Les distilleries québécoises lancent en cette fin d'été quelques nouveaux produits sortis de leurs alambics. Nous en avons dégusté trois sur lesquels vous pourrez mettre la main à la SAQ.

Un gin pour le 375e anniversaire

La distillerie montréalaise Cirka s'est sentie inspirée par le 375e anniversaire de Montréal. Paul Cirka et son adjointe à la distillation, Isabelle Rochette, ont élaboré un Old Tom Gin, le premier au Québec. Ce style de gin, populaire au XIXe siècle, se distingue par un léger ajout de sucre. Il est un peu tombé dans l'oubli au cours des dernières décennies, mais fait un retour grâce à la montée des spiritueux artisanaux.

Le Gin375 de Cirka est sucré au miel printanier d'Anicet. Il s'agit d'une recette complètement distincte de celle du Gin Sauvage de la même distillerie, bien qu'elle suive elle aussi le principe «du grain à la bouteille», avec une base de maïs québécois non OGM.

Les aromates choisis proviennent à 100 % du Québec, contre 80 % pour le Sauvage. La menthe, l'angélique, le poivre crispé, entre autres, sont ajoutés par distillation. La rose sauvage, la canneberge et les griottes sont ensuite macérées dans le distillat et confèrent au produit une belle teinte rosée.

En se concentrant, à la dégustation, on peut pratiquement distinguer chacun des ingrédients qui composent l'exceptionnel produit. Le nez est beaucoup sur la menthe. En bouche, l'attaque est très florale et poivrée, puis c'est la menthe qui reprend le dessus en finale, pour une belle et complexe longueur. À déguster tel quel, mais évidemment délicieux en cocktail!

Gin375 de la distillerie Cirka, édition limitée, 375 ml, 40 % alc./vol., 37,75 $, code SAQ 13384365

Champignons de Gaspésie

Après le gin au panais (Piger Henricus), le gin aux algues (St-Laurent), voici le gin aux champignons! Il vient de la microdistillerie O'Dwyer, en Gaspésie. «Une des règles non écrites du gin veut qu'on fasse son gin avec les ingrédients qui poussent dans les alentours», explique Frédéric Jacques, le distillateur.

Par chance, son partenaire d'affaires, Michael Briand, habite juste à côté de chez Gérard Mathar et Catherine Jacob, de l'entreprise Gaspésie sauvage. Les champignons - des chanterelles surtout - seraient si abondants dans leur coin qu'on en ramasse facilement plusieurs kilos à l'heure.

Radoune est un gin distillé. La base d'alcool neutre n'est pas faite sur place, mais elle repasse dans l'alambic. Un jour, O'Dwyer aimerait produire son propre alcool neutre, à partir de betteraves ou de pommes de terre, peut-être.

En distillation, la base sans goût s'imprègne des racines, des épices et des quatre variétés de champignons qui servent d'«assaisonnement», puis ressort en un gin bien parfumé.

Il a une attaque puissante de genièvre gaspésien et d'arômes floraux et résineux, qui ne sont pas l'oeuvre de fleurs, mais sans doute celle de l'épice forestière qu'est le poivre crispé. Le côté champignon arrive subtilement en fin de bouche, plus torréfié que terreux. Très, très intéressant.

Gin Radoune de la distillerie O'Dwyer, 750 ml, 43 % alc./vol., 42,50 $, code SAQ 13 305 090

PHOTO DAVID BOILY, LA PRESSE

Gin Radoune de la distillerie O'Dwyer, 750 ml, 42,50 $

Un rhum à la mélasse

Non, la mélasse ne vient pas d'ici, mais le nouveau rhum Sainte-Marie est distillé tout près, dans le quartier Rosemont. Son nom fait référence au Faubourg Sainte-Marie, ancien quartier de Montréal aussi appelé Faubourg à m'lasse. La mélasse, moins coûteuse que le sucre, à l'époque, était associée aux quartiers ouvriers comme Sainte-Marie.

Le rhum est élaboré à la distillerie Wolfelsberger, qui fait également la vodka White Keys. C'est une collaboration entre le «bouilleur de cru» Lilian Wolfelsberger, Sylvain Lague et des partenaires. M. Lague est président cofondateur de White Keys et ambassadeur de marques (spiritueux) chez Élixirs. Il est particulièrement fier de ce nouveau produit beaucoup plus brut et «vrai» que la grande majorité des rhums épicés trop sucrés.

Lilian Wolfelsberger est un homme patient et minutieux. Il laisse la mélasse verte du Guatemala fermenter pendant cinq jours. Il la distille ensuite une première fois, bien doucement, puis la fait repasser dans son alambic charentais, pour atteindre un degré d'alcool supérieur. Le distillat est ensuite mis à vieillir en fûts pendant un an. Après, on macère avec du cantaloup et des canneberges du Québec, puis, en deuxième macération, avec du piment de la Jamaïque, du poivre de Sichouan et de l'anis étoilé.

Le résultat est un bel alcool brun aux accents cuivrés. En bouche, le Sainte-Marie a une présence inouïe, tant en texture qu'en goût. Si vous n'aimez pas la mélasse, oubliez ça ! Mais si le goût de la tire Sainte-Catherine vous fait l'effet d'une madeleine de Proust, en voici une version adulte, plus épicée, moins sucrée.

Un seul petit bémol: la finale. Elle est un peu médicinale, pour ne pas dire métallique. Comme le produit a une incroyable longueur en bouche, ça s'étire sur plusieurs minutes. «C'est l'anis étoilé», affirme le distillateur. Parions qu'en daiquiri ou sur glace avec un zeste d'orange, cette caractéristique (qui ne semble pas déranger tout le monde, cela dit) s'effacerait complètement.

Sainte-Marie, rhum épicé montréalais, 750 ml, 45 % alc./vol., 38 $, code SAQ 13448162

PHOTO DAVID BOILY, LA PRESSE

Sainte-Marie, rhum épicé montréalais, 750 ml, 38 $