Le groupe informatique Apple a mis en scène lundi le retour de son PDG Steve Jobs, après une greffe de foie révélée dans la presse, en le laissant annoncer un nouveau succès, la vente à plus d'un million d'exemplaires en trois jours du nouveau iPhone 3GS.

Pas de conférence de presse ni la moindre apparition publique: il a suffi de deux courtes phrases dans un communiqué pour manifester que Steve Jobs, en congé depuis janvier en raison de problèmes de santé «complexes» non précisés, était revenu à l'échéance prévue de la fin juin, alors que la semaine dernière encore de folles rumeurs avaient couru sur la gravité de son état de santé.«L'iPhone est gagnant», s'est contenté d'indiquer M. Jobs.

Sollicités, des porte-parole n'ont fourni aucune information, ni sur l'état de santé de Steve Jobs, 54 ans, ni pour indiquer si oui ou non il avait repris ses fonctions à plein temps, après avoir cédé la gestion de l'entreprise au quotidien à son numéro deux Tim Cook depuis cinq mois.

Samedi, le Wall Street Journal avait indiqué qu'à la suite d'une greffe du foie, survenant quatre ans après un cancer du pancréas, il ne reprendrait qu'à temps partiel, au moins dans un premier temps.

Pour certains analystes, le groupe de Cupertino (Californie, ouest) a depuis janvier fait la preuve qu'il était capable de fonctionner pleinement sans son charismatique PDG, un visionnaire crédité d'avoir révolutionné la façon de faire de l'informatique sur un Mac, d'écouter de la musique sur un iPod et d'utiliser un téléphone portable avec l'iPhone.

De fait, la dernière génération de l'iPhone, intitulée 3GS, a été lancée et commercialisée sans participation directe de Steve Jobs, ce qui ne l'a pas empêché d'enregistrer un succès équivalent à celui de l'iPhone 3G en juillet dernier.

Le nouvel iPhone fait notamment mieux que le nouveau Pre de Palm, lancé au début du mois avec des critiques enthousiastes, et qui selon certains analystes n'aurait été vendu qu'à 600.000 exemplaires aux premiers jours de sa commercialisation.

De fait, le cours de l'action Apple, a bondi de 59% depuis le 14 janvier et l'annonce du retrait de M. Jobs (avant de céder 1,83% lundi à la mi-journée, à 136,78 dollars).

«Il y a très peu de sociétés dont le succès repose sur une seule personne», quand bien même il s'agirait du talentueux Steve Jobs, explique l'analyste Stephen Baker, au cabinet de marketing NPD.

Même appréciation chez l'analyste David Eller, de JPRG, interrogé lundi sur la chaîne de télévision CNBC: «pour les deux années à venir je suis très confiant sur les perspectives de la société», a-t-il dit.

Mais à plus long terme, le point d'interrogation pesant sur la présence de Steve Jobs est plus problématique: «on a de quoi s'inquiéter sur l'horizon de cinq à dix ans», a-t-il dit, soulignant que M. Jobs «est la vision derrière la société», et représente à lui seul «de 10 à 15%» de la valeur d'Apple.

Dans les années 1980, M. Jobs avait quitté la société à la suite d'un différend sur l'orientation stratégique du groupe, qui avait connu un passage à vide jusqu'à son retour aux commandes en 1997, point de départ d'une série de succès faisant du logo à la pomme croquée un accessoire de mode incontournable (iPod, iMac).

En attendant, le mystère entretenu par Apple sur la santé de son patron irrite analystes, juristes et actionnaires, estimant que la direction est à la limite de ses obligations de communication.

«Le risque c'est que l'usage de ne pas communiquer puisse se répandre», souligne l'analyste Jon Ogg sur le site 247WallSt.com, s'inquiétant d'une tendance croissante à la rétention d'information.