« Terroir ». Voilà l'un des mots les plus utilisés et mal compris du vocabulaire du vin.

Appliqué au monde viticole, le terroir, dans son sens le plus strict, désigne l'environnement physique dans lequel la vigne est cultivée : beaucoup plus que les sols, il inclut aussi le climat, l'ensoleillement et la topographie. Tous ces facteurs réunis font d'un vignoble un endroit unique. Et les vins qui en sont issus auront des caractéristiques particulières qu'ils n'auraient pas s'ils provenaient d'ailleurs. C'est ce que j'appelle « des vins qui ont la gueule de l'endroit ».

On parle aussi souvent de parcelles, parce qu'un vignoble peut être très vaste et comprendre plusieurs terroirs. Les vignobles sont donc fréquemment divisés en parcelles, qui ont chacune un terroir différent. Ces divisions sont faites, la plupart du temps, justement parce qu'on remarque des différences dans les vins qui en sont issus.

Ce n'est pas si fou après tout, pensez-y : avez-vous déjà, en jardinant, réalisé que vos tomates (ou vos haricots ou vos courgettes) ne goûtaient pas la même chose lorsqu'elles étaient cultivées à différents endroits ? Qu'elles poussaient mieux ou moins bien ?

À la définition stricte de terroir, certains ajoutent aussi le facteur humain. Non pas les interventions humaines quotidiennes à la vigne et au chai, mais les traditions bien établies. Une façon traditionnelle de conduire la vigne, par exemple, comme un volet culturel à la notion de terroir, si on veut.

Bref, un terroir est un ensemble de conditions naturelles qui confèrent au vin un caractère particulier, qui ne peut être reproduit ailleurs. Le critique américain Matt Kramer l'a bien résumé en utilisant le terme « somewhereness » pour expliquer le mot « terroir ».

Ce qui ne veut pas dire que deux vins identiques ne peuvent pas provenir d'endroits différents. Vous pouvez en effet embaucher un oenologue et lui dire exactement ce que vous voulez comme vin : sa couleur, ses arômes, ses goûts, sa texture. Et il vous le produira sur mesure. C'est ce qu'on appelle un vin technologique : il ne doit pas ses propriétés à son terroir, mais plutôt, donc, à la technologie. Par diverses manipulations, à la vigne et au chai, on efface les caractéristiques propres au terroir et on produit un vin façonné selon les désirs du vigneron.

Bien entendu, il n'y a pas que des vins de terroir ou technologiques. Plusieurs vins tombent quelque part entre les deux styles : il en va de la volonté et des objectifs du vigneron.

QUEL EST LE MEILLEUR ?

Un vin de terroir exige une attitude de laisser-faire ou de non-interventionnisme : interférer le moins possible avec les conditions naturelles de son vignoble ainsi qu'avec les vinifications, pour laisser le terroir s'exprimer. Ça semble assez simple, mais c'est probablement ce qu'il y a de plus difficile à accomplir. Parce qu'il est plus facile, et plus rassurant, de tout contrôler. Et ce n'est pas parce qu'on respecte le terroir qu'on fera nécessairement de grands vins. Encore faut-il que ce soit un terroir propice à la viticulture et que le vigneron choisisse les cépages qui y sont adaptés.

Est-ce qu'un vin de terroir est meilleur qu'un vin technologique ? Ça dépend de ce que recherche le consommateur. Si vous recherchez avant tout la constance et que vous n'aimez pas les surprises, vous serez probablement satisfaits avec des vins technologiques. Si, par contre, le goût est pour vous une façon d'explorer le monde, que la découverte de nouvelles saveurs vous enchante, alors les vins de terroir vous parleront davantage.

Je me souviendrai toujours d'une conversation à ce sujet avec Patrick Baudouin, vigneron dans la Loire. Ardent défenseur de la notion de terroir, il disait que les vins technologiques ont bien sûr leur place. Ils ne nous transportent pas comme peuvent le faire les vins de terroir, ils ne nous emmènent pas plus loin que le bout de la table, mais au moins, ils font sourire la voisine d'à côté.

La notion de terroir, et ses liens directs avec le vin, reste un sujet encore très débattu, et loin d'être parfaitement compris. Mais le mot est porteur, fait vendre, c'est vrai, et certains l'utilisent impunément à toutes les sauces. Au point où on en vient presque à se méfier. Souvent, d'ailleurs, ceux qui l'utilisent le plus sont ceux qui en ont le moins.

Photo fournie par la SAQ

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