Des appellations prestigieuses du vignoble de Bourgogne, Pommard et Volnay, et tous les 1ers crus ont subi de graves dommages mardi lors d'un long épisode orageux à l'impact «catastrophique» pour les exploitations, selon les viticulteurs.

Selon un bilan encore provisoire du Bureau Interprofessionnel des Vins de Bourgogne (BIVP), toute l'appellation Côte de Beaune (Côte-d'Or), qui s'étend sur une vingtaine de kilomètres a été touchée, de 10 à 90% selon les parcelles, par les violents orages de grêle et le vent, mardi après-midi.

Peu après 15 h 30, un orage s'était abattu sur ce secteur accompagné de grêle et d'un vent très fort, détruisant de nombreuses vignes.

Parmi les secteurs les plus touchés, l'extrême sud de l'aire d'appellation Beaune, jouxtant Pommard, détruit à 90% selon le BIVP. Le coteau entre Pommard et Volnay est touché à 70%. Tous les premiers crus sont impactés «On vient de tout perdre»

Ceps meurtris, baies éventrées et feuilles déchiquetées: Jean-Louis Moissenet, viticulteur à Pommard, constatait mercredi les larmes aux yeux, les dégâts causés par la grêle, pour la deuxième année consécutive, sur les parcelles de Pommard 1er cru qu'il exploite depuis 25 ans.

Quand on arrive sur les lieux et qu'on voit tout par terre, c'est comme si on venait d'être licencié sans prime. On a travaillé toute l'année et on vient de tout perdre», se lamente le président du syndicat des vignerons de Pommard.

Le sol de sa parcelle, qui domine le village de Pommard sous un soleil redevenu de plomb, est jonché de feuilles. Plus bas, la boue a même renversé un muret et emporté plusieurs ceps.

À Volnay, toute l'appellation a été touchée, de 30% à 70%. Se posait la question d'un traitement par hélicoptère pour éviter l'apparition de maladies sur les cicatrices des vignes, une décision devant recevoir l'aval de la préfecture. Certains pieds sont encore sous 60 mm d'eau.

«C'est catastrophique, des exploitations ne vont pas s'en remettre. On a au moins 30 à 40% de pertes, et cela peut monter à 70%, c'est la deuxième année que cela nous arrive, économiquement cela devient très compliqué», s'est alarmé Thiébault Hubert, président du syndicat d'appellation de Volnay.

Il explique notamment que lorsqu'une grêle d'une «telle intensité» ravage des parcelles, il faut deux à trois ans pour repartir sur des bois sains.

«Quand on replante, il faut quatre ans pour une première petite récolte, et dix ans pour tirer la quintessence du terroir», ajoute M. Moissenet.

Moral à zéro

«Après le printemps difficile que nous avons vécu, ça nous met le moral à zéro. Cela va se ressentir sur nos exportations, car la Bourgogne exporte beaucoup, on va se faire prendre nos parts de marchés et le prix des vins va augmenter», ajoute M. Hubert.

«L'an dernier, j'avais fait moins 60% de récolte et cette année j'en serai à moins 70 ou 80%», renchérit M. Moissenet, qui va demander à la municipalité le classement du secteur en catastrophe naturelle.

«C'est assez catastrophique à Savigny-lès-Beaune» également, selon Caroline Chenu, présidente du syndicat des vignerons de cette commune et exploitante en bio.

Elle a pour l'instant recensé «40 à 50% de pertes, et sur les vignes les plus touchées 80%, voire au-delà, avec un paysage de désolation, des vignes au feuillage inexistant ou par terre».

Selon un assureur basé à Dijon, seulement 30% des viticulteurs sur la zone Côte de Beaune et Cote de Nuit sont assurés, ces régions n'étant historiquement que peu sujettes à la grêle. Mais les changements climatiques font qu'elles sont de plus en plus touchées et de plus en plus violemment.

Le président de la région Bourgogne, François Patriat, qui doit se rendre sur les lieux jeudi, a souhaité «que l'on puisse étudier, avec l'ensemble des professionnels et des services concernés, le rétablissement d'un dispositif de défense aérienne antigrêle» tel qu'il existait il y a quelques années. Aujourd'hui, le cahier des charges des AOC - AOP interdit le recours à des filets antigrêles.

Les viticulteurs devaient dans la journée commencer immédiatement des traitements pour cicatriser la vigne, afin que des maladies telles que la flavescence dorée ne se développent pas.

Une alerte orange pour orages était maintenue mercredi en Côte-d'Or comme dans 12 autres départements du nord-est et du centre-est de la France.