Les livres anciens sur le vin sont... de véritables machines à remonter le temps. L'un des meilleurs, à ce chapitre, et toujours en vente, est sans contredit Les bons vins et les autres, d'abord paru en 1976 (Seuil), du regretté Pierre-Marie Doutrelant.

D'entrée de jeu, Doutrelant, qui était grand reporter au Nouvel Observateur, explique que «las d'entendre chanter des cantiques», l'envie lui est venue «d'envoyer un coup de pied dans la termitière des poncifs».

Il n'y va pas avec le dos de la cuillère!

L'action  je le répète  se passe au milieu des années 70, il y a donc plus d'une trentaine d'années, et beaucoup de choses ont de toute évidence changé depuis ce temps.

N'empêche, on reste sidéré, encore aujourd'hui, devant les dérives que Doutrelant détaille, souvent avec un humour grinçant.

Exemple, son chapitre sur les vins «rebouteux», ou «médecins», utilisés à cette époque pour «soigner», «remorquer» des vins faiblards.

Au sujet des beaujolais, il cite un courtier de la vallée du Rhône. «Rien de tel qu'un bon côtes-du-rhône de Rasteau pour sauver un beaujolais», signale celui-ci au journaliste.

Puis, à propos des bourgognes rouges (très critiqués en ce temps-là, je le rappelle), Doutrelant affirme que «tous s'accommodent à merveille, par exemple, d'un doigt de châteauneuf-du-pape. Sinon, comment expliquer que sur une récolte de 80 milliers d'hectolitres (...) le quart (...) parte droit en Côte d'Or?».

Il n'est pas tendre non plus pour la Champagne, où, note-t-il, le rendement à l'hectare a triplé depuis 1945 et «flirte avec les 60 hectolitres».

Bordeaux? Les vins de côtes, genre Côtes-de-Bourg, servent bien souvent à «remorquer» des Médocs, soutient-il.

Bref, le grand jeu de massacre, mais portant essentiellement sur les vins français, avec un détour par la Rioja, vignoble qui, alors, vendait «deux fois plus de rioja qu'il ne s'en vendange», selon «deux patrons de bodegas traditionnelles».

Finies, les magouilles? Peut-être moins qu'on ne le souhaiterait, au souvenir, entre autres, de ces exportations vers les États-Unis, il y a quelques années à peine, de bourgognes rouges... qui étaient en fait des vins du Languedoc.

Le chiffre d'affaires mondial du secteur viticole dépasse les 150 milliards de dollars, comme on sait, ce qui explique sans doute bien des choses.

Côtes du Rhône Villages 2009 Rasteau Domaine de Beaurenard,22,45$ (706903), ***1/2,$$1/2, 2011-2014?

Vin de Grenache (80%) et de Syrah (20%), son élevage (compliqué) est fait en partie en cuves, mais aussi en fûts et en foudres. Résultat, un vin bien coloré, dense, relativement corsé, d'une bonne concentration, aux tannins qui n'ont rien d'agressif et dont le généreux bouquet est dominé par des arômes de fruits rouges. Fermente avec uniquement les levures du raisin. Pourrait sans doute se mesurer à des Châteauneufs-du-Pape. 14,5% (211 caisses).

Saint-Chinian 2008 Château Fontanche,13,75$ (11096247), **1/2,$1/2, 2011-2012.

Fort joli vin rouge du Languedoc, de Grenache surtout (70%), ce qu'on détecte en bouche en raison de ses saveurs bien mûres, quasi sucrées, de fruits rouges. Moyennement corsé, peu tannique, il ne manque pas d'éclat. Renferme aussi de la Syrah (20%) et du Carignan (10%). Élevage en foudres. 13% (142 caisses).

Fronton 2009 Mons Aureolus Château Montauriol,19,65$ (851295), ***,$$, 2011-2013.

Curieux vin du Sud-Ouest (France), fait de 50% de Négrette, avec 25% de Cabernet Sauvignon et 25% de Syrah. Élevé en fûts, dont 25% de neufs, son bouquet, de bon volume, aux odeurs rappelant le cigare et la terre fraîche, a quelque chose d'un peu déroutant. Charnu, tannique, quoique sans rugosité, ses saveurs sont conformes à ce qu'annonce le bouquet, avec aussi des arômes un peu pâtisserie dans l'après-goût (le bois). Très bon à sa manière. 13,5% (300 caisses).

Châteauneuf-du-Pape 2008 Domaine La Roquète,41$ (10268406), ****,$$$$, 2011-2018?

Vin d'un domaine appartenant aux frères Brunier, aussi propriétaires du Domaine du Vieux-Télégraphe, assez peu coloré, son séduisant bouquet, aux nuances de fruits rouges, épicé-boisé, mais sans excès aucun, complexe, fait presque... bourgogne! On retrouve en bouche les fruits rouges, sur des tannins veloutés, avec des notes épicées (le bois), et une bonne persistance. Excellent, malgré son importante teneur en alcool. 14,9% (69 caisses)

Hawkes Bay 2009 Pinot Gris Trinity Hall,24,70$ (10959186), ***1/2,$$$, 2011-2012.

La robe de ce vin blanc de Nouvelle-Zélande est dorée, son charmant bouquet, de fruits confits et aux nuances discrètes de pain grillé, donnant l'impression qu'il est un peu boisé, ce qui n'est pas le cas. Plus que moyennement corsé, non boisé (on le réalise une fois qu'on l'a en bouche), équilibré, ses saveurs sont bien affirmées. Très bon. 14% (56 caisses).