L'Allemagne a mis aux enchères mercredi des fréquences sur la bande de 700 MHz, une première en Europe pour ce créneau jusque-là utilisé par la télévision, fortement convoité par les opérateurs télécoms pour assurer le trafic exponentiel de données sur téléphones intelligents.

«L'Allemagne est le premier pays en Europe à mettre des fréquences de 700 MHz à disposition des opérateurs mobiles», explique le président de l'agence allemande des réseaux Jochen Homann.

Pour l'heure, de telles fréquences sont exclusivement utilisées pour la télévision numérique terrestre, mais elles permettraient aux opérateurs télécoms d'améliorer l'accès à la 4G des téléphones et tablettes, notamment à l'intérieur des bâtiments, et de préparer le terrain pour la 5G, la génération du futur de la téléphonie.

«Les opérateurs peuvent avec seulement relativement peu d'antennes apporter un internet rapide aussi dans les régions jusque là peu reliées», met également en avant le régulateur allemand des télécoms. Une des grandes promesses d'Angela Merkel depuis plusieurs années est que l'ensemble du pays soit relié à l'internet haut débit d'ici 2018.

La France a elle pour objectif de lancer un appel à candidatures en juillet, ce qui ouvrirait la voie à une cession aux opérateurs avant la fin 2015. Paris en attend quelque deux milliards d'euros, un montant déjà inscrit à son budget de l'année.

Pour les fréquences allemandes, sont sur les rangs, l'opérateur historique du pays, Deutsche Telekom, et ses concurrents Vodafone et Telefonica Germany, présélectionnés entre autres pour leurs capacités financières et leurs compétences pour construire un réseau. Malte Räther, analyste chez Warburg Research, table sur une répartition en trois parts égales de ces licences courant jusqu'à fin 2031, pour un montant de 640 millions d'euros chacune sur le créneau de 700 MHz.

Montant en milliards 

Cette enchère d'une partie du spectre hertzien, qui ne porte pas uniquement sur des fréquences de 700 MHz mais aussi sur d'autres, devrait fortement gonfler les caisses de l'État allemand, mais l'ensemble des recettes devra être réinvesti dans les infrastructures télécoms d'un pays qui apparaît souvent à la traîne dans ce domaine.

«Je m'attends à un résultat en milliards d'euros», a expliqué au journal Bild am Sonntag le ministre allemand des Transports Alexander Dobrindt, qui anticipe une «vive concurrence» entre les opérateurs. Warburg Research avance le chiffre de 4,2 milliards d'euros pour l'ensemble du paquet.

«Il s'agit de savoir à la fin lequel des opérateurs pourra faire l'offre la plus attractive à ses clients grâce à ces nouvelles fréquences», a fait valoir M. Dobrindt.

Mais le résultat, qui servira certainement d'étalon pour les autres pays, pourrait ne pas être connu avant plusieurs semaines. Les enchères se terminent quand, sur chacun des blocs de fréquence proposé, il n'y a plus qu'un seul enchérisseur. La dernière grande vente de fréquences, qui remonte à 2010, au moment où l'arrêt de la télévision analogique avait libéré des fréquences, avait duré plus de cinq semaines et rapporté 4,4 milliards d'euros.

Même une fois achetées, les fréquences 700 MHz ne seront pas pour autant immédiatement disponibles pour les réseaux télécoms, car cela doit s'accompagner notamment de changement de normes pour que la diffusion de la télévision numérique terrestre se poursuive sans problème. Selon l'agence des réseaux, certaines devraient progressivement être réaffectées pour la téléphonie à partir de 2017 et vers le milieu de l'année 2018 à l'échelle nationale.

La fédération allemande de la high-tech Bitkom réclame une libération des fréquences avant même 2018 pour accompagner l'essor de l'usage d'internet sur les téléphones, notamment le visionnage de vidéos, très gourmand en bande passante. Sur rien qu'un an, le volume de données consommé par l'Allemagne sur les réseaux mobiles est passé d'environ 370 millions de gigaoctets en 2014 à 480 millions estimés pour 2015.