De grands producteurs de vins, parmi lesquels Moët Hennessy (LVMH) et d'importants groupes indiens, investissent le marché encore embryonnaire des vins mousseux en Inde avec l'espoir de conquérir une clientèle jeune et urbaine.

Après le leader du marché indien Sula Vineyards, présent dans les vins effervescents depuis plusieurs années, Moët Hennessy, via sa marque Chandon, vient de commercialiser en octobre deux vins mousseux «made in India».

Le groupe Fratelli Wine, détenu par un groupe de familles indiennes et italienne, a également décidé de lancer son vin pétillant le mois dernier.

«L'objectif essentiel avec ce lancement est de développer la demande pour les vins sur ce marché», explique Jean-Guillaume Prats, patron de la division Moët Hennessy Estates and Wines.

«Chandon s'adresse aux hommes et femmes de 25-35 ans, habitant en ville et susceptibles d'adopter un mode de vie international tout étant fiers de ce qui est indien», dit-il à l'AFP.

Chandon s'est allié à des viticulteurs de la région de Nashik, le coeur viticole de l'Inde situé à environ 200 km au nord-est de Bombay dans l'État du Maharashtra, pour développer sa production locale.

Le groupe a ciblé une zone d'altitude, à 20/40 km au nord de Nashik, permettant d'avoir des températures moins élevées et moins de précipitations que sur la côte, afin d'obtenir un raisin de qualité.

«La loi nous interdisant d'être propriétaires de nos vignobles, nous nous fournissons auprès de viticulteurs de Nashik. Nous avons mis en place des partenariats de long terme avec eux et, en retour, ils travaillent de façon étroite avec nos équipes de viticulteurs pour assurer une haute qualité de raisin», ajoute M. Prats.

Encore limité en taille, le marché indien du vin progresse de 15 % à 20 % par an et devrait continuer de croître à ce rythme dans les prochaines années, explique à l'AFP Alok Chandra, consultant spécialisé.

Quelque 18 millions de litres de vin sont vendus chaque année en Inde et «le marché du vin pétillant, produit localement ou importé, représente moins de 10 % de ce volume», ajoute-t-il.

Pour lui, «il y a de la place pour un marché plus vaste pour ces vins car jusqu'ici la concurrence était faible et les groupes qui veulent se différencier investissent ce marché».

Un vin de fête

Tant pour Chandon que pour Fratelli Wine, le lancement de leur gamme en octobre a correspondu à une période de fête en Inde.

«Le vin pétillant est vu comme un vin de fête et peut toucher un public plus large que le vin», estime Kapil Sekhri, l'un des copropriétaires et directeur de Fratelli Wine, auprès de l'AFP.

«C'est une opportunité pour renforcer notre marque sur un créneau avec une bonne croissance. Mais il faudra être patient car c'est un marché naissant», estime t-il.

Fratelli Wine a développé son vignoble autour d'Akluj, à environ 300 km au sud-est de Bombay. Le groupe met en avant des rendements limités à un quart de la moyenne des producteurs indiens afin d'assurer une bonne qualité du raisin.

Offrir un mousseux «made in India» permet à ces groupes de s'adresser à une clientèle qui n'est pas en mesure de payer une bouteille de champagne, produit réservé à quelques privilégiés susceptibles de débourser au minimum 4500 roupies (75 $) par bouteille.

Les nouveaux arrivants commercialisent leur mousseux autour de 1000/1400 roupies (17 à 23 $).

Nombre d'Indiens ne consomment pas d'alcool, en particulier pour des raisons religieuses. La bière et les spiritueux constituent 90 % du marché des boissons alcoolisées.

La publicité pour l'alcool étant interdite en Inde, la promotion du vin passe en particulier par des ateliers de dégustation ou la formation de clubs d'oenologie qui se développent dans les grandes villes comme New Delhi ou Bombay. Quelque 80 % de la consommation de vin est concentrée dans ces grandes villes, selon l'association indienne des producteurs de vin.