Si vous trouvez que les vins élevés en fûts de chêne français sont très différents de ceux élevés dans des barriques de chêne américain, vous ne rêvez pas. Outre leur provenance géographique, ces fûts donnent un goût très différent au vin.

Il existe 250 espèces de chêne dans le monde, mais peu d'entre elles sont utilisées pour le vin.La majorité des vignerons européens privilégie le chêne français issu de l'espèce sessile ou rouvre. Cette essence est surtout appréciée pour la finesse de son grain, dit la sommelière Hélène Dion.

Quant aux producteurs du Nouveau Monde, plusieurs utilisent des barriques de chêne américain faites avec du chêne blanc. Celui-ci apporte davantage d'arômes «whisky-lactone», décrits par le Centre technique interprofessionnel de la vigne et du vin de Bourgogne comme ceux de la noix de coco, du bois fraîchement coupé et de sous-bois.

«C'est l'exubérance contre l'élégance, résume Hélène Dion. Quand on pense au chêne américain, on pense à des arômes exubérants comme le chocolat, le fumé, le caramel. Le chêne français est plus fin, il apporte des arômes de vanille.»

Le Domaine Les Brome, en Estrie, utilise les deux types de barriques. Le maître de chai, Jean-Paul Martin, précise que le chêne français apporte plus de notes épicées aux vins. Cependant, il privilégie le chêne américain pour élaborer des vins charmeurs.

«Quand on veut faire un vin bonbon, on utilise la barrique de chêne américain, dit-il. Le bois apporte davantage d'arômes de noix de coco et de sucrosité. Ça plaît à n'importe quel type de consommateur.»

Si le type de chêne utilisé confère un goût distinct au vin, la manière dont le fût est préparé influence aussi ses arômes. 

Le degré de «chauffe», par exemple, qui permet de fixer les douelles (planches) ensemble et d'aromatiser les barriques, est différent sur les deux continents. La sommelière Hélène Dion remarque que les fûts de chêne américains sont souvent davantage chauffés, et donc aromatisés, que ceux provenant de France.

Les vignerons ne choisissent pas seulement le fût selon son goût, mais aussi en fonction de son prix. En raison de la grande popularité des barriques de chêne français, elles coûtent le double de celles fabriquées avec du chêne américain, soit 1000$ l'unité contre 500$. 

Selon la Fédération des tonneliers de France, 65% des barriques produites dans l'Hexagone sont exportées aux États-Unis, en Italie, en Espagne et en Australie.

Des barriques d'érable

Si les chênes américains et français sont les plus utilisés dans le monde du vin, le chêne provenant du centre et de l'est de l'Europe, notamment de Hongrie, est de plus en plus populaire. Certains vins sont également élevés en bois de châtaignier et d'acacia.

Au Québec, Jean-Paul Martin explique que certaines barriques ont été réalisées avec le bois local, l'érable. Les expériences n'ont toutefois pas été concluantes, dit-il.

«Pour qu'un bois soit utilisé en tonnellerie, il faut qu'il soit étanche au liquide, détaille M. Martin. L'érable ne l'est pas. Il n'est donc pas utilisable. Comme c'est un bois peu utilisé, on ne sait pas si ses arômes seraient compatibles avec ceux du vin.»

Selon la Fédération des tonneliers de France, seulement 2% des vins produits dans le monde sont vinifiés ou élevés en fûts de chêne.