Les vignerons et agriculteurs de l'Aude ainsi que nombre d'élus régionaux sont mobilisés contre le choix d'un cru chilien comme vin officiel de la Grande Boucle 2016 après deux ans de présence de la cuvée sud-américaine dans l'indifférence générale

Premier à crier au scandale: le syndicat des vignerons de l'Aude quand il a, dit-il, appris que la cuvée Bicicleta du Chilien Cono Sur avait été sélectionnée jusqu'en 2017 parmi les partenaires du Tour par l'organisateur Amaury Sport Organisation (ASO).

Selon le site internet de Cono Sur, ce vin était déjà présent sur la Grande Boucle en 2014 lors des trois premières étapes au Royaume-Uni. Il était aussi au départ l'an passé aux Pays-Bas puis lors des étapes en Belgique.

Du 2 au 24 juillet en France, loi Evin oblige, aucune boisson alcoolisée ne sera visible sur le territoire pour cette 103e édition du tour. Ce n'est pas le cas à l'étranger, dans les étapes suisses, andorranes et espagnoles.

«On se sent humiliés», a affirmé Frédéric Rouanet, président du syndicat des Vignerons de l'Aude pour lequel en France, «le vin c'est sacré». «Nous faisons des vins prestigieux et le Tour fait partie de notre patrimoine culturel et sportif, c'est une vitrine, notre vin doit y figurer», a-t-il insisté.

Même colère chez les Jeunes Agriculteurs (JA) qui jugent ce choix «inacceptable». «Nous connaissons la difficulté à laquelle font face tous les agriculteurs. (...). Il faut que le Tour de France soutienne les producteurs par des partenariats avec des produits français et non étrangers», ont-ils souligné.

«Face à cette humiliation», les vignerons de l'Aude envisagent de bloquer la cuvée 2016 «sur tout le territoire français, à des points stratégiques». Ils appellent les «autres régions productrices de vin à rejoindre» le mouvement et annoncent une réflexion des interprofessions du vin au Salon de l'agriculture à Paris pour trouver une riposte.

Dégustation

Les JA ont pensé à une action similaire de blocage si la direction du Tour ne revient pas sur ce partenariat. «Si les dirigeants du Tour persistent, le syndicat s'alliera pour bloquer le Tour de France sachant qu'il passe encore sur nos terres», ont-ils prévenu, en référence à l'étape Carcassonne-Montpellier.

Même dans l'Hérault, huit députés ont écrit «leur colère» au ministre de l'Agriculture Stéphane Le Foll alors que le peloton sillonnera le coeur du vignoble languedocien. Ils lui demandent de prendre «une «position affirmée» face à un éventuel risque de perturbation du déroulement de l'épreuve.

Le sénateur PS de l'Aude Roland Courteau a «alerté» le patron du tour Christian Prudhomme de «l'incompréhension» suscitée par la présence du vin chilien.

«La volonté de défendre le "Made in France" a vite été oubliée chez ASO, rattrapée en cela par l'aveuglement du seul appât du gain... mirifique», a raillé le député RBM, Gilbert Collard.

La présidente PS de la région Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées, Carole Delga, a aussi «déploré ce choix» qui «a choqué nombre d'acteurs de cette filière si importante pour l'économie de notre région et de notre pays».

Mais comme, selon elle, les «conditions contractuelles ne permettent pas de revenir» sur le contrat, Mme Delga a proposé à M. Prudhomme une alternative: organiser à Carcassonne, le 13 juillet, une dégustation des meilleurs vins de la région auprès des invités et partenaires du Tour. Et pour convaincre Prudhomme, elle lui a envoyé six bouteilles de vin issues de quatre départements de la région que le Tour 2016 traversera (Gers, Aude, Hérault, Gard).

ASO, dont les responsables du Tour de France n'ont pu être joints, est aussi l'organisateur du Dakar, épreuve où le Chili occupe généralement une place importante depuis 2009 après le transfert de l'Afrique vers l'Amérique du Sud. En raison des catastrophes climatiques, le Chili a renoncé à accueillir le rallye-raid 2016.