Du pied de vigne à la bouteille vendue directement au consommateur, les vignerons indépendants, qui tiennent leurs rencontres nationales mercredi et jeudi près de Bordeaux, exercent plusieurs métiers en un, clé selon eux de la réussite, mais entendent encore se diversifier.

«On a tous les métiers: on produit du raisin, on fabrique le vin et après on le commercialise», explique à l'AFP Virgile Joly, vigneron indépendant de 38 ans, qui exploite 25 hectares dans l'Hérault.

«On maîtrise toute la chaîne, on en est responsable de A à Z», se félicite-t-il, fier de son métier «difficile mais merveilleux».

Viticulture, oenologie, gestion d'entreprise, «il faut passer par tous ces pôles, c'est un des facteurs de la réussite».

Sur les quelque 25 000 viticulteurs en France, environ 7 000 ont adhéré à la confédération des vignerons indépendants, née il y a 31 ans de la rencontre entre les «vraceurs» du sud-ouest et les «bouteillards» d'Alsace, de Bourgogne et du Bordelais.

Grands crus classés ou issus d'appellations moins prestigieuses, exploitant des domaines de 20 hectares en moyenne répartis sur l'ensemble des vignobles français, ils s'enorgueillissent de leur liberté de fonctionnement et de leur diversité.

Sur les bouteilles, un logo garantit la traçabilité. Leur spécificité: privilégier la vente directe au consommateur, par un contact entre le client et le vigneron sur les salons organisés par le réseau et à la propriété. «Dans le vin, on vend un voyage: quand il ouvre sa bouteille, l'acheteur entend un accent, il voit un visage, il connaît l'histoire du terroir», souligne Virgile Joly. «C'est un modèle qui rassure par son côté authentique», explique Jean-Luc Dartiguenave, président de la fédération des vignerons indépendants de Gironde, «si le produit n'est pas bon, la sanction est immédiate».

«Compte tenu des fluctuations, on considère qu'être son propre metteur en marché est source d'indépendance», renchérit Daniel Mouty, qui préside la fédération d'Aquitaine. «Le vigneron dépendant», dit-il, «c'est celui qui ne peut pas dire non à son courtier quand il lui propose un prix indécent, c'est celui qui fait baisser les cours parce qu'il n'a pas le choix, parce qu'il y a l'huissier, le banquier». Mais plus de la moitié des vignerons indépendants vendent encore tout ou partie de leur production en vrac, qui consiste à écouler son vin avant sa mise en bouteille. «La plus grande souffrance, ce sont ces gens-là qui la subissent, ils sont soumis à des prix où personne ne peut vivre, en-dessous du coût de revient», déplore Michel Issaly, président national de la confédération, dont l'objectif est «qu'un jour, ces vraceurs valorisent la totalité de leur production».

Avec la baisse «lourde» de la consommation de vin en France, le vigneron indépendant est appelé à se diversifier et à élargir ses horizons. «C'est un métier très compliqué, il est producteur, transformateur, commercialisateur, gestionnaire d'entreprise et maintenant il faut qu'il apprenne le marketing et la diversification», déclare encore à l'AFP M. Issaly. Cette diversification passe par le développement à l'international, quand les vignerons indépendants réalisent à peine 20% de leur chiffre d'affaires à l'export, mais aussi par l'oenotourisme.

«Avec l'accueil au caveau et la mise en avant de notre savoir-faire, on ajoute encore un nouveau métier» aux multiples casquettes du vigneron, dit-il, «la compétitivité de nos entreprises passera pas ces deux nouveaux challenges, l'enjeu maintenant pour nous c'est de les accompagner».