Les vins français tentent une percée sur le balbutiant marché indien, le plus petit marché d'Asie du sud à l'importation, en misant sur l'énorme potentiel de consommation de la nouvelle classe moyenne et sur les négociations de l'Union européenne pour alléger le poids des taxes.

Pour la première fois, Ubifrance, l'agence française pour le développement international des entreprises, a organisé à New Delhi une dégustation de vins français avec un dizaine de producteurs. Quelque 80 importateurs locaux, négociants et gérants de caves pour les hôtels ont répondu à l'invitation.

«Le marché indien a un fort potentiel de développement. La part de vin consommée par les Indiens par rapport aux bières et spiritueux, notamment le whisky, reste encore marginale, de l'ordre de 2%», détaille à l'AFP Jérôme Desquiens, chef du pôle Agrotech d'Ubifrance.

Selon une récente étude réalisée pour le salon Vinexpo à Hong Kong, l'Inde affiche les plus forts taux de progression de consommation de la région Asie: +327% entre 2004 et 2008 et +97% prévu entre 2009 et 2013.

Les vins français, notamment le Bordeaux, le champagne et le cognac, figurent de loin en tête des importations indiennes, s'appropriant environ 38% du marché, devant l'Australie, les États-Unis et l'Italie. Mais il s'agit désormais de consolider cette avance dans la perspective du boom annoncé.

«Les Indiens sont prêts à tout essayer, c'est pourquoi nous voulons leur montrer la diversité du vignoble français», souligne Patrick Manon, directeur d'Ubifrance Inde. Une autre dégustation doit se tenir cette semaine à Bombay.

Jusqu'à présent, les exportations de vin sont fortement pénalisées par les droits de douane mis en place au niveau fédéral et local. Les taxes fédérales, de l'ordre de 150%, viennent s'ajouter aux droits de douane locales décidées par chaque État du pays et qui peuvent aller jusqu'à 30% du prix final.

«Je suis venu ici pour trouver de nouvelles niches mais le gros problème, ce sont les taxes», témoigne Philippe Layus-Coustet, gérant des Armagnac et vins de Montal (Côtes de Gasgogne), numéro un des importations d'Armagnac aux États-Unis et notamment présent en Corée, au Japon et en Russie.

L'Union européenne et l'Inde sont actuellement en négociations pour abaisser ces droits de douane, même si l'alcool représente la deuxième source de revenus pour l'État indien, rappelle Jérôme Desquiens.

«En venant en Inde, on fait un pari sur l'avenir, on pense que le marché va s'agrandir. L'Union européenne négocie avec l'Inde sur les taxes, mieux vaut être là avant qu'après !», résume Jérôme de Rivoyre, négociant de la société bordelaise Rivoyre et Varenne.

Jean-Christophe Icard, gérant d'une propriété familiale du Bordelais, le Château de l'Orangerie, qui réalise déjà 40% de son chiffre d'affaires à l'export, avoue, lui, ne pas connaître les goûts de la clientèle indienne.

Comme en écho, l'un des participants apprécie tout haut son verre de rosé: «Il est incroyablement frais et exprime tous les arômes d'une manière étonnamment confortable», se délecte Gurjit Singh Barry, négociant pour la société Wi-Not, à New Delhi.

Selon lui, «le marché est en pleine croissance. La jeune génération a voyagé à l'étranger et elle a envie ici d'avoir des moments agréables en buvant du vin», analyse-t-il.

L'Inde, qui a commencé sa propre production dans les années 90, consomme chaque année 1,2 million de bouteilles locales et 200.000 importées. L'an dernier, deux producteurs italiens ont été les premiers étrangers à investir directement dans le pays, en prenant des parts dans un vignoble de l'ouest.