Sous un ciel bleu azur et une chaleur estivale, les premiers coups de sécateurs ont été donnés lundi dans les coteaux champenois de Cumières (Marne) au premier jour d'une vendange très prometteuse malgré un été exceptionnellement froid et pluvieux.

«Nous avons des raisins magnifiques aux arômes complexes avec une finale légèrement épicée, riches en sucre et d'une acidité idéale», a constaté Vincent Laval qui exploite 2,5 hectares de vigne en appellation bio sur les hauteurs de Cumières, à quelques kilomètres d'Epernay.

«Le mois d'août a été particulièrement pluvieux mais le froid nous a évité le développement des maladies et comme le beau printemps avait donné de l'avance à la vigne, la situation est parfaite pour espérer un très bon millésime», a-t-il poursuivi.

Après 10 mois de vinification en fûts de chêne, ses vins vieilliront au moins quatre ans en cave avant d'être dégustés dans les grands restaurants et chez quelques cavistes par les amateurs de champagnes naturels et non dosés.

Lundi matin, une vingtaine de ses vendangeurs arpentaient le dos courbé, sécateurs et paniers en main, une parcelle de vigne peu pentue idéalement exposée plein sud pour couper les premières grappes de Chardonnay charnues, d'un vert tendre et brillant.

Pour ses premières vendanges, Laura 28 ans a délaissé l'accueil de l'Opéra de Paris où elle travaille habituellement pour «se refaire une santé au grand air» et mettre un peu d'argent de côté pour une prochaine «reconversion dans le maraîchage bio».

«Je suis venue parce que l'exploitation est bio et qu'on m'a assuré que l'ambiance était très sympa», a souligné la jeune femme.

En milieu de matinée, une table, dressée en contrebas des vignes, offrant de la charcuterie et du fromage, permet aux vendangeurs qui ont délaissé les polaires pour des tee-shirts de reprendre des forces.

Les plaisanteries et les rires fusent parmi l'équipe principalement composée d'habitués, alors que les verres de champagne se vident avant la reprise du travail.

«Je tiens à ce qu'il y ait de la bonne humeur, je fais un vin de plaisir et c'est cohérent que ce plaisir soit présent à toutes les étapes de fabrication», a ajouté le viticulteur qui paye ses vendangeurs à l'heure, les loge et les nourrit avec des produits locaux et bios, entretenant le mythe des vendanges festives en Champagne, alors que la plupart des viticulteurs emploient maintenant des personnes payées à la tache et qui se logent et se restaurent eux-mêmes.

La loi de finances 2013 a décidé d'une baisse drastique des exonérations de charges patronales pour le travail saisonnier, entrainant une explosion des coûts de cette main-d'oeuvre, selon le syndicat général des vignerons (SGV).

«La vendange 2013 a coûté 40 millions d'euros de charge soit deux fois plus que la précédente, cela fragilise la filière avec le risque de voir des vignerons faire appel à des sociétés d'intérim étrangères et ainsi amputer l'emploi local», a estimé Pascal Férat, président du SGV, qui réclame un retour des exonérations.

Mi-juillet, le Comité interprofessionnel du vin de Champagne (CIVC) avait fixé à 10 500 kilos par hectare le rendement de la vendange 2014, comme en 2013, avec la possibilité de récolter 3 100 kilos de plus pour alimenter la réserve personnelle.

«Comme la vigne est généreuse cette année et que le rendement obligatoire sera atteint sans difficulté, nous allons rentrer le meilleur pour faire le meilleur des vins», a souligné Vincent Laval.

Quelques communes de l'Aube et de la Marne ont eu l'autorisation de débuter la vendange dès lundi, mais la récolte ne devrait battre son plein sur l'ensemble des 34 000 hectares de l'appellation que vers le 15 septembre avec 120 000 travailleurs saisonniers qui cueilleront à la main les trois cépages du vignoble de la Champagne.