L'investisseur chinois qui a provoqué l'émoi en Bourgogne (est de la France) en s'offrant le château de Gevrey-Chambertin est un passionné de vin, ne nourrissant d'autre ambition que de redonner aux vignes leur «ancienne gloire», assurent ses amis et des spécialistes.

Louis Ng Chi Sing a acquis le château de Gevrey-Chambertin, propriété classée du XIIe siècle, pour 8 millions d'euros, une vente record qui fait craindre aux viticulteurs une «déferlante» d'investisseurs étrangers en Bourgogne, avec pour conséquence une flambée des prix du foncier.

L'investisseur asiatique, proche collaborateur du magnat Stanley Ho à Macao, capitale mondiale des jeux d'argent, a montré patte blanche en s'engageant à faire rénover le château par «un architecte français du Patrimoine» et à employer «des entreprises régionales spécialisées dans les bâtiments historiques».

«Notre ambition est de restaurer cette ravissante propriété dans son ancienne gloire», a assuré Louis Ng dans un message écrit à l'AFP.

«Avec le temps, j'espère que mes nouveaux voisins bourguignons viendront eux aussi apprécier ma sincère passion pour les grands vins comme en témoigneront les aménagements positifs que je veux apporter au château de Gevrey-Chambertin», a plaidé cet homme peu disert qui fuit la publicité.

Il précise s'être assuré l'expertise de Christian Laporte, architecte du patrimoine, et celle du producteur Eric Rousseau, du Domaine Armand Rousseau, pour s'occuper du château et de ses vignes.

Jeannie Cho Lee, une oenologue de Hong Kong qui le connaît bien, confirme sa «passion sincère» et déjà ancienne au vin.

Louis Ng - qui vit à Hong Kong mais possède également la nationalité portugaise - est un «collectionneur» riche d'une «grande expérience du vin», assure-t-elle à l'AFP. «C'est l'un des collectionneurs les plus passionnés et connaisseurs d'Asie, il aime et il achète du vin depuis plus de vingt ans».

Le château de Gevrey-Chambertin, avec deux hectares de vigne qui donnaient 10 à 12 000 bouteilles par an, est la première acquisition chinoise de vigne en Bourgogne.

Dans le vignoble bordelais en revanche, plus d'une vingtaine de propriétés sont d'ores et déjà passées sous la coupe de fortunes chinoises, et ce nombre devrait être porté à 30 fin 2012, selon les experts.

Jean-Michel Guillon, président du syndicat viticole de Gevrey-Chambertin, avait mis 5 millions sur la table avec des partenaires locaux pour acquérir la propriété, évaluée à 3,5 millions. Insuffisant pour l'emporter.

Pour Jeannie Cho Lee, la méfiance à l'égard des Chinois fait écho à la fraîcheur avec laquelle les Japonais, en leur temps, avaient été reçus dans les chais.

«Les Japonais ont été les premiers à s'intéresser au vin dans les années 1980 et 1990. A l'époque, ça avait créé des remous parce que les Japonais commençaient à acheter des propriétés à Bordeaux et à investir dans des domaines en Bourgogne», rappelle-t-elle.

«C'est la même chose avec les Chinois aujourd'hui».

Davis Fong, directeur de l'Institut d'études du jeu à l'Université de Macao, confirme de son côté l'extrême discrétion de Louis Ng, associé de longue date de Stanley Ho dont la société SJM Holdings gère 17 casinos dans l'ancienne colonie portugaise.

Le tycoon a eu la haute main sur l'empire du jeu sur le territoire autonome de Chine méridionale, le seul où cette activité soit autorisée, jusqu'à son ouverture à la concurrence et l'arrivée massive des investisseurs étrangers en 2002.

Depuis, Macao, à une heure de ferry de Hong Kong, est devenue la capitale mondiale des jeux d'argent, avec un chiffre d'affaires cinq à six fois supérieur à celui de Las Vegas.

Ng est plus particulièrement chargé des VIP au sein de SJM, selon M. Fong.

«Il est très important, mais ce qu'on sait de lui publiquement est très limité. Je sais seulement que c'est un type qui compte, un décideur», confie-t-il.

Louis Ng se définit, chez lui, comme un «ambassadeur des vins français de classe mondiale».