce sont toutes de bonnes questions, auxquelles il n'y a pas, comme c'est souvent le cas, de réponse simple.

Quand on parle de millésime, on parle de météo. Il est nécessaire ici d'apporter une précision importante: la météo, c'est le temps qu'il fait aujourd'hui; le climat, c'est la moyenne de la météo sur plusieurs années, voire plusieurs dizaines d'années. Un millésime, pour un vin, est forgé par la météo: le temps qu'il fait chaque jour pendant la saison de croissance de la vigne (le temps qu'il fait hors de cette saison joue aussi, mais on va s'en tenir ici à la période de croissance).

En général, la vigne n'aime pas les extrêmes. Mais chaque cépage a ses particularités. Certains aiment plus la chaleur, d'autres craignent moins l'humidité. Idéalement, on voudrait que les températures printanières se réchauffent doucement, pour permettre à la vigne de commencer à débourrer. Mais à ce stade où les jeunes bourgeons sont très fragiles, on ne veut surtout pas de gel, qui pourrait les détruire. En cas de coup de froid, il y aura moins de bourgeons, moins de nouvelles pousses pour la vigne et moins de raisins.

Ensuite, il faut du soleil et de la chaleur, pour permettre une bonne floraison (dont le succès déterminera la charge en raisin) et une photosynthèse optimale, pour que les raisins mûrissent bien. Par contre, une longue saison pas trop chaude s'avère plus propice à produire des vins de qualité qu'une saison courte et très chaude. En d'autres mots, il est préférable que les raisins mûrissent sur une plus longue période. Ça permet un meilleur développement des arômes, plus de finesse et de profondeur, ainsi qu'un meilleur équilibre d'ensemble. Comme le disait si bien Pascal Ribéreau Gayon, l'un des oenologues les plus influents de l'histoire moderne du vin: «Une maturation trop brutale a pour effet de brûler les essences qui font la finesse des grands vins.»

En ce sens, une longue arrière-saison peut être très bénéfique à la qualité. On entendra souvent dire qu'un millésime a été sauvé par les dernières semaines précédant la vendange. Notre été pourrait en être un très bon exemple. Oui, nous avons eu beaucoup de pluie et de temps frais, et ça a donné du fil à retordre aux vignerons, au Québec comme en Ontario. Ceux qui auront les meilleurs résultats sont ceux qui auront passé beaucoup de temps dans leurs vignobles pendant l'été, à avoir à l'oeil l'état sanitaire des vignes et à réagir en conséquence. Une observation et un travail minutieux dans le vignoble permettent de limiter les dégâts qui peuvent être causés par la pluie (pourriture, maladies, etc.) et de conserver des raisins sains.

Maintenant que le beau temps semble vouloir s'installer, ceux qui auront fait ce travail pourraient voir leurs raisins profiter du long mûrissement qui leur est si important. Si ce beau temps se prolonge jusqu'aux vendanges, et s'il n'y a pas de gel... La viticulture, comme l'agriculture, est remplie de «si».

Je dirais même qu'un tel scénario est préférable à une saison extrêmement chaude, où les raisins risquent de mûrir trop rapidement et donneront des vins aux arômes de fruits cuits, où les différents composants ne se développeront pas en même temps, donnant des vins déséquilibrés. De grands excès de chaleur peuvent même avoir l'effet inverse, en stoppant la maturation des raisins - la vigne bloque sa croissance d'elle-même pour se protéger -, et donner des vins verts.

Il est toujours délicat de faire des généralisations. Certes, il existe des conditions idéales, mais elles diffèrent d'une région à l'autre, et selon les cépages cultivés. Et d'autres conditions sont tout aussi importantes, notamment l'attention apportée à la vigne et le travail du vigneron. Un vigneron peu consciencieux peut produire des vins médiocres dans un millésime considéré comme exceptionnel, tout comme un excellent producteur peut produire de grands vins dans un millésime moins propice.

On aurait tous aimé un peu plus de soleil et de chaleur cet été. Le temps a probablement gâché les vacances de certains et joué sur le moral de plusieurs. Mais pour les viticulteurs, comme chaque année, c'est leur gagne-pain qui est en cause. Il ne reste donc plus qu'à se croiser les doigts et à souhaiter que la météo des prochaines semaines soit celle qui nous a manqué pendant l'été. Nous pourrons alors nous consoler d'un été un peu maussade avec la promesse d'excellents vins à venir.

Cinq vins à découvrir

João Portugal Ramos Loureiro Vinho Verde 2016

Parce que c'est encore l'été, voici un petit vin blanc tout à fait estival, aromatique et sans prétention. L'appellation Vinho Verde, tout au nord du Portugal, permet l'assemblage de plusieurs cépages indigènes, mais c'est ici le loureiro seul, le plus cultivé, qui est utilisé. Un joli nez dominé par les fleurs et les agrumes, suivi d'une bouche fraîche et légère, en fait un vin tout indiqué pour l'apéro, pour se prélasser au soleil ou pour accompagner une cuisine simple et toute en fraîcheur, comme une salade de fenouil et d'orange.

13,95 $ (13114322) 12,5 % 

Carpineta Fontalpino Chianti Colli Senesi 2016

Encore une expression juste et franche, ce vin issu à 100 % de Sangiovese se présente sous une couleur assez pâle. Un nez où les arômes de cerise, de canneberge et de prune laissent plus de place à ceux d'herbes, de terre, de feuille de thé et de tabac. Archisec, avec un fruit mûr, un caractère végétal savoureux et des tannins fins, assez fermes pour lui permettre de bien vieillir encore de 8 à 10  ans. Tout simplement bon et honnête. Et comme tout bon vin italien, fait pour la table : viandes blanches ou rouges, grillées ou braisées, avec des tomates, des courgettes, des champignons, des herbes.

20,60 $ (10854085) 13 %

Photo fournie par la SAQ

João Portugal Ramos Loureiro Vinho Verde 2016

Nicolas Maillet Mâcon Verzé 2015

Un très beau chardonnay de Bourgogne qui porte les marques de sa situation plus méridionale et d'un millésime chaud, mais sans sacrifier équilibre ni fraîcheur. Nez très charmeur, délicatement beurré, aux arômes de poire bien mûre et juteuse. Une texture ample et caressante en bouche, d'une excellente tenue, avec une légère salinité en finale. Riche et fin à la fois, mais surtout délicieusement savoureux. Pétoncles poêlés, ris de veau ou poissons en sauce lui iront comme un gant. Ou tout simplement un fromage à pâte molle et croûte fleurie et du bon pain.

30,75 $ (11634691) 13,5 %

Chionetti San Luigi Dogliani 2015

Le nebbiolo est considéré comme le roi des cépages du Piémont. Mais il est loin d'en être la seule star ! La région regorge de cépages indigènes tous plus intéressants les uns que les autres. Chez la famille Chionetti, on excelle dans l'élaboration de vins de dolcetto, sur son terroir de prédilection à Dogliani. Comme avec le vin précédent, on est indéniablement en Italie, avec un vin très sec, frais et ferme à la fois. Mais que d'éclat ! Des arômes de fruits rouges et d'herbes incroyablement alléchants, une grande fraîcheur qui lui confère un côté presque gouleyant, mais le tout encadré par des tannins très fins et fermes. Un vin racé qui prouve la grande qualité du dolcetto. Délicieux à table avec des charcuteries, des pâtes sauce ragù ou à la saucisse et aux champignons, un poulet rôti ou braisé. Et saura sûrement très bien vieillir de six à huit ans.

22 $ (12466001) 14 %

Photo fournie par la SAQ

Nicolas Maillet Mâcon Verze 2015

Hatzidakis Santorini Assyrtiko 2016

Il n'en reste déjà plus que dans une cinquantaine de succursales. C'est toujours le cas avec les vins de ce grand producteur de Santorin. Mais je tenais à le signaler, un, pour rendre hommage au grand vigneron Haridimos Hatzidakis qui vient de nous quitter, beaucoup trop tôt, et deux, parce que ce vin est l'essence même de Santorin. Un vin d'une puissance et d'une présence en bouche à faire pâlir de nombreux vins rouges, aux arômes envoûtants et difficiles à décrire, d'agrumes, de pelure de pomme verte, de mer et de volcan, à la bouche ample et pourtant tonique, dotée d'une grande salinité. Sûrement pas au goût de tous, mais une merveilleuse interprétation d'un terroir exceptionnel. Fait pour la table, il brillera avec tout ce qui sent bon la mer mais accompagnera aussi des grillades de poulet ou d'agneau.

28,50 $ (11901171) 13,5 %

Photo fournie par la SAQ

Hatzidakis Santorini Assyrtiko 2016