La cour d'appel de Colmar a réexaminé lundi le cas de Sabine Rinckel, une Strasbourgeoise de 44 ans, déclarant souffrir d'électro-hypersensibilité, qui réclame à son bailleur social un relogement en zone préservée des ondes émises par les antennes-relais de téléphonie mobile.

«Je souhaite être logée en zone épargnée pour vivre normalement et qu'on ne qualifie plus mes symptômes de subjectifs», a déclaré la plaignante avant le début de l'audience de la 3e chambre civile de la cour d'appel. Cette femme, qui avait été déboutée en première instance, était accompagnée du président de l'association Robin des Toits, Marc Cendrier, qui milite pour une reconnaissance de la toxicité des ondes, et d'une autre Strasbourgeoise se déclarant électrosensible, une pathologie reconnue en Suède et en Grande-Bretagne, mais pas en France.

«Ce qui se passe aujourd'hui dépasse de loin l'évènement local», a dit Marc Cendrier aux journalistes. «Les antennes-relais constituent une attaque de la santé publique générale: tout le monde y est plus ou moins exposé en fonction de sa constitution physiologique», a-t-il expliqué alors qu'une pancarte à l'entrée du tribunal proclamait: «Un EHS (électro-hypersensible) n'est pas malade, il est fragilisé par les ondes».

 

Les débats à la cour se sont d'emblée cristallisés autour de la responsabilité du bailleur social, CUS Habitat, au titre de «troubles de jouissance» face au problème de la locataire qui dit ressentir des fourmillements, des maux de têtes, des acouphènes et des douleurs aux vertèbres cervicales en raison de la proximité des antennes-relais.

 

L'avocate de Mme Rinckel, Me Dominique Harnist, estime que le bailleur de la communauté urbaine est responsable parce que c'est lui qui «donne l'autorisation aux opérateurs» de téléphonie mobile d'implanter des antennes sur les toits de ses logements, moyennant une rétribution financière.

 

«J'aimerais savoir où se trouvent ces antennes», lui a demandé la présidente Francine Rastegar en réclamant d'autres pièces «que les articles de journaux généralistes», telles que «des photos ou des études scientifiques» pour étayer ses propos sur la nocivité des ondes.

 

Me Harnist a réclamé le relogement en «zone blanche» de sa cliente qui souhaite «vivre normalement», c'est-à-dire dans une aire exempte d'émissions, ou soumise à un rayonnement faible, ainsi que 5000 euros pour préjudice moral.

 

De son côté, l'avocate du bailleur, Me Sandrine Bihl, a argué que «ni l'État (...), ni la science actuelle ne prouvent encore de nocivité aux antennes-relais».

 

«Peut-on demander à CUS Habitat d'aller au delà l'autorité publique», s'est encore interrogée l'avocate du bailleur, rappelant par ailleurs que la plaignante «ne démontre pas la relation entre la proximité des antennes et ses symptômes».

 

Me Bihl a expliqué que Mme Rinckel avait été relogée une première fois, sans succès et que, depuis, plusieurs logements lui ont été proposés hors de l'aire urbaine. «Il n'y a pas d'obligation pour le bailleur d'adapter l'appartement en fonction de sa maladie», a-t-elle conclu.

 

«Maintenant où comptez-vous loger cette dame?» lui rétorque la présidente.

 

«Il y a des antennes partout», reconnaît l'avocate du bailleur. «Sur le dernier immeuble proposé, il n'y avait pas d'antenne (...) elle refuse tous les sites», a insisté Me Bihl.

 

La cour d'appel rendra son arrêt le 15 décembre.

 

Dans une décision de justice du 18 septembre, Bouygues Télécom, assigné par trois couples riverains, avait été contraint de démonter une antenne-relais de téléphone mobile à Tassin-La-demi-Lune (Rhône) pour «risque potentiel sur la santé».