Les vignerons et négociants français en vin de Cahors, en plein marasme économique et identitaire il y a cinq ans, reprennent espoir depuis qu'ils sont passés à l'offensive internationale sous la bannière de leur cépage emblématique, le Malbec, qui a fait le succès des vins argentins.

«Nous somme le seul vignoble de France à avoir progressé en 2009 à l'exportation, de 5,2% en volume et de 6% en valeur, avec une hausse de 29% aux États-Unis», souligne le co-président de l'union interprofessionnelle du vin de Cahors (UIVC) Alain Janicot.

La part des exportations approche désormais 20% et le directeur du marketing Jeremy Arnaud espère atteindre les 30% d'ici deux ans, en visant le milieu de gamme (de 7 à 15 euros la bouteille) avec une nouvelle bouteille, gravée Cahors Malbec».

Ce cépage historiquement français a connu ses plus grands succès en Argentine (71% de la production mondiale, contre 11% à Cahors) et l'UIVC a exploité cette parenté.

Cahors, l'une des seules AOC françaises quasiment monocépage (le Malbec y entre en moyenne pour 85%), a ainsi épousé la tendance mondiale identifiant les vins par le cépage et non par le terroir.

Il se retrouve en phase avec le développement des vins de cépages souhaité par le gouvernement français pour contrer l'érosion des vins français sur le marché mondial (17% en volume et 34% en valeur en 2009 contre 25% et 51% il y a 20 ans).

«Nous avons plus d'atouts que d'autres pour prendre le train qui passe, en première classe», estime Jérémy Arnaud.

Ce week-end, 400 acheteurs et 150 journalistes du monde entier arpentent le vieux pont de Valentré (XIVe siècle), pour y rencontrer une centaine de producteurs, témoignant du retour en grâce du «vin noir», à l'occasion des «deuxièmes journées internationales du Malbec» (21-23 mai).

Alain Janicot se réjouit de voir acheteurs chinois, américains et canadiens déguster les vins et visiter les exploitations du «Cahors, the french Malbec» (Cahors, le Malbec de France). Il attend aussi 3500 amateurs de vins pendant le week-end.

«Nous avons été accueillis à bras ouverts l'an dernier en Chine, ils sont ici nombreux et je les retrouverai la semaine prochaine à Vinexpo Hong Kong, ils sont passionnés par le Malbec et par notre terroir, qui ajoute au vin une note de fraîcheur», explique ce négociant, pour lequel Cahors revient de loin.

En 2002 rappelle-t-il, l'interprofession a explosé quand le président de l'époque Alain-Dominique Perrin (alors PDG de Cartier) a été mis en minorité sur un projet de hiérarchisation de l'appellation Cahors en crus, impliquant le déclassement de 15% environ des 4.500 hectares de ce petit vignoble.

Les ventes se sont alors effondrées de 240 000 à 170 000 hectolitres, l'image du Cahors souffrant d'une offre abondante de vin médiocre bradé en grandes surfaces. La surface du vignoble avait décuplé depuis l'attribution de l'AOC en 1971.

Il a fallu deux ans pour relancer l'interprofession, quatre ans pour adopter le «plan stratégique» de 2006, visant à mieux valoriser le Cahors en France et à effectuer un bond à l'international, qui ne représentait que 8% des ventes en 2002, selon M. Janicot.

Sur le marché intérieur l'UIVC souhaite relancer, mais «avec plus de pédagogie» envers les vignerons, son projet de «repositionnement» vers le haut de gamme.

Si certains vignerons craignent que l'on bute toujours sur «la pression constante des grandes surfaces sur les prix», l'UIVC mise sur ses succès à l'exportation pour «convaincre la grande distribution qu'on peut sortir le Cahors des bas de gondole premier prix».