Pour les fêtes, les papilles en quête d'originalité peuvent se tourner vers le «brut nature» ou «zéro dosage»: s'il est encore une niche, de plus en plus de marques produisent ce champagne au goût acéré, réalisé sans adjonction de sucre.

Version extrême d'une tendance à produire des champagnes moins sucrés, le «brut nature» se fait sans la liqueur de dosage habituellement ajoutée avant le bouchage de la bouteille. Il contient moins de 3 grammes de sucre par litre, contre moins de 12 g/l pour le «brut», qui représente toujours 95 % des ventes.

«Il y a une tendance générale vers plus de naturel, moins de maquillage. Pour les vins non dosés, le discours est de dire: on vous présente un vin de champagne qui correspond exactement à ce que les raisins ont produit», explique à l'AFP l'expert Thierry Desseauve, coauteur avec Michel Bettane du guide sur le vin Bettane & Desseauve.

Mais attention à la sélection des raisins, souligne le dégustateur, regrettant que certaines maisons se mettent au zéro dosage uniquement pour faire «branché», sans sélectionner de raisins suffisamment mûrs. «Si les raisins ont une certaine verdeur et qu'il n'y a plus de sucre pour l'édulcorer, cette verdeur peut apparaître extrêmement brutalement», poursuit-il, jugeant que «beaucoup de zéro dosage ne sont pas forcément des vins très intéressants».

Présente au salon «Le Grand Tasting» organisé par Bettane & Desseauve à Paris fin novembre, la maison Ayala propose un brut nature depuis 2005-2006, à hauteur d'environ 60 000 bouteilles par an, soit un peu moins de 10 % de sa production.

«Quand on met du dosage, on peut arrondir les angles, masquer les imperfections. Là, on ne peut rien cacher, c'est le vin nu, si ce n'est pas parfait on va le voir tout de suite», souligne Philippe-Alexandre Bernatchez, responsable marketing chez Ayala.

«C'est une décharge d'électricité sur les papilles. C'est un style particulier, quand on le fait goûter, c'est assez clivant, les gens aiment ou n'aiment pas», reconnaît-il. «Le brut nature, c'est le champagne pour tout ce qui est iodé, les huîtres, les sushis, les oursins, le caviar». La bouteille est proposée à 33 euros, soit trois euros de plus que la cuvée classique.

Chez Laurent-Perrier, le brut nature, déjà développé à la fin du XIXe siècle, a été relancé en 1981 pour accompagner le mouvement de la Nouvelle cuisine. Réalisé avec 50 % de chardonnay et 50 % de pinot noir, «c'est un vin qui demande à être expliqué, un vin de gastronome», décrit Anne-Laure Domenichini, chargée de la communication de la maison.

Le designer Philippe Starck a quant à lui collaboré avec Louis Roederer pour créer un brut nature millésimé 2006, avec environ deux tiers de pinot noir et un tiers de chardonnay, lancé en septembre.

Drappier, une entreprise familiale, propose depuis 17 ans du brut nature, qui représente environ 20 % de sa production, soit jusqu'à 300 000 bouteilles, et augmente chaque année.

«On a fait ce brut nature au départ pour notre consommation personnelle. Maintenant c'est une de nos cuvées phares», dit Charline Drappier, petite-fille du PDG. Il a la particularité d'être réalisé exclusivement à partir de pinot noir et se décline depuis trois ans en version vinifiée sans sulfite, mais également en rosé, obtenu par macération.