L'automne dernier, notre journaliste a visité des vignobles de la Loire et de la Bourgogne avec un petit groupe de sommeliers québécois. Ces grands passionnés du vin ont bien évidemment eu des coups de coeur. Aujourd'hui, celui de Simon Perrotte, sommelier du Rouge Gorge, pour Olivier Lamy, le Bourguignon qui remet tout en question.

La famille Lamy travaille la vigne à Saint-Aubin depuis 1640. C'est le père du vigneron actuel qui a créé le Domaine Hubert Lamy, en 1973. Olivier l'a rejoint en 1995, après des études de vinification et de viticulture et commercialisation du vin.

Vingt ans plus tard, le Domaine Hubert Lamy est actif dans 20 appellations de Bourgogne, sur 18,5 hectares répartis à Saint-Aubin, Puligny-Montrachet, Chassagne-Montrachet et Santenay, quatre villages de la côte de Beaune. La maison produit 110 000 bouteilles par an, soit 80 % de blanc (chardonnay) et 20 % de rouge (pinot noir).

En prenant la relève, Olivier Lamy a décidé de remettre certains principes en question, à la vigne comme au chai. Il a par exemple décidé de tailler sa vigne en utilisant une méthode moins agressive, populaire chez les vignerons qui pratiquent la biodynamie, soit la taille Guyot-Poussard.

C'est ce côté curieux, ouvert, expérimental du vigneron bourguignon qui a impressionné Simon Perrotte. « Lorsqu'on est sommelier, on se fait raconter des histoires de peur sur les vignerons bourguignons, raconte-t-il. Ils sont dépeints comme étant les gardiens de la tradition, qui ne veulent pas partager leur savoir. En Bourgogne, ils n'ont rien à vendre, alors ils n'ont pas à se fendre en quatre pour être accueillants. »

Olivier Lamy, lui, a reçu le petit groupe de sommeliers avec franchise et générosité. Après avoir fait goûter ses 2014 directement des barriques, il a mis quelques bouteilles dans un panier et hop ! dans les vignes qui surplombent le village de Saint-Aubin. C'est là, dans le premier cru nommé « Derrière chez Édouard », que des Québécois émus ont grignoté les derniers fruits encore accrochés aux plants, en sirotant un verre de « Grand vin de Bourgogne ».

Les vins dégustés par Simon Perrotte

• Chassagne-Montrachet Le Concis du Champ 2013 (vin blanc), 13 % alc./vol, 12680664, 80$

• Puligny-Montrachet Les Tremblots 2013 (vin blanc), 13 % alc./vol., 12676753, 79$

(SAQ Signature et saq.com seulement, quantités très limitées)

PHOTO FOURNIE PAR LE PRODUCTEUR

Chassagne-Montrachet Le Concis du Champ 2013 (vin blanc), 13 % alc./vol, 12680664, 80$.

« En Bourgogne, on s'est fait dire que 2013 avait été un millésime froid. C'est dans ces années plus difficiles que le travail du vigneron peut briller, déclare le sommelier, avant de goûter aux deux vins que la SAQ Signature recevait la semaine dernière. De plus, le chardonnay est un cépage poreux, qui prend son caractère du sol, du bois et de la main du vigneron. »

Malgré leur prix, qui peut paraître exorbitant pour le commun des mortels, les deux cuvées ne sont pas issues des appellations les plus prestigieuses de la maison, mais ce sont néanmoins de belles parcelles au pied des grands crus Chevalier-Montrachet et Bâtard-Montrachet.

Le premier des deux vins est tout en fraîcheur, avec son bouquet d'agrumes et d'herbe fraîchement coupée. Le bois est présent, mais sans le côté vanillé. « Même si les notes grillées de jeunesse et d'élevage sont encore là, le Chassagne a une acidité très vive, une finesse qui en font un vin tout à fait intéressant à boire maintenant, estime le sommelier. Il pourrait aussi bénéficier de vieillir deux ou trois ans, pour que de nouveaux arômes se manifestent. »

Le côté crayeux du vin ne manque jamais de ramener Simon à un chapitre de son enfance. « Mes parents m'avaient inscrit à la gymnastique. Ça n'a pas duré longtemps, mais je n'oublierai jamais l'odeur de la craie qu'il fallait frotter sur ses mains. »

Le Puligny-Montrachet Les Tremblots est plus riche, plus rond, avec une finale de caramel écossais. « Celui-ci aurait avantage à vieillir. La grosse matière cache la finesse des arômes. Il est un peu gêné, mais sera excellent dans trois ou quatre ans. »

Au final, le sommelier estime que les vins sont « très beaux et pas du tout fermés, malgré leur jeunesse ».

Qui est Simon Perrotte?

Le sommelier sans prétention, musicien à ses heures, aime dire qu'il déguste « avec le coeur ». D'ailleurs, le vin et lui, c'est une histoire d'amour qui dure depuis longtemps. Étudiant en histoire de l'art, il travaillait comme suiteur dans un petit bistro français, avant de se résoudre à plonger à fond dans sa passion. En cours du soir, il a étudié la sommellerie à l'ITHQ, tout en dégustant « des tonnes de vins » avec ses camarades !

La bière ne lui est pas non plus étrangère, puisqu'il a été gérant du Broue Pub Brouhaha pendant quatre ans, en pleine période d'explosion de la microbrasserie québécoise. Ont suivi des boulots au Local, au Conti et le voici maintenant responsable de la cave et du service du vin au Rouge Gorge, sur l'avenue du Mont-Royal Est. Là, il peut réellement partager le plaisir qu'il a à dénicher des « vins d'émotion », souvent bios ou nature.

Les frais de voyage de ce reportage ont été payés par Vins de France.

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Puligny-Montrachet Les Tremblots 2013 (vin blanc), 13 % alc./vol., 12676753, 79$.