Hennessy, numéro un mondial du cognac, met les moyens pour accroître sa production et répondre à la demande grandissante de ses eaux-de-vie, très prisées des Américains et des Asiatiques mais dont l'appellation AOC n'est pas extensible à merci.

Hennessy, c'est le «H» dans LVMH. La vénérable maison de plus de 250 ans - entrée dans le giron du géant mondial du luxe en 1987 - a vendu l'an dernier 83,8 millions de bouteilles de cognac, dont 53% aux États-Unis et 25% en Asie (hors Japon). Mercredi, un nouveau site d'embouteillage et de logistique a été inauguré à Salles-d'Angles, à quelques kilomètres de Cognac, pour désengorger le bâtiment historique construit il y a 25 ans.

Ultra-moderne, avec vue sur les vignes, l'usine va permettre de renforcer les capacités de production de la maison, qui peine à répondre à l'essor de la demande.

«Ce n'est pas un mauvais problème à avoir, mais nos stocks sont très bas et on n'arrive pas à fournir. On manque de bouteilles et de contenu, compte tenu du succès de nos produits notamment outre-Atlantique ou en Chine», a résumé Bernard Arnault, PDG de LVMH, qui a symboliquement lancé l'activité de la nouvelle ligne de conditionnement.

Elle sera spécialisée dans les «grandes séries» et la catégorie VS (Very Special, au moins deux ans d'âge), la plus concernée par les problèmes de stocks et très appréciée du marché américain, alors que les Asiatiques préfèrent le VSOP (au moins quatre ans d'âge) ou le XO (au moins dix ans).

L'an prochain, Hennessy devrait atteindre les 8 millions de caisses vendues (soit 96 millions de bouteilles de 70 cl). La mise en place d'une seconde ligne d'embouteillage, fin 2018, aux côtés de celle inaugurée mercredi devrait permettre de monter à 10 millions «d'ici huit à dix ans», précise à l'AFP le PDG du groupe, Bernard Peillon.

Volumes quadruplés en 25 ans

«En 25 ans, la maison aura quadruplé son activité en volumes», résume-t-il.

L'or brun charentais est protégé par une appellation d'origine contrôlée (AOC): son vignoble s'étend actuellement sur 75 000 hectares et Hennessy travaille avec quelque 1600 viticulteurs indépendants qui lui fournissent l'eau-de-vie après distillation.

«On va travailler avec nos partenaires viticoles pour augmenter nos capacités de production de vigne puisqu'il y a un certain nombre d'hectares dans l'appellation qui ne sont pas encore utilisés en vignoble et qu'on va essayer de développer de façon à pouvoir augmenter la production», a affirmé Bernard Arnault.

La profession AOC dans son ensemble a déjà obtenu de pouvoir planter 800 hectares supplémentaires en 2017, alors qu'elle en avait demandé 2300. Et pour 2018, cette surface supplémentaire passera à 1540 hectares.

Reste à savoir si cela suffira pour satisfaire la demande croissante en cognac, sachant qu'il faut sept ans avant qu'un nouveau pied ne produise. Sans compter les aléas climatiques: «On a perdu cette année 25 000 hectares sur tout le vignoble à cause du gel», indique M. Peillon.

Mais sa maison n'est pas inquiète: «on anticipe en se disant qu'il y aura donc moins d'eaux-de-vie à monter en vieillissement. Et pour ne pas avoir de trous dans les stocks, on peut vendre un peu moins pour lisser les ventes dans le temps», résume Bernard Peillon.

Mais bonne ou mauvaise récolte, certaines choses ne changeront jamais: chaque jour à 11h, le comité de dégustation d'Hennessy se réunit pour goûter 50 eaux-de-vie, soit un total de 10 000 à l'année.

«On n'en retient en moyenne que 10 par an, dont on sent qu'elles ont un potentiel qui s'exprimera en vieillissant. L'assemblage c'est pas de la magie. Une petite centaine d'eaux-de-vie, d'au moins 30 ans, ont par exemple été mélangées pour obtenir Paradis Impérial», cuvée d'exception de 2011, souligne Renaud Fillioux de Gironde, maître-assembleur d'Hennessy, poste occupé par sa famille depuis huit générations.