Millésime très réussi, aux vins riches, denses et d'une grande pureté pour à peu près tous les vignobles d'Europe, 2005 continue à faire beaucoup parler. 

Bordeaux rouges et blancs, dont les Sauternes, bourgognes des deux couleurs, vins blancs d'Allemagne, etc. - tout frise la perfection en 2005, avec quelques exceptions, notamment l'Alsace, le Piémont et la Toscane.Le millésime qui suit - 2006 - est de toute évidence plus hétérogène.

N'empêche, et comme le montrent des bourgognes blancs, des beaujolais et des rouges du Languedoc 2006 déjà commercialisés sur notre marché, 2006 a manifestement donné lui aussi de nombreux vins de qualité.

Les deux vignobles les plus réputés d'Italie, le Piémont et la Toscane, occupent, dit-on, la position de tête pour ce qui est de 2006. Et prennent donc en quelque sorte leur revanche, après avoir moins bien réussi que d'autres en 2005.

Pour ces deux vignobles, 2006 est jugé en effet supérieur à 2005, alors que c'est le contraire pour à peu près toutes les grandes régions viticoles françaises. Mais comme toujours dans le cas d'un millésime récent, il faudra attendre quelques années (et donc goûter davantage de vins) pour obtenir un portrait plus juste de 2006.

Le tableau ci-contre donne une idée de la qualité d'ensemble de 16 millésimes (2006 à 1991) et de l'état actuel des vins, pour une quinzaine de grands vignobles. Ces indications sont bien sûr d'ordre général, en ce sens qu'il y a toujours des exceptions.Ainsi, même si les bordeaux rouges 1993 sont présentés comme pouvant être «trop vieux» (14 D), sans doute peut-on encore trouver des vins de ce millésime qui tiennent encore la route. Règle générale, cependant, on a tout intérêt à boire sans délai les vins de ce millésime et des autres millésimes risquant d'être sur leur déclin.

«Il vaut mieux boire ses vins trop jeunes que trop vieux», dit-on souvent, et il n'est pas inutile de le rappeler encore une fois.

Trop jeunes, leurs saveurs de jeunes fruits ne peuvent que séduire, alors que les goûts de pruneaux cuits des vins rouges trop âgés, sur leur déclin, ne plaisent qu'à de rares consommateurs.

Même chose pour les blancs, qui, trop vieux, acquièrent des saveurs oxydatives et une lourdeur qui déçoivent immanquablement.

Autre règle qu'on a parfois tendance à oublier: c'est avant tout les meilleurs vins, dont les grands vins, qui tiennent normalement le plus longtemps la route.

L'évolution des millésimes

Une fois en bouteilles, les vins ne cessent d'évoluer, les millésimes se transforment.

Ainsi, pour le Bordelais, on a tout lieu de croire aujourd'hui que 1990, très louangé pendant de nombreuses années, tient nettement moins bien que 1989.

Très grand millésime et dont les vendanges furent parmi les plus précoces du dernier siècle, 1989, au fruit toujours très jeune dans les meilleurs des cas, semble vouloir rester en grande forme pendant encore au moins quelques années.

Autre très grande année, 1986 - à en juger par une bouteille du Pauillac 1986 Château Mouton-Rothschild goûtée à Noël 2007- reste fidèle à sa réputation. (Les millésimes 1986, 1989 et 1990 ne figurent pas dans le tableau.)

Autre millésime qui ne figure pas dans le tableau, 1988 donna de très beaux vins, au potentiel de garde remarquable, dans de nombreux vignobles.

Bu il y a moins d'un an, le Pessac-Léognan 1988 Château La Louvière, qui ne figure pourtant pas parmi les ténors du Bordelais, était ainsi, à 20 ans d'âge, tout à fait délicieux, et à peine évolué.

Goûté et bu celui-là il y a environ un an et demi, le Chambertin Clos de Bèze 1988 Domaine Armand Rousseau, d'une ampleur incroyable, était un véritable monument...

Pour notamment le Bordelais, la Bourgogne et la vallée du Rhône, on peut s'attendre à ce que les 2005 atteignent ce même très haut niveau.

La recommandation de la semaine

Vin provenant d'une île qu'on dit de toute beauté, le Corse 2004 Terra Di Corsica, fait d'un assemblage de Niellucio (50 %), un cépage qu'on dit très proche du Sangiovese, et de Syrah (50 %), d'une couleur pourpre-prune passablement foncée, rappelle un peu par son bouquet, aux notes comme de... tabac de cigare, certains vins de Nero d'Avola de Sicile. Vin plus que moyennement corsé, dont une petite partie (10 %) est élevée en fûts, assez charnu, et aux saveurs de fruits noirs, il est tannique sans l'être exagérément. Fort bon, et à prix correct (657 caisses disponibles).

C, 10668186, 14,45 $, ** 1/2, $ 1/2, 2008-2008.

DÉGUSTÉS POUR VOUS

Vin de Pays d'Oc 2006 C'est la Vie. Curieux vin blanc du Languedoc, non boisé, dans lequel entrent à la fois du Chardonnay et du Sauvignon blanc, mais c'est le Chardonnay qui domine au plan aromatique. Assez léger, ses saveurs sont nettes et accentuées par une certaine quantité de gaz carbonique. Correct et à prix doux (980 caisses). C, 10915298, 13,65$,**,$ 1/2, 2008.

Priorat 2006 Barranc Dels Closos. Vin blanc espagnol du Priorat, d'unebelle couleur or fin, au généreux bouquet de fruits confits marqué par des notes de chanvre (penser à de la toile traditionnelle de tente!). Élaboré avec pas moins de quatre cépages, soit du Grenache blanc (50%), du Macabeo, ou Viura, dit-on dans la Rioja (30%), du Pedro Ximénez (17%) et du Muscat (3%), c'est un vin ample, aux saveurs relevées, avec beaucoup de caractère et des notes mielleusesdans l'après-goût. Insolite et impeccable à sa façon (193 caisses). S, 10857 729, 21,80$,***,$$ 1/2, 2008-2010.

Touraine 2007 Sauvignon blanc Guy Allion. Vin blanc de Sauvignon blanc de la Loire, aux arômes évoquant la pomme, délicat, simple et facile. Une nouvelle inscription au répertoire général (207 caisses). C, 10327 841, 14,90$,**,$ 1/2, 2008.

Cahors 2005 Domaine de Chantelle. Vin de Cahors... on ne peut plus Cahors, quasi opaque, et au bouquet large, de fruits noirs, épicéboisé et aux notes de pain grillé (le bois). Concentré, compact, ses saveurs ont beaucoup d'éclat, le tout assis sur des tannins solides. Carré, savoureux, mais il faut aimer le genre (121 caisses). S, 866 392, 18,60$,***,$$, 2008-2012.