Les oenophiles n'ont jamais bu d'aussi bons vins, estime l'une des personnalités les plus influentes du monde du vin. Rencontre avec Michel Rolland, réputé oenologue français, qui conseille plus d'une centaine de vignobles dans 14 pays.

Michel Rolland, qui célèbre ses 41 ans de carrière, constate depuis quelques années une amélioration de la qualité des vins dans le monde. Il est surpris de constater qu'on s'affaire encore, dans tous les pays producteurs, à rehausser la qualité des vins, même celle des vins d'entrée de gamme.

«On n'en a jamais bu d'aussi bons!», dit-il.

La typicité mise en valeur

Ce Bordelais d'origine ne cache pas son amour pour les vins de Bordeaux. «Quand tu nais à Pomerol, ça ne s'oublie pas», dit-il.

Il constate toutefois que l'on imite de moins en moins les crus bordelais dans les autres régions viticoles. Selon lui, le climat et la notion de terroir sont davantage pris en compte par les producteurs.

«Les pays viticoles sérieux produisent du vin dans la zone où ils sont, dit-il. On n'essaie plus d'imiter Bordeaux. Et comme souvent les imitations étaient plutôt pâles, chacun essaie de faire ses propres caractéristiques. C'est beaucoup mieux.»

M. Rolland croit que cette valorisation des caractéristiques propres aux régions viticoles contribue à l'amélioration de la qualité des vins.

Retour aux sources

Après plus de 40 ans à conseiller des vignerons partout sur la planète, Michel Rolland avoue qu'il lui reste peu d'endroits à développer. Une région suscite toutefois son intérêt: le pourtour de la mer Noire, soit la Bulgarie, la Roumanie et la Russie. Il croit que les vins de cette région, qu'il appelle le «nouveau Nouveau Monde», ont beaucoup de potentiel.

«Depuis deux ans, je fais du vin en Arménie, au pied du mont Ararat, raconte-t-il. C'est pour moi un retour aux sources. Car c'est le berceau de la viticulture. J'y fais du vin 5000 ans plus tard.»

L'oenologue surveille également de près la production de vins chinois. Il juge que la Chine, qui mise aujourd'hui davantage sur la quantité que sur la qualité, pourrait bientôt changer ses façons de faire... et surprendre les consommateurs.

Bravo aux vignerons québécois!

Des blancs aussi bons que ceux produits dans la plupart des régions viticoles du monde, des rouges aux arômes uniques et déroutants.

Voici ce qu'a pensé Michel Rolland des vins québécois. Le célèbre oenologue n'avait jamais goûté de bouteilles d'ici. Nous avons profité de son passage à Montréal la semaine dernière pour lui en faire goûter quelques-uns.

Michel Rolland a dégusté à l'aveugle trois blancs et trois rouges provenant de six vignobles québécois. Chaque dégustation comprenait des cuvées issues de cépages hybrides, comme le seyval et le maréchal foch, et d'autres de variétés vitis vinefera, comme le chardonnay et le pinot noir, davantage appréciées par la critique.

Conclusion: l'oenologue a d'abord préféré les blancs aux rouges. Puisque la saison chaude dans la province est courte, Michel Rolland ne s'attendait pas à retrouver des notes de fruits mûrs dans les vins.

«C'est ma première expérience de vins au Québec, dit-il. Ça peut être aussi bon que n'importe quel autre vin dans le monde. Bravo aux Québécois!»

En blanc, le chardonnay du vignoble des Pervenches a séduit les papilles du spécialiste.

Quant aux rouges, son avis a été plus nuancé. Dans une bouteille, le bois utilisé n'était pas, selon lui, d'une assez grande qualité, dans une autre, c'est le style trop sucré qui lui a déplu.

En revanche, il a craqué pour un assemblage de cépages hybrides du Domaine Saint-Jacques.

«J'aime bien le nez avec des notes de fruits noirs et de réglisse, explique-t-il. La bouche n'est pas très opulente, mais elle est assez harmonieuse.»

Karyne Duplessis Piché,collaboration spéciale