Dieu du ciel! fête en grand ses 20 ans d'existence aujourd'hui même. Retour sur l'histoire de l'un des fleurons du monde brassicole québécois.

Il en a coulé, des brassées sous les ponts, depuis la fondation de la microbrasserie Dieu du ciel! en septembre 1998, quand un trio de passionnés, composé de Stéphane Ostiguy, Jean-François Gravel et Patricia Lirette, s'est jeté à corps perdu dans l'aventure. Les deux premiers, toujours aux commandes aujourd'hui, ont alors abandonné leurs études en biologie et leurs dégustations de brassins maison au laboratoire pour ouvrir un nouveau pub, inspirés par Le Cheval blanc. On était encore loin de l'effervescence brassicole que l'on connaît aujourd'hui au Québec. «La demande était là», pourtant, se rappelle Stéphane Ostiguy, l'un des copropriétaires.

Après avoir cherché un local pendant presque un an, le Dieu du ciel! a enfin trouvé son paradis dans l'avenue Laurier, à l'angle de Clark (près de Saint-Laurent), où sont installés trois fermenteurs. La vision?

«On voulait tout miser sur la qualité de la bière, ne faire aucun compromis face à la tentation de créer des choses faciles à boire, et proposer des styles différents, provenant d'Allemagne, d'Angleterre ou de Belgique. Depuis 20 ans, on n'a jamais vraiment dérogé à cette règle-là.»

Et preuve en est que les brasseurs préféraient manquer de bière, quitte à n'en proposer qu'une seule sorte le lendemain de grosses soirées, plutôt que d'accélérer les processus de fermentation en cours.

La réponse des amateurs de mousse a perduré et Dieu du ciel! a signé des créations devenues des classiques, comme le stout au café Péché Mortel ou la plus délicate Rosée d'hibiscus.

Victime de son succès, la microbrasserie n'a eu d'autre choix que de croître en inaugurant un second pub et une structure d'embouteillage à Saint-Jérôme, en 2007. Aujourd'hui, ce sont 600 hectolitres annuels qui sortent des fermenteurs de l'avenue Laurier, et 15 000 hectolitres produits à Saint-Jérôme.

En 2018-2019, pas de nouvelle expansion en vue, mais la brasserie s'offre tout de même un cadeau d'anniversaire. «Il y a beaucoup de choses qui font leur âge dans le pub, on va y faire des rénovations complètes et relooker le tout», annonce M. Ostiguy. Des travaux qui pourraient être lancés cet hiver ou l'hiver prochain.

Fort de son expérience, quel regard ce pionnier a-t-il sur le monde brassicole actuel? «Depuis trois ou quatre ans, ça se développe rapidement, chaque région a sa brasserie et ça amène beaucoup de concurrence, notamment sur les tablettes. Il y a des tendances, même si la IPA s'est installée depuis un certain temps. C'est un peu devenu la base: tout le monde recherche la bonne IPA de chaque brasserie!», conclut le cofondateur.



Trois bières marquantes

LA PÉCHÉ MORTEL

«C'est elle qui nous a mis sur la map en 2002-2003», se souvient Stéphane Ostiguy, à propos de cette bière propulsée par RateBeer, où elle a maintenu sa popularité au fil des ans. Stout au café aux accents torréfiés, elle est très caractérielle (9,5 %).

LA MORALITÉ

«Elle a eu un gros impact, on a commencé à l'embouteiller en 2013. C'est notre meilleur vendeur aujourd'hui», explique M. Ostiguy. Originellement, cette IPA américaine à l'amertume tranchante avait été créée en collaboration avec John Kimmich, de la brasserie vermontoise The Alchimist.

SOLSTICE D'ÉTÉ AUX FRAMBOISES

Initialement brassée une ou deux fois par été, cette bière à l'acidité affirmée provoquait des razzias complètes dans les dépanneurs. «C'est une bière longue et techniquement difficile à brasser. Il y a énormément de framboises à rajouter en fin de processus, on a même dû adapter nos équipements», précise M. Ostiguy.

L'institution voit grand pour célébrer ses 20 ans

Aujourd'hui, la brasserie souffle ses 20 bougies. Le temps d'une journée, Dieu du ciel! deviendra également Dieu du sous-sol!, puisque l'étage inférieur de l'église Saint-Enfant-Jésus du Mile End, à un jet de pierre du pub, sera loué pour la journée. Une partie à l'extérieur de l'édifice sera aussi investie.

«Nous avons invité une vingtaine de brasseries du Québec et trois du Vermont. On s'est adressé à ceux avec qui on a développé une belle amitié, pour offrir une belle sélection de bières», indique Stéphane Ostiguy. Ainsi, on trouvera 85 bières à déguster et une carte gastronomique alléchante.

Pour l'occasion, la brasserie ressort sa bière d'anniversaire, la Quintessence, brassée seulement tous les cinq ans. «C'est une bière forte, une hybride entre une scotch ale et un barley wine. On lui fait passer huit mois dans des barils de chêne qui viennent de servir pour la liqueur d'érable», précise M. Ostiguy.

Nouveauté en vue: la On rajeuNEIPA, qui se veut dans la lignée des New England IPA, «dans la tendance actuelle», selon M. Ostiguy. Comme quoi on peut prendre de la bouteille tout en restant dans le vent.

L'entrée est gratuite, les participants ne paient que ce qu'ils consomment. Pas de réservation ni de prévente. Le pub (100 places) servira de 13 h à 3 h du matin, l'église (700 places) sera ouverte de 13 h à 1 h du matin.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, LA PRESSE

Stéphane Ostiguy, qui avait entamé un doctorat en biologie, a laissé tomber ses études pour cofonder la brasserie. Vingt ans plus tard, on peut dire que le pari est réussi.