Des antennes-relais de téléphonie mobile sont dissimulées dans des dizaines de clochers d'église au Québec, à proximité d'écoles et de garderies, ou carrément fixées sur des toits d'écoles, a appris un comité de citoyens de Terrebonne depuis qu'il dénonce leur présence dans le clocher d'une église de cette ville de la banlieue montréalaise.

Dans des tracts et des communiqués, le comité affirme que «ces antennes sont dangereuses pour la santé des enfants et devraient être situées à plus de 300 mètres des écoles». Un des membres du comité, François Therrien, enseigne l'électricité et s'intéresse depuis longtemps aux champs magnétiques. Ceux-ci sont soupçonnés de causer des maladies graves, y compris la leucémie chez les enfants, dit-il.

Contactés cette semaine, les représentants des compagnies Rogers et Bell, propriétaires de la plupart des antennes-relais, ont souligné que leurs émissions d'ondes électromagnétiques respectent les normes de Santé Canada. Mais ces dernières sont beaucoup plus permissives que dans plusieurs pays européens, soutient M. Therrien.

Le danger des champs magnétiques, tels qu'irradiés par les lignes électriques et les antennes de téléphonie mobile, fait l'objet d'une controverse dans le milieu scientifique. Dans un rapport publié en avril, l'Institut national de santé publique du Québec note que «certaines organisations et plusieurs pays ont préconisé une approche prudente quant à ce possible risque (de leucémie infantile) et ont proposé des mesures afin de réduire les expositions à ces champs».

Le Centre international de recherche sur le cancer, une branche de l'Organisation mondiale de la santé, considère que les champs magnétiques sont «peut-être» cancérigènes, au même titre que le DDT: «L'association entre la leucémie chez les enfants et les champs magnétiques de forte puissance a été jugée comme une preuve limitée de risque excessif de cancer», a-t-il statué.

Le comité de citoyens pour le retrait des antennes cellulaires du clocher de Terrebonne réclame l'adoption du principe de précaution. «Trois mille six cent dix enfants sont bombardés continuellement par les micro-ondes des antennes cellulaires cachées dans le clocher», affirme-t-il. Une garderie de 80 enfants et un collège de 1400 élèves sont situés à 80 mètres de l'église; des écoles primaires se trouvent aussi très proches.

Le curé de la paroisse n'a pas rappelé La Presse. Une secrétaire nous a renvoyés chez Rogers, propriétaire de l'antenne. «On respecte les règles, a dit Marie-Ève Villeneuve, porte-parole de la compagnie. On a 1000 antennes au Québec: on ne prend pas de risques avec la santé et la sécurité de la population.»

Le comité de citoyens de Terrebonne a reçu de nombreux appels et courriels depuis qu'il a lancé sa bataille, ce qui lui a permis de recueillir de nouvelles informations. «On a constaté la présence d'antennes fixées directement sur des toits d'écoles, y compris dans notre région, sur l'école secondaire Félix-Leclerc à Repentigny, a dit M. Therrien. Il y en a sur le toit du centre de formation professionnelle Compétences-2000 à Laval, du collège privé Mont Saint-Louis dans le quartier Ahuntsic à Montréal et sûrement ailleurs.»

Le comité a aussi appris que des antennes sont dissimulées dans 39 clochers du diocèse de Montréal et 10 autres dans celui de Saint-Jérôme. «On a demandé aux évêques de publier la liste, dit M. Therrien. On attend toujours.» Les compagnies versent des loyers de plusieurs milliers de dollars par année pour placer leurs antennes sur des édifices, ce qui peut constituer un revenu intéressant tant pour les églises que pour les écoles.

En Europe, le débat fait rage. Des dossiers sont régulièrement publiés à ce sujet dans les médias. En mai, l'évêque du diocèse de l'Ain (un département français) a décidé de ne pas reconduire les contrats liant les paroisses aux opérateurs de téléphonie mobile. «Les clochers ne sont pas faits pour être des relais de téléphonie», a dit Mgr Guy Bagnard, partisan du principe de précaution.

Des antennes situées près d'écoles ont été retirées à Lyon, après des cas de cancers. La Ville de Paris songe à les interdire près des écoles. La Finlande les interdit à moins de 300 mètres des écoles. Hors de l'Europe, Israël vient d'adopter une loi interdisant les antennes sur les écoles.

Une nouvelle étude, réalisée à l'Université catholique de Louvain (Belgique), révèle que le taux de mortalité était deux fois plus important chez des rats exposés à des niveaux réglementaires d'ondes pulsées (antennes, wi-fi, etc.) que dans un groupe témoin.