Nicolas est allergique à la publicité non sollicitée. Il a placé un autocollant sur sa porte pour ne pas recevoir de circulaires. Il a demandé aux firmes de télémarketing de biffer son nom de leur liste pour éviter les appels indésirables à la maison. Et il renvoie systématiquement les pourriels à son fournisseur d'internet.

Mais il s'est heurté à un mur avec son téléphone mobile. En janvier 2008, il s'est mis à recevoir quotidiennement de nombreux textos publicitaires. Impossible de répondre pour exiger l'arrêt de la campagne publicitaire intempestive, car les messages ne sont associés à aucun numéro de téléphone valide.

Nicolas communique alors avec son fournisseur pour connaître l'identité des expéditeurs. Impossible, lui répond-on.

On lui conseille plutôt de répondre «stop all» à chaque message publicitaire indésirable. Nicolas est perplexe. Premièrement, il considère que c'est un non-sens technologique: d'un côté, le fournisseur se dit incapable de retracer l'expéditeur, tout en l'assurant que la réponse «stop all» lui parviendra.

Deuxièmement, Nicolas sait que, sur l'internet, il ne faut pas répondre aux pourriels, question de ne pas confirmer à l'expéditeur malveillant que l'adresse est valide.

Troisièmement, cette solution lui coûtera de l'argent: si les textos entrants sont gratuits, les textos sortants, eux, lui sont facturés 15 cents chacun.

Avant d'aller plus loin, quelques éclaircissements s'imposent. Tout d'abord, il existe deux catégories de textos indésirables: ceux qui proviennent d'un service d'alertes établi (nouvelles, alertes boursières, etc.), et les véritables pourriels.

Pour ne plus recevoir de textos de la première catégorie, il faut effectivement répondre «stop». C'est une norme dans l'industrie. Mais dans le cas des véritables pourriels, il vaut mieux s'en remettre à son fournisseur de service, explique Marc Choma, porte-parole de l'Association canadienne des télécommunications sans fil (ACTS).

Mais il assure que les vrais textos pourriels sont très rares. «Quand nous avons lancé le service au Canada, nous avons pris beaucoup de précautions, car il y avait beaucoup de problèmes en Europe. Et nos efforts ont porté leurs fruits», dit-il.

À son avis, la situation de Nicolas est un cas extrême. Justement, revenons à son histoire...

Suivant les conseils de son fournisseur, Nicolas envoie 327 messages «stop all» pendant un mois, sans aucun résultat. Mais il se retrouve avec un surplus de 50$ sur sa facture. Pourtant, le fournisseur lui avait promis que les textos envoyés en réponse à des pourriels ne lui seraient pas facturés.

Il se plaint à nouveau et obtient un crédit de 50$. Le fournisseur reconnaît que le «stop all» ne donne rien, mais il n'a aucune solution immédiate pour bloquer les textos indésirables.

Il prétend qu'il n'est pas autorisé par le CRTC à bloquer un expéditeur et qu'il est tenu d'assurer la libre circulation des communications sur son réseau. En fait, le CRTC ne réglemente pas la téléphonie mobile, sauf en ce qui concerne la confidentialité. Le CRTC empêche les fournisseurs de vendre ou de diffuser l'information personnelle de ses clients.

En guise de solution, on offre à Nicolas de changer de numéro de téléphone «sans frais». Une blague! Depuis le début, c'est justement ce qu'il veut éviter. De toute manière, il n'a pas de contrat, donc il peut très bien décider de changer de fournisseur tout en conservant le même numéro.

Finalement, le problème s'est réglé par magie. Au printemps, sans qu'il sache pourquoi, Nicolas a cessé de recevoir des pourriels. «Je ne sais pas si mon fournisseur a réussi à les filtrer ou si les expéditeurs ont arrêté de m'en envoyer», dit-il. Mystère

Voilà qui démontre à quel point les consommateurs sont impuissants face aux textos indésirables. Et ce n'est qu'un début. «Les textos vont peut-être attirer de plus en plus de pirates parce qu'il y a de plus en plus de consommateurs qui utilisent ce service», prédit Jacques Viau, directeur de l'Institut de la sécurité de l'information du Québec.

Voici quelques conseils pour enrayer les textos indésirables:

- Répondez «stop» pour mettre fin à l'envoi de textos de sources bienveillantes.

- Lorsqu'il s'agit d'un expéditeur malveillant, plaignez-vous plutôt à votre fournisseur. «Si tout le monde se plaint, il va falloir que le fournisseur fasse quelque chose», dit M. Viau.

- Évitez de dévoiler des renseignements personnels sur un site web ou un forum de discussion. «Je ne donnerais pas mon nom à n'importe qui dans la rue. Pourquoi serait-ce différent sur l'internet?» demande M. Viau. Quand on exige vos coordonnées, utilisez un alias, un autre numéro de téléphone, une fausse adresse courriel, suggère-t-il.

- Avant de vous abonner à un service de messages d'alerte, vérifiez l'honnêteté de l'organisation et demandez à quelles fins seront utilisés vos renseignements personnels.

Gare aux textos payants (horoscope, maxime quotidienne, etc.) qui s'insèrent dans la facture de téléphonie mobile des consommateurs par des moyens plus ou moins honnêtes, dit M. Viau. En quelques clics distraits, les internautes acceptent de s'abonner en naviguant sur l'internet. Du coup, ils acceptent les frais à leur insu.

- Attention aux frais! À partir du mois d'août, Bell Mobilité et Telus Mobilité vont imposer des frais de 15 cents à leurs abonnés pour chaque texto entrant. Bell et Telus jurent qu'ils ne feront pas payer leurs clients pour les textos indésirables. Mais il faudra leur acheminer chaque texto pour être remboursé. Néanmoins, ce changement de facturation enrage les clients qui ne peuvent répliquer en déchirant leur contrat, à cause des pénalités importantes de rupture de contrat. Depuis deux semaines, ils ont intenté deux recours collectifs. Même le chef du Nouveau Parti démocratique (NPD) a lancé une pétition électronique pour dénoncer "l'escroquerie relative aux messages textes". Pour la signer: www.ndp.ca/page/6581.

- L'Association canadienne du marketing (www.the-cma.org) offre un service d'interruption de sollicitation qui permet de réduire la sollicitation par la poste, le téléphone et le télécopieur. En septembre prochain, la Liste nationale des numéros de téléphone exclus, gracieuseté du CRTC, prendra le relais. Le service protège aussi les utilisateurs de téléphone mobile contre les appels indésirables mais non contre les textos indésirables.